Jean s'était finalement inscrite à la fac de médecine de New-York City. La rentrée se ferait en septembre, ce qui lui laissait le temps de s'organiser. Elle avait terminé son semestre de justesse et ayant d'excellente note, elle pouvait reprendre un cursus normal. Ses cauchemars s'étaient estompés pour des raisons qu'elle ne comprenait pas. L'autre ne venait plus la "hanter" chaque nuit avec une insistance terrifiante. Ce n'était pas bon signe cette sorte d’accalmie, comme si plus rien n'attendait Jean. Elle savait que cela pouvait être qu'un piège pour abaisser ses défenses. La rousse passa une main dans ses cheveux de feu, bien décidée à se changer les idées. Elle avait donné rendez-vous à son amie Elwyna pour une virée shopping. Ce n'était pas qu'elle aimait cela mais la mutante désirait réellement se vider la tête. Rien de plus. Elle espérait que cette paix précaire dans son esprit venait du fait qu'elle reprendrait les cours.

Une part d'elle se réjouissait, une autre en était terriblement inquiète. Et si elle perdait de nouveau le contrôle ? Et si le pire arrivait ? Elle ne pouvait pas prévoir à l'avance les réactions de ses pouvoirs, c'était comme lui demander de dire les numéros du loto, impossible en somme. Une dernière fois Jean observa son reflet dans un miroir sur pieds. Son visage semblait avoir changé, comme si elle avait vieilli, le fond de son regard était plus dur. La jeune femme chassa cette pensée de son esprit, inutile de se faire peur, de croire qu'elle avait été "envahie" par l'autre personnalité sans rien remarquer. Quittant sa chambre, elle ne vit pas qu'un objet qui lévitait auparavant dans son dos s'effondra avec l'absence de la mutante... Atteindre la ville n'avait rien de difficile, c'était marché en toute tranquillité dans le centre-ville qui posait problème. Il fallait éviter de se disperser et de penser à tout et n'importe qui. Rester maîtresse de ses sentiments pour éviter de perdre le contrôle de ses pouvoirs. C'était cela la clef pour contrôler ses pouvoirs, contrôler ses émotions mais ce n'était pas si facile que cela en avait l'air.

Jean avait donné rendez-vous à une petite fontaine non loin d'un supermarché plus ou moins populaire, là où les prix étaient parfaitement abordables. S'asseyant sur un banc isolé, la jeune femme lissait son pantalon en attendant son amie. Elle ne se souvenait pas vraiment ce qui les avait reliées, peut-être leurs âges quasi similaires et le fait qu'elles avaient des caractères faciles. Jean n'était pas une jeune femme offensive, elle était douce et gentille de nature. Le fait qu'elle contrôle sa télépathie l'empêchait d'être assaillie par les pensées des gens de cette place. A une époque elle n'aurait pas osé se rendre dans ce genre de lieu mais tout avait changé depuis plusieurs années. Redressant la tête, la télépathe et télékinésiste sourit en voyant son amie.

« Alors, prête à acheter des choses ? »

La rousse continua de sourire, le ton joyeux et plein d'entrain. Se redressant, elle observa l'immense supermarché avec une petite appréhension. Tout irait bien. Elle doutait qu'elle perde le contrôle dans ce genre de lieu. A part être bondé, il n'y avait rien de particulier comme danger. Jean se savait capable d'évoluer calmement parmi la foule d'humain sans être submergée par leurs pensées et ainsi perdre le contrôle. Pourtant elle avait mal à la tête et se sentait particulièrement nauséeuse. Elle ne savait pas comment l'expliquer et la jeune femme n'y attachait pas grande importance à dire vrai. Jean se dirigea vers le supermarché, regardant les gens comme si elle cherchait quelqu'un, elle ne cherchait personne voyons. Visiblement ses nerfs avaient pris un sacré coup.

« Je ne sais pas si je vais acheter des habits. Je crois que je vais rester aux livres. »

Étonnement, se déshabiller pour essayer ne la tentait pas. Décidément aujourd'hui elle n'était pas dans son assiette mais faisait mine de rien. Pas besoin d'inquiéter Elwyna sur son état, elle cachait bien des choses, oh oui Jean était cachotière mais pour le bien de tous.

