Nuremberg, hiver 1935 ;
Un hiver rude que cette année là. C’est emmitouflé dans des draps de laine que Seyonne affronta ses premiers mois hors de l’utérus brûlant de sa mère. Solide bambin, il passa cette saison plus calomnieuse que les autres années sans incident, acquérant une robustesse qui semblait rappeler la vigueur du père. Edmund Weinsberg, colonel dans l’armée allemande, évoque souvent ces personnalités si froides et robustes, n’aspirant qu’à effrayer leurs subalternes au moyen d’un éloquent sourire vicieux. Pourtant, ce militaire endurci a toujours montré, bien que la manière soit peut-être maladroite, son amour pour son fils. Contrairement à bien de ses collègues, Edmund et Adelaïde aimaient plus que tout leur enfant, même s’ils le montraient avec une certaine réservation. Leur désir résidait dans le bonheur de Seyonne. Ainsi grandit le petit garçon, entouré par des domestiques, ses parents et des professeurs. Enfin, ses parents…disons qu’il n’avait la joie de voir son père que le soir, très tard, alors que ce dernier revenait d’une journée chargée en devoirs. Quant à sa mère, la belle blonde restait à la maison. Après tout, à l’époque, il n’y avait rien d’étonnant à cela, que du contraire.

Vint la deuxième guerre, celle tant redoutée à travers le monde entier, mais principalement en Europe. Celle des nazis. Seyonne avait 4 ans lorsqu’elle fut impitoyablement déclarée par Hitler, ce fou attardé, cet intelligent rancunier. Pour survivre, il faut se montrer lâche, ou fuir. La famille Weinsberg opta pour la première, la jugeant moins risquée. Ainsi vécurent-ils en flattant les volontés de la SS. C’est ainsi qu’ils survécurent. En se montrant lâches. Peu fiers mais soulagés à la fin de cette horrible chaos, le couple mis au monde un deuxième enfant. Une petite fille qu’ils prénommèrent Lorelei. Elle était si belle, avec ses longs cheveux blonds, son petit visage empourpré par l’innocence, ses yeux d’un bleu éclatant. Elle avait tout hérité de sa mère, contrairement à Seyonne qui était le portrait craché de son père. Le petit frère, alors âgé de 9 ans, se jura de protéger ce petit corps de chair rosé et de la couver d’un amour fraternel. Au fil des années, grandissant dans l’allégresse et la candeur, les deux enfants développèrent un lien fraternel solide immuable. Aucun secret entre eux, Seyonne se complaisait à raconter des histoires le soir à sa petite sœur, à lui apprendre des trucs et astuces, des jeux plaisants.

Quelques années plus tard, alors que le petit garçon laissait place à un adolescent vigoureux, curieux et aventurier, le service militaire obligatoire appela Seyonne loin de son petit nid douillet. Pendant à peu près un an, l’adolescent ne se ploya pas sous l’effort, suivant les ordres de ses supérieurs, apprenant, s’entraînant dans un torrent de sueur. A la fin de son service, le jeune soldat ne rechigna pas et poursuivit son ascension pendant quelques années. Ses études en ingénieur furent en partie payée par l’armée. C’est pendant cette période que surgit son pouvoir. Au début apeuré, ne sahcant ce qui se passe, le garçon fut en proie au doute et à la terreur. Mais au fil des mois, le jeune brun commença à maîtriser ce pouvoir. Celui de priver un individu de ses sens. Il ne sut ce qu’il était. Au fond de lui-même, il était terrifié par ce qu’il était. Un monstre ? Peut-être. Cette atroce idée fut balayée par des amourettes scolaires. C’est aussi à cette même période qu’il découvrit son penchant pour les hommes. Un nouveau fait qu’il refoula violemment. On ne peut pas dire que l’homosexualité soit acclamée de leurs jours et Seyonne souffrait de ses différences. Une fois diplômée en ingénieur informatique & biomécanique, Seyonne commença à attirer l’œil des supérieurs. Sa flexibilité dans n’importe quel domaine, sa persévérance et son ambition l’ont bien vite amené en haut des échelons de l’armée.

