*Ferme-là.*

-Je sais ce que je fais, marmonne aussi poliment que possible se fasse le blond, les mains tremblant de rage plus que de nervosité alors qu’il jouait depuis presqu’une demi-heure dans les fils électrique d’une grosse radio. Il détestait décidément de plus en plus son beau père de patron à la con.

-Là, là! C’est ce fil qui est défectueux. Qu’est-ce que tu fais? Tu vas tout casser!

-Arrête de t’inquiéter, je sais ce que je fais, répéta-t-il une fois de plus, grinçant quasiment des dents à chaque mot qu’il prononçait. Comme quoi sa patience avait des limites.

Une étincelle, un peu de fumée et lui hurla d’étonnement au contacte brulant. Il vit son beau père lever les bras au ciel dans un signe de désespérance et soupirer bruyamment. Il ne se préoccupait pas réellement de la brulure mineure que venait de subir son employé.

-Tu me fais chier! Je te devrais te foutre à la porte! La seule raison pourquoi t’es encore là c’est que je couche avec ta chienne de mère!

Il claqua ses mains contre le comptoir vitré, faisant tressaillir le blond qui fronçait des sourcils de désapprobation. Et il ne put retenir un étrange sourire qui lui barrait le visage lorsque son patron beau père menteur et stupide lui tournait le dos pour indiquer qu’il sortait passer commander un nouvel instrument. Qassim songea qu’il avait là toutes preuves nécessaires pour convaincre sa mère de lâcher ce minable. Et lui alors? Il perdrait son boulot. Il s’en fichait. Il retournerait promener les chiens. Il retournerait commis d’imprimerie, qu’importe. Même si, malgré son allure indifférence, il se trouvait tout sauf intéressant, se disant d’un pathétique incroyable.

-C’est ça, va fourrer ton nez puant dans le soutien-gorge d’une autre cliente cochonne mariée.

Dans un soupire ennuyé, il se pencha de nouveau sur la boite électronique encore fumante, songeant qu’il n’en avait que faire de la réparer ou non, maintenant qu’il était convaincu de ne plus avoir de boulot au lever du soleil prochain. Il laissa tomber le tournevis qui rebondit sur le comptoir, tintant désagréablement à son oreille. S’il aperçu que la vitre s’était quelque peu fissurée sous l’impact, il ne s’en était guère soucier et se dirigeait maintenant d’un pas sec vers la salle de ban du fond. Il laissa couler l’eau froide un moment avant de passer sa main en dessous, juste là où il s’était brulé l’épiderme sur cette maudite boite qu’il haïssait tant, maintenant. Il revint vers l’avant, un air mauvais sur les traits. Heureusement qu’il n’y avait personne, il aurait eu l’air malin à s’engueuler comme ça avec celui qui avait l’air être son patron à première vue! Un patron des plus incapable, trop imbécile pour faire le travail lui-même et qui préférait encore se fumer un joint à l’arrière de la shop!

Il attrapa le radio et s’apprêtait à le lancer littéralement par la porte. Il l’ouvrit d’ailleurs, jura de façon tout à fait agressive et lança littéralement le poste en travers du trottoir : comme quoi il en avait plus qu’assez, en bout de ligne, de toutes ces conneries. Il fit une drôle de grimace aux passants qui le fixaient étrangement et retourna à l’intérieur dans l’intention de foutre le camp. Bien que, se connaissant, il savait qu’il n’irait jamais jusqu’au bout de cette faible ambition.