• On n'entendait que le bruit des stylos qui grattaient sur les feuilles volantes. Le professeur de psychologie avait décidé de leurs faire recopier des pages de son livre car il avait juger que la classe était trop bruyante. Une sorte de punition en somme. Et Elwyna levait la tête toutes les cinqs minutes environ pour regarder ces petits camarades. Elle n'avait pas encore d'amis au sein de sa licence car elle s'était inscrite il y a peu de temps. Elle s'était jurée que même si elle avait changé de continent, elle retournerait à l'université pour poursuivre sa formation. Alors le temps que son dossier arrive par la voix des airs, on ne l'avait pas prise et elle avait du rester à l'Institut en se rongeant les ongles car même si son travail dans une petite librairie du centre ville occupaient ses weeks ends, elle se faisait du soucis pour ses études. Mais au final tout était bon et elle avait été prise, se jetant dans la fosse au lion. Or elle ne pensait pas que son groupe allait être aussi agité et que les professeurs seraient réduits à leurs donner des punitions comme à des enfants de cinq ans. Surtout qu'elle n'avait rien fait. Enfin justement elle ne faisait rien vu qu'elle regardait les oiseaux par la fenêtre en cette belle journée en attendant patiemment la fin du cours. Alors devoir recopier la théorie de Freud ne l'enchanter guère. La psychologie n'avait jamais été son fort et elle s'était d'ailleurs étonné du fait d'avoir un cours de 4h par semaine. Pleins de choses était différente de son ancienne université et elle avait encore un peu de mal à prendre ses repères. Mais son optimisme légendaire lui disait que tout irait bien dans le meilleur des mondes.
  
  C'est avec un grand sourire qu'elle claqua son livre toute contente d'elle. Elle venait enfin de finir son recopiage et elle allait pouvoir partir d'ici. Rassemblant ses affaires, elle se leva alors sous l’œil intrigué de certains de ses camarades. Elle descendit d'un pas léger les marches de l'amphithéâtre pour aller jusqu'au bureau de son professeur. Celui ci leva la tête en la voyant arriver et elle lui donna ses cinq copies doubles. Il les feuilleta rapidement et d'un signe de tête lui autorisa à prendre la sortie. Ce qu'elle fit sans demander son reste. L'air frais lui fit du bien. Il commençait à y avoir un air saturé en transpiration et elle avait horreur de ça. Esseyant maintenant de trouver la sortie du campus, elle du à plusieurs fois changer de chemin car elle se perdait totalement. Un jour son sens de l'orientation s'améliorerait, mais ce n'était sans doute pas pour tout de suite. Elle regarda sa montre. Elle avait encore un peu de temps avant son rendez vous mais il ne fallait quand même pas traîner dans ce foutu campus. Reprenant les choses en main, elle sortit alors un plan qui lui indiqua une sortie. Pourquoi elle n'avait pas fait ça au début. Elle n'en savait strictement rien. Maintenant le tout était de se retrouver dans la ville pour aller au centre commercial que Jean lui avait dit. Au bout d'une dizaine de minutes, Elwyna réussit sans doute avec un miracle à arriver à l'endroit prévu. Et immédiatement elle vu au été assise son amie. Comment l'a louper aussi. Une chevelure de feu qui tranchait avec les décors paisibles du centre.
  
  
  « Alors, prête à acheter des choses ? »
  Toujours.
  
  Elle faisait rarement les boutiques, mais quand elle les faisait c'était avec une bonne humeur qui ressortait du tréfonds de ses entrailles. Elle aimait acheter, surtout depuis qu'elle gagnait un salaire. Ayant été privée de ça pendant son enfance et une grande partie de son adolescence, elle se rattrapait en somme maintenant. Au fur et à mesure que les deux jeunes filles avançaient dans l'immensité de ce centre, Elwyna sentit son amie se tendre. Elle comprenait parfaitement pourquoi car elle aussi commençait à avoir un peu peur. Trop habitué à sa petite ville de Londres et au calme de l'Institut qui n'avait pas encore montré de quoi il était capable. Mais il fallait qu'elle s'apaise sinon elle ne pourrait pas soutenir Jean qui en avait plus besoin qu'elle.
  
  
  « Je ne sais pas si je vais acheter des habits. Je crois que je vais rester aux livres. »
  Mais si, tu verras tout ira bien. Je suis là . J'ai envie de te voir essayé de jolies robes aussi.
  
  Son ton de voix était doux et se voulait rassurant. Même si on la considérait comme une rêveuse infinie et une fille dans la lune, elle savait soutenir ses amis et être là quand ils avaient besoin d'elle. Lui prenant la main pour l’entraîner alors vers la première galerie marchande, elle lui offrit son plus beau sourire pour lui prouver que tout irait bien. Et puis, si elle voyait que Jean angoissait trop, un petit coup d'imaginaire et tout repartirait pour le mieux.
  
  
  Je dois voir pour un sac aussi. Le mien est troué. Il en a vécu des aventures. C'est d'ailleurs un de mes premiers sacs que j'ai acheté.
  