Mais à l’aube de son 24ème anniversaire, son père trouva la mort après avoir rendu les armes devant une grippe mortelle. Ce fut un hiver fort triste cette année là. Une année où le jeune militaire attira l’attention des services secrets qui l’embauchèrent quelques mois après le décès d’Edmund. Ce revirement permis à Seyonne de se changer les idées et de fournir le meilleur de son potentiel. Entraîné à l’espionnage, au combat, au pistage, et à bien d’autres modalités qu’un agent secret doit détenir, le jeune Allemand fit bien vite ses preuves après une mission d’infiltration en Ukraine puis une en Russie. C’est aux alentours de sa quatrième année de service dans l’agence secrète du gouvernement qu’arriva le, ou plutôt les drames. Un premier échec, qui plus est, trop cuisant pour l’oublier. Capturé par une organisation russe qu’il devait infiltrer, sa petite sœur et sa mère perdirent la vie pendant son interrogatoire musclé. Menaces et injures furent proférées ce jour-là. Quand Seyonne assista à leur exécution, impuissant, il sentit le monde s’effondrer. Mais sont calvaire ne s’acheva pas là, loin de là. L’organisation qu’il aurait du infiltrer sans embûches, appelée Sharp Organisation possédaient quelques laboratoires qui faisaient des tests de modification génétique sur des cobayes humains. L’agent allemand eut le malheur d’être utilisé pour un nouveau produit encore imparfait, à peine testé sur 3 autres cobayes. Après des jours à avoir vécu dans une cellule, battu et torturé, Seyonne subit des mutations génétiques au cœur des laboratoires. Des heures de calvaire où son organisme muta sous l’action d’un produit inapproprié. Pourtant, contrairement aux trois premiers cobayes, le jeune Weinsberg ne trouva pas la mort, ou ne fut pas sujet à des mutations physiquement difformes. Non. Ce fut une totale réussite…au grand malheur des membres de l’organisation, qui trépassèrent tous lorsque l’agent enragé et mentalement détruit parvint à se défaire de ses étreintes. Il avait acquis des sens surdéveloppés, une force et une rapidité plus élevées que la moyenne, une dextérité et une adresse équivoques à celles des félins. Ainsi, il parvint à fuir ses bourreaux. Grâce au satellite allemand, Seyonne fut ramené à la base via un hélicoptère militaire, mais démissionna quelques jours après son réveil à l’infirmerie. Personne ne sut ce qu’il s’était passé et personne ne le saurait jamais.

L’ancien agent quitta l’Europe pour un appartement à New York. Etre le plus loin de la Russie et de l’Allemagne, sa patrie, c’est tout ce qui lui importait. Sans cesse, les visages larmoyants de sa petite sœur adorée et de sa mère revenaient hanter ses nuits, mais aussi ses jours. Cette manipulation avait fait ressurgir un asthme qu’il pensait périmé depuis bien longtemps, oublié dans les tréfonds de l’enfance. Que non ! Il était un monstre. Ses pouvoirs, ses crimes, son homosexualité…tous ces péchés l’attiraient dans les abysses de la dépression. Il hurlait pour s’en échapper, espérant qu’une main surgirait du néant pour le ramener vers la lumière. Il se pensait perdu, abandonné, ligoté à un avenir cruel, mais un jour, alors qu’il sentait le souffle putride des enfers lui léchouiller le visage, cette main arriva de nulle part. Celle de Charles Xavier. Il semblait jeune, du même âge que lui, et pourtant en paix avec lui-même, ferme avec la vie alors qu’il se trouvait enchaîné à une chaise roulante. Un destin plus tragique que le sien, qui possédait encore la fonctionnalité de ses jambes. Pourtant, c’est cet homme qui le lui dit, ces mots qui le bouleversèrent : tu n’es pas seul. Ainsi fut-il amené par cet étrange individu, aux côtés de quelques prétendus X-mens, à un institut pour mutants. Oui, mutants, des gens comme lui, avec des pouvoirs surnaturels.

L’institut et ses habitants redonnèrent un souffle de vie à l’ancien agent secret. Les premiers mois vécus au sein de cet ensemble harmonieux permirent à Seyonne de retrouver un certain équilibre. Un équilibre, certes fragile, mais qui permit à l’Allemand de se stabiliser. Un peu moins d’un an après son arrivée, il se compta comme professeur dans l’institut. Son ambition avait repris un battement d’ailes. Qui sais, peut-être que quelque part, dans d’autres recoins du monde, des mutants étaient comme lui autrefois : perdus, désorientés. Il aspirait plus que tout à aider ces gens désemparés. Ainsi, 7 ans après son incursion au sein de l’institut, s’étant aisément fait une place parmi leurs habitants, Seyonne enseigne toujours aux plus jeunes et part à la recherche de jeunes mutants en proie au désarroi aux côtés des X-mens. Malgré tout, l’ombre du passé continue de le tourmenter à travers de nombreux cauchemars, mais il a finit par accepter cette pénalité. Le passé ne peut-être oublié. Peut-être ne le veut-il pas. Après tout, le tatouage qui mordille la chair de son poignet gauche l’en empêche : « IV.2.SO » Quatrième cobaye du 2ème projet de la Sharp Organisation…