Ashlyn était à plat, épuisée. Elle avait passé des jours et une bonne partie de ses nuits à bosser non stop. Il était donc temps qu’elle s’accorde une petite pause, qu’elle prenne un peu l’air et opta donc pour une petite virée hors de la ville. Après plusieurs heures de détente, elle retourna à la civilisation et s’arrêta pour une petite séance de shopping. De nouvelles heures s’écoulèrent et ce n’est qu’une fois son bonheur trouvé qu’elle retourna à la rue assez calme où elle avait garé sa voiture, rangea ses achats, pris place au volant et remit le contact. Sauf qu’au lieu de l’habituel vrombissement du moteur au démarrage, elle n’eu comme résultat cette fois-ci que de brefs hoquets et crachotements qui firent vite place au silence de la rue. Elle tourna la clé une seconde fois et insista, mais en vain, sa voiture refusant de démarrer. Un profond soupir de lassitude lui échappa. Ce n’était pas la première fois que la voiture tombait en panne, c’était même de plus en plus fréquent en ce moment. Il était sans doute temps pour elle de dire adieu au vieux modèle. Néanmoins, avant cela, il fallait déjà qu’elle rentre chez elle…

Les mains posées sur le volant, elle calma sa respiration et fit le vide dans son esprit, avant de le focaliser entièrement sur la voiture. Rien de tel qu’une petite « discussion » avec l’engin pour savoir où était le problème. Ayant obtenu sa réponse, elle rouvrit les yeux et un second soupir lui échappa. Apparemment il y avait un petit disfonctionnement mécanique, rien de très compliqué ou grave, mais en attendant elle ne pouvait pas redémarrer. Elle avait également perçu une petite fuite d’essence et un mauvais équilibrage des essieux avant mais ça, ça pouvait attendre. Elle hésitait à se servir de son don pour ordonner à la voiture de démarrer. Certes il y avait peu de chance pour qu’on la remarque et elle arriverait sans doute à destination, mais elle avait constaté un jour qu’elle ne pouvait pas faire fonctionner éternellement une machine défectueuse.

Préférant ne pas céder à la facilité cette fois-ci, elle sortit de la voiture pour trouver un endroit d’où appeler un garagiste. Elle longea la rue jusqu’à la première boutique qu’elle trouverait et qui s’avéra être un magasin de radio. Elle n’était désormais qu’à quelques pas quand elle vit justement un poste de radio faire un vol magistral depuis la porte avant de s’écraser de toute sa masse sur le trottoir. Il devait y avoir une sacrée ambiance dans le magasin, mais ça ne l’arrêta pas. Elle posa un regard compatissant sur la pauvre carcasse –paix à son âme- pour qui on ne pouvait sans doute plus grand-chose même avec son talent et entra.

L’endroit n’était pas très grand, et après un regard circulaire à la pièce, Ashlyn se rendit directement au comptoir où un homme blond à l’air passablement énervé ramassait un tournevis.

« Navré de vous interrompre mais ma voiture est en panne. Vous n’auriez pas un téléphone ? Histoire que j’appelle un dépanneur… »

Ca allait sans doute être affreusement long, déjà qu’elle était épuisée, mais tant pis. Au pire elle avait toujours sa technopathie sous le coude si elle souhaitait vraiment partir plus vite.

La cloche tinta perceptiblement. Il ne leva pas la tête, cerné qu’il était pas ses idées de rébellion qui, au fur et à mesure, semblaient s’atténuer doucement à son esprit. Il se convainquait lui-même, sans vraiment le réaliser, que ceci n’était que foutaise et que, de toute manière, il n’aurait jamais le courage d’intenter à foutre le camp, comme ça, de la boutique. Pour aller où? Retourner pleurer sous les jupons de sa mère? On le lui avait reproché trop souvent, jeune. Et maintenant, elle lui reprochait d’être moins câlin. Fallait se décider! Câlin, pas câlin?

Une silhouette passa dans l’angle de sa vue et il releva enfin la tête, effaçant brusquement toute trace de contrariété. Ce n’étaient pas aux clients d’écoper de sa frustration d’apparence adolescente. Gérer ses émotions. Chose qu’il ne semblait pas encore très bien maîtriser de toute évidence. Il décrocha un sourire taquin, un sourire, naturel chez lui, accueillant. Comme quoi il n’avait rien contre la personne en particulier et qu’il ne cherchait surtout pas le lui faire sentir. Après tout, ça ne la regardait pas, n’est-ce pas? Les autres n’avaient pas à connaître le moindre secret de la vie de tous et chacun. Exposer la réalité? Non merci. Il détestait lorsqu’on le lui faisait, pourquoi le faire à son tour? La brune se dirigea finalement vers lui, au moment précis où il daignait reprendre ce petit air parfaitement stupide de commis inébranlable. Un téléphone… Elle demandait un téléphone. Pour une voiture.

-Vous excusez pas! C’est à moi d’être navré, laissa-t-il tombé sur un ton plus enclin à n’importe qu’elle conversation. Parce qu’il était dans sa nature d’être amical. Parce qu’il n’était pas celui qui rejetait à tout bout de champ le moindre morceau de dialogue qu’on lui offrait et qu’il saisissait à chaque occasion. Bavard. Il aimait parler pour le simple plaisir de le faire.

Il se retourna, saisissant rapidement le téléphone qui pouvait s’étirer indéfiniment, ou presque. L’idée était aussi d’avoir foutu un fil qui n’en finit plus… et qui traine partout. Il avait plutôt tendance à s’y enfarger à tout moment de la journée, d’ailleurs. Il le déposa sans trop de délicatesse devant elle, tout sourire inaltérable. Il songea qu’il avait l’être idiot et l’effaça rapidement de son expression, bien que son air gamin demeure.

-Il ne fonctionne pas à tous les coups, faut parfois s’y prendre à quelques reprises avant d’obtenir la moindre tonalité. Se serait plus vite de la pousser vous-mêmes, la voiture, plutôt que d’attendre une éternité une dépanneuse qui se pointera le nez avec des morceaux en moins!

Il eut un petit rire peu discret avant de songer que ce n’était décidément pas le moment de délirer de cette façon. Encore moins avec une inconnue, n’est-ce pas? C’était plus fort que lui, il passait son temps à faire ça pour se traiter d’imbécile ensuite.

-Je plaisante, bien sûr…, lâcha-t-il finalement sur un haussement d’épaules, comme quoi il ne se foutait pas de sa tête. Ce n’était pas dans son intention, du moins, mais il arrivait régulièrement qu’on prenne mal tout ce qui pouvait sortir de sa bouche.

Le vendeur lui adressa un sourire amical. C’était un homme à l’allure ordinaire mais plutôt sympathique. Il lui passa ensuite le combiné, tout en la prévenant que l’appareil pouvait se montrer récalcitrant…Après sa voiture, la radio déglinguée sur le trottoir, voilà que c’était le téléphone. A croire qu’elle était tombée dans une zone à machines défectueuses, une sorte de triangle des Bermudes où les objets n’avaient l’air de fonctionner que selon leur bon vouloir. Sa journée qui n’avait pas trop mal commencer semblait bien parti pour se terminer en eau de boudin. Elle mit quand même le téléphone à son oreille, mais ne reçut aucune tonalité. Fichu machine ! Ashlyn reposa donc l’appareil et fit un léger sourire au vendeur quand il lui suggéra de pousser sa voiture. C’était très drôle et en même temps absurde de s’imaginer en train de trimer pour faire avancer le tas de ferraille alors qu’il lui suffisait simplement de convaincre la voiture de démarrer. Mais ça l’homme ne pouvait pas le savoir.

« Je vais quand même essayer de miser sur la dépanneuse »

Quoique… en se repassant la phrase du vendeur dans la tête, il était clair qu’il avait parlé de dépanneuse en morceau…Cela confirmé bien son idée du triangle des Bermudes de la panne. Elle se fustigea mentalement, à force elle allait finir par se porter la poisse. La fatigue lui donnait toujours des idées bizarres. Quand bien même elle serait dans un lieu de perdition et de malchance elle s’en sortirait ! Elle avait toujours su s’en sortir, s’était toujours battue de toutes ses forces pour assurer sa survie alors ce n’était pas une panne de voiture qui lui ferait peur. Son sourire se renforça quand le blond s’excusa de sa plaisanterie.

« Il n’y a pas de mal. »

Elle reprit le combiné et tenta sa chance à nouveau…toujours rien. Retenant un soupir et son envie de dire tout haut « Mais marche ! » au téléphone, elle se calma au contraire et concentra sa volonté sur l’appareil récalcitrant jusqu’à obtenir enfin une tonalité.

Après une discussion plus ou moins houleuse avec le garagiste, elle finit par raccrocher, se retourna vers l’homme blond et lui rendit son téléphone.

« Il semblerait que vous soyez devin, la dépanneuse n’est pas disponible avant plusieurs heures. »

Décidément aujourd’hui elle accumulait les malchances en plus la fatigue ne l’aidait absolument pas à faire un choix. Deux options s’offraient désormais à elle, soit elle attendait des heures que le garagiste se pointe soit elle repartait maintenant en forçant la voiture à démarrer. Tout en continuant de réfléchir, elle leva les yeux et posa son regard sur le vendeur. Combien y avait-il de chance pour qu’il ne se préoccupe plus d’elle une fois qu’elle serait sorti ? Il avait tout l’air d’une personne aimable et bien attentionnée et comme il n’y avait pas foule dans le magasin, il se pouvait qu’il lui propose son aide. Ca risquait peut être de paraitre bizarre si la voiture redémarrait d’un coup comme par magie ou presque. Elle opta finalement pour un compromis entre les deux solutions.

« Je pense que je vais aller regarder le moteur voir si ce n’est pas réglable seul. »

Avec un peu de chance - qui avait l’air d’avoir pris la fuite quand même- et ses connaissances en mécaniques elle réussirait à faire redémarrer cette fichue voiture.

Il haussa les épaules, sans rien ajouter de plus. Il n’avait pas de voiture et se déplaçait habituellement à pied ou en bus. Conduire lui semblait absurde dans la grande ville. C’était un luxe qu’il ne pouvait de toute manière, bon vouloir ou pas, pas se permettre en ces temps-ci. Il optait donc toujours pour des moyens moins cher. Et lorsqu’il constatait la catastrophe qu’était un véhicule non fonctionnel, comme c’était de toute évidence le cas de la jeune femme, il se félicitait mentalement de ne pas avoir à dépenser une fortune dans ces tas de ferrailles brisant à tout moment, sans prévenir le ou la propriétaire. Non, décidément, il était mieux dans sa situation et se contentait de sourire en gardant ces pensées aussi muettes que possible.

Il l’observa un moment jouer avec le téléphone, se disant qu’il fallait décidément le changer, mais qu’un certain ne l’avait pas encore pour d’obscures raisons, disait-il, que l’employé connaissait par cœur depuis quelque temps, déjà. Le décolleté de madame, par exemple, était occasionnellement une bonne raison pour le vieux d’oublier ses responsabilités d’adulte exemplaire et de retomber dans l’adolescence puérile. La jeune femme s’y repris à quelques reprises. Un nombre suffisant pour que son petit sourire presque juvénile ne s’efface, ou du moins ne s’estampe quelque peu de ses traits taquins. L’obstination qu’elle affichait, ce n’était certainement pas son cas. Il avait plutôt tendance, après deux tentatives, de lâcher un juron malpropre et de laisser tomber l’appel. Comme quoi son manque d’ambition ne se tenait jamais bien loin, faisant de l’ombre à sa personnalité pourtant égayée. Et brusquement, la voix féminine retentis dans la boutique, alors qu’il la suivait des yeux, comme quoi il n’avait absolument rien de mieux à faire, de toute évidence, que d’écouter une conversation houleuse qui avait lieu entre ce téléphone maudit et il ne savait qui exactement au bout la ligne défectueuse. Lorsqu’elle raccrocha le combiné frustrant, son sourire se transforma en une expression beaucoup plus victorieuse. Comme quoi il s’amusait, mine de rien, de la situation qui divertissait plus que voulu son quotidien ennuyeux.

-Bien sûr que je suis devin! Ça semble vous étonnez.

Il avait dit ça en plaisantant, ne prenant rien en considération, sur un ton parfaitement amusé, comme s’il n’y avait pas d’autre raison possible pour expliquer le fait qu’il ait mis le doigt pile sur le souci. Chose qui n’arrivait pourtant jamais, mais il fit comme si, question de se garder d’humour à sourire encore un peu, limitant ses pensées désagréables. Il opina un peu de la tête et hésita un court instant, instant où il se demanda ce qu’il était mieux de faire entre rester dans cet endroit minable ou sortir un peu, avec cette initiative qu’il n’avait pas forcément.

-He bien, j’ai quelques outils ici qui pourraient vous être utiles, si vous le voulez.

C’était pour lui une façon de dire qu’il lui rendrait bien service avec ça, à condition de l’accompagner pour constater qu’elle n’allait les lui voler, se serait bien le comble de son malheur.

Vue le peu de réaction du vendeur, il semblait facile de croire que tout ce qui pouvait se passer dans sa boutique ou ailleurs lui était de la plus grande indifférence. La monotonie d’un travail dans une telle boutique avait semble toute eu raison de la curiosité et de l’enthousiasme de cet homme. Ce n’était pas certain. Intuitive et fine psychologue, Ashlyn avait toujours été capable de vite cerner la nature des gens, ce qui se révélait souvent un atout supplémentaire pour elle. Bien évidemment il est impossible de connaitre toutes les facettes d’une personne avec une simple rencontre et trois phrases échangées, mais selon les circonstances c’était souvent suffisant pour se faire une petite idée générale. A première vue on pouvait croire que le vendeur était une personne sans grand allant bien que sympathique, mais ça c’était à peine effleurer le vernis des faux semblants de la société. Son sourire amusé, ce petit air plaisantin qu’il avait montré à plusieurs reprises laissait à penser qu’elle était face à une personne au caractère bien plus coloré que ce qu’il laissait voir en ce moment dans cette boutique. Il paraissait imperturbable quoi qu’il arrive, sans grande motivation et pourtant lors de sa conversation avec le garagiste elle avait remarqué qu’il n’avait rien fait pour cacher qu’il l’observait et que tout cela semblait l’amuser. Certes si ses journées étaient aussi passionnantes qu’elles en avaient l’air, sa venue ici et ses mésaventures devaient passer pour un incroyable rebondissement. Il était clair qu’il n’avait aucun intérêt pour ce qui l’entourait ici, tout comme il était indéniable que c’était une personne agréable et sans doute amusante. Le problème c’est que toutes ses réflexions qui se bousculaient dans son crâne semblaient fortement contredites par cette impression qu’elle avait eu. Celle qui lui faisait se demander si cet homme avait déjà ressenti la moindre motivation pour quoi que ce soit.

Alors qu’elle était la bonne intuition ? L’homme avait-il succombé à la monotonie et à l’ennui des jours qui passent et se répètent inlassablement dans un milieu où rien ne lui permettait de s’épanouir. Oui mais pas complètement, ce sourire qu’il affichait permettait de croire à la jeune femme que si on parvenait à éveiller la curiosité ou l’intérêt de cet homme, il vous apparaissait sous un tout nouveau jour. Ce manque de volonté s’expliquait peut être par le fait que ses yeux n’avaient encore jamais vu spectacle ou évènement dans sa vie digne d’être marqué d’une pierre blanche. C’était trop tôt pour le savoir, elle était en train de se perdre complètement dans des réflexions peu utiles pour le moment.

La voix de l’homme lui proposant de lui prêter des outils la sortie finalement de ses pensées et analyses. Elle s’était quelque peu laissé emporter dans les méandres de son esprit, petit signe de fatigue et de perte de concentration chez elle qui était la plupart du temps focalisé sur son travail. Ramenant toute son attention sur sa voiture en panne à quelques pas de là elle adressa un sourire aimable à son interlocuteur.

« Je pense que ça peut m’être très utile en effet .»

Finalement Ashlyn avait assez rompu son quotidien pour qu’il accepte de l’aider. Même s’il semblait toujours n’éprouver aucun grand enthousiasme à se trouver ici, ni avoir vraiment envie de l’aider. Elle fit quelques pas vers la porte d’entrée et attendit de voir si l’homme avait bel et bien l’intention de l’accompagner à sa voiture. Et même s’il changeait d’avis, elle se débrouillerait seule. Elle tricherait et ferait quand même démarrer cette fichu voiture. Elle sorti donc du magasin sans plus attendre.

Spoiler:

Il opina doucement de la tête, toujours le pieds immobiles derrière son comptoir. S'il se félicitait? Il se demandait surtout s'il avait bien fait, au final, de lui proposer ce coup de main inattendu de sa part. Il fixa un instant son regard sur l'horloge en maudissant silencieusement son les évènements précédents. Il avait toute la volonté possible de bouger, de partir, de faire un petit quelque chose de cette vie merdique. Mais l'ange sur son épaule droite le ramenait toujours en arrière en le convainquant que c'était absurde et qu'il ferait sans doute honte terrible à sa mère, femme tout à fait adorable, quoi qu'il en soit, malgré, parfois, son comportement d'adolescente dévergondée.

Elle lui tourna le dos pour s'avancer vers la porte. Il réagit aussitôt. Passa sa main sur la surface du comptoir vitrer jusqu'à ce que ses doigts ne rencontre les clés froides de la boutiques, mêlées aux siennes, plus personnelles. Elles tintèrent jusqu'à ce qu'il ne ferme le poing pour les faire taire. Puis elle se retourna vers lui et il paru de nouveau s'immobiliser, perdre cet élan d'action qu'il avant lorsqu'elle avait le dos tourné. On aurait dit qu'il jouait à Green Light, Red Light. Sauf que c'était la réalité et non un jeu. Lorsqu'elle sortie, il accéléra de nouveau ses mouvement, saisissant sa veste qu'il enfila, le petit coffre d'outils, et sortie en coup de vent comme s'il avait brusquement eu le diable aux fesses. Il mit les clé dans la porte, les échappa au sol, jura à voix-haute s'en faire attention. On aurait dit que sortir hors de l'air de la boutique le transformait en quelque chose d'un peu plus naturel, peut-être un peu plus vulgaire, aussi. Il tourna la tête pour se rendre compte qu'elle s'était déjà bien éloignée. Il reprit donc ses clés avant de les fourrer dans le fond de ses poches et prendre ses jambes à son coup pour la rattraper, comme s'il avait une batterie de rechange dans le derrière qui le poussait à avancer plus vite que son cerveau ramolli par l'ennui du quotidien.

Il la rattrapa finalement, bien que demeurant quelque peu dans son ombre, derrière elle, sans vraiment prendre la peine de marcher à sa gauche, songeant qu'elle ne tenait peut-être pas à se promener un court instant à sa compagnie maladroite. De toute façon, il n'était qu'un minable vendeur de postes de radios qui lui avait offert de jeter un coup d'œil à sa bagnole, sans même songer qu'il n'en avait pas lui-même et qu'il n'avait même jamais posé les mains sur un volant de toute sa vie. Sa mère connaissait les engins plus que lui. C'était d'ailleurs un peu honteux, à son avis. Pour tout dire, il n'y avait pas songé une seule seconde en se proposant. Il lui avait plutôt proposer ses outils pour qu'elle se débrouille avec et lui l'avait accompagné pour s'assurer qu'elle les lui redonnait, en bout de ligne. Pitoyable. Sourire de retour, il s'arrêta à sa suite à côté de la portière.

-Voyons ça! Je m'y connais pas plus qu'une patate maladroite, mais... Je m'appelle Qassim, au fait! lâcha-t-il sur un ton étrange, comme s'il ne pouvait rien dire ou faire d'autre que prononcé son prénom que personne n'écrivait jamais comme il se devait. Il ne pensait pas que ça l'intéressait, mais maladroit jusqu'au bout, il n'avait pu s'en empêcher. Tu n'as qu'à... tenter de démarrer, je ne sais pas... Et il avait naturellement laissé tomber toute trace de vouvoiement digne de ce nom. Il redevenait un type normal de tous les jours.

Une fois dehors elle prit sans vraiment attendre le chemin qui la ramènerait jusqu’à la ruelle peu fréquentée où elle avait laissé son véhicule. Ce n’est que lorsqu’elle entendit les jurons qu’elle se retourna une nouvelle fois pour voir le vendeur ramasser ses clés. Il avait donc suivi le mouvement. Ashlyn avait vraiment eu une hésitation sur ce point, quelque chose que le personnage dégageait peut être. De toute façon la question ne se posait plus, il était sorti et Ashlyn allait pouvoir farfouiller le moteur pour faire redémarrer sa voiture. Elle continua donc d’avancer, mais plus doucement pour ne pas qu’il la perde de vue. L’homme finit par la rattraper mais au lieu de marcher de front avec elle il demeura quelques pas en retrait. Timidité ? Gêne ? En tout cas s’était un peu étrange, comme le reste de sa personne ceci dit et au fond tout cela avait un côté…touchant. La technopathe n’était pas la personne la plus ouverte au monde, mais face à ce vendeur elle semblait plus naturelle, se laissait plus aller était moins exigeante même si ce n'était pas forcément visible. A moins que ce ne soit dû qu’à sa fatigue ?

Ils arrivèrent finalement à la voiture et alors qu’elle s’apprêtait à ouvrir la porte et ensuite le capot, le vendeur sortit de son mutisme. Elle ne put empêcher un sourire et un bruit léger, signe de son amusement face à la comparaison. Voilà que maintenant ce garçon se prenait pour une pomme de terre ! Il ne devait pas avoir une grande connaissance en mécanique apparemment, heureusement que c’était un peu son domaine à elle. Mais elle avait besoin d’outils et c’est là que le vendeur et sa boîte intervenaient. Certes, elle pouvait tricher en réalité, mais elle ne voulait pas céder à la facilité aussi vite, c’était prendre de mauvaises habitudes et donc le meilleur moyen de se faire remarquer.

« Et bien merci beaucoup Qassim. Moi c’est Ashlyn. Et je vous remercie de bien vouloir m’aider. »

Voilà les présentations faite elle pouvait en revenir à son problème. Elle ne voulait pas y rester toute la nuit et voulait quand même pouvoir rentrer chez elle, si possible avec sa voiture justement. Elle contourna Qassim et le véhicule pour ouvrir le capot. Ce dernier lui proposait d’essayer de démarrer, la faisant se tourner à nouveau vers lui. Sans blague ?! Elle ne serait pas venue l’emmerder s’il avait suffit d’insister sur le démarreur. La proposition venait d’un bon sentiment et le pauvre homme avait vraiment l’air de ne pas savoir trop quoi faire, bien qu’il veuille se rendre utile. Elle se retint donc pour ne pas s’énerver. Après tout il ne pouvait pas savoir que la mécanique était une de ses spécialités, c’était même assez peu courant en fait. Elle lui lança donc un sourire amical.

« En fait j’ai déjà essayé de démarrer plusieurs fois avant de venir vous voir. Je pense qu’il y a des chances pour que sa vienne du moteur et voulais donc regarder ça de plus prés. »

Ce faisant elle avait continué d’avancer et ouvrit finalement le capot de la voiture. Comme le vendeur n’avait pas l’air d’être un expert, il ne ferait sans doute pas de remarque sur le « comment » elle connaissait l’origine du problème. Elle ne pensait pas qu’il viendrait voir de plus prés ou même l’aidait et l’oublia donc un peu, tout en cherchant d’où venait le problème. Ne trouvant rien à première vu, elle voulait se servir de son pouvoir pour « parler » avec la voiture, mais hésitait à le faire devant Qassim. Elle trouva finalement un compromis à son dilemme et cela permettrait en plus que le garçon ne se sente pas inutile non plus.

« Je m’excuse de t’embêter plus mais je vais avoir besoin que tu t’installes au volant pour essayer de démarrer quand je te le dirait. »

Elle avait finalement elle aussi décidé d’abandonner le vouvoiement, pour mettre Qassim plus à l’aise. Au moins installé au volant, il y