  Nostalgique, elle l'était toujours avec les objets qui étaient en sa possession. Elle en avait très peu mais les sacs faisaient partit de son univers. Et effectivement, celui qu'elle portait en ce moment même avait été recousue par ses soins et il était grand temps pour lui de passer l'arme à gauche. Mais la première boutique qui s'offrait aux jeunes filles n'était d'autre qu'une logette à nourriture et l'odeur des gaufres rentra dans les narines d' Elwyna, faisant ainsi sortit le monstre affamé qui se trouvait dans la jeune fille. Se retournant vers Jean, elle lui fit alors des gros yeux qui voulait lui hurlait j'ai faim. Elle vu qu'elle émit un petit rire. Qui ne connaissait pas l’appétit monstre de la jeune fille ? Personne. Chaque fois que la tornade brune passait dans la cuisine de l'institut elle y restait un bon moment en compagnie de son meilleur ami le réfrigérateur.
  
  
  Jeaaaaaan. Je parie que tu as faim et je parie aussi que tu as envie de manger une de ses délicieuses gaufres qui n'attendent que nous.

La bonne humeur d'Elwyna soulagea Jean qui souriait à ses côtés. Il y avait un monde qui partageait les deux amies. C'était comme cela et la télépathe n'y pouvait rien. Tout ira bien, on lui répétait tant cela qu'un jour, la mutante allait vraiment y croire. Mais pas aujourd'hui, elle se contentait de faire semblant car cela soulageaient ses amis, elle n'avait pas envie de les inquiéter à dire vrai. Acceptant le contact de la main d'Elwy, la télékinésiste sentit ses muscles se détendre progressivement. Essayer des robes alors que l'été toucherai à sa fin dans quelques semaines ? Pourquoi pas, si c'était juste pour le plaisir après tout. Jean posa son regard sur le sac à main de son amie quand celle-ci en parla et eut un petit sourire amusé.

« C'est vrai qu'un nouveau ne te ferait pas de mal. »

Elle aussi avait un sac à main mais qui tenait encore bon. Après tout Jean n'avait pas non plus énormément d'argent. Elle restait très économe. Concentrée comme elle l'était sur son amie, elle ne captait pas les pensées des passants, restant dans son cocon de douceur, en quelque sorte. A chaque pas pourtant elle ressentait une sensation étrange. Une sensation qu'elle n'était aucunement capable d'expliquer. Elles traversaient une galerie marchande et bientôt l'odeur sucrée et grasse des gaufres envahie les narines de Jean qui éclata de rire face aux paroles de la brune. Elwyna était une véritable gourmande et ce n'était un secret pour personne à dire vrai. C'était marrant car son amie ne faisait même pas semblant de ne pas être gourmande. La rousse se contentant de sourire, elle n'avait pas vraiment faim mais comme tout être vivant, l'odeur alléchante de sucre troublait ses sens. Elle accepta donc de se présenter devant l'étale du marchand de gaufre.

A l'âge de faire ce genre de stand ses parents ne l'y avaient pas menée. Pour la simple et bonne raison qu'à douze ans elle avait développé ses pouvoirs et que dès lors il n'y avait plus eu aucune activité entre elle et ses parents. Ce genre de souvenir elle n'en possédait pas. Celui de la petite fille qui mangeait une gaufre sous le regard tendre de ses parents. Cette pensée lui fit froncer les sourcils mais elle se reprit rapidement. Inutile de se faire de la peine ainsi, c'était ridicule, totalement ridicule.

« Je vais prendre une gaufre au chocolat s'il vous plait. »

Dit-elle poliment, laissant Elwy faire sa propre commande tandis qu'elle sortit l'argent pour payer sa quantité de sucre. Elle remercia en recevant la nourriture chaude et mordit dedans avec gourmandise. Le chocolat coula sur sa langue, lui apportant un frissonnement de plaisir qu'elle approuva. Elle lança un regard appuyé à son amie tandis qu'elle s'éloignait du stand pour s'assoir sur un banc et ainsi mieux déguster sa gourmandise.

« Ça été les cours ? »

Elle savait que son amie avait repris les cours, tandis qu'elle, elle les reprendrait dans une semaine, voire deux, elle devait vérifier les dates. Continuant de mordre dans sa gourmandise, la mutante leva vivement la tête. Sa télépathie commençait à lui échapper et les pensées des gens affluaient en elle.

Elle me regarde étrangement cette fille.

Le souffle court, Jean regarda plus attentivement autour d'elle, qui avait pensé cela, qui ? La paranoïa était entrain de fortement l'emporter sur le reste. Le banc sur lequel reposait les deux femmes se mit à vibrer étrangement, sa télékinésie entrait en jeu. Jean cherchait, qui avait pensé cela ? Son regard voguait d'une personne à une autre, les pensées ne lui apprenaient rien et l'angoisse serrait son cœur. Elle s'enfermait dans un mutisme terrifiant, preuve évitant que la mutante se détachait de la réalité. C'était dangereux, très dangereux et elle n'avait pas la capacité de prévenir Elwyna. C'était un mauvais jour comme disait souvent la mutante. Ce genre de journée où elle aurait dû rester loin de l'humanité, tout simplement.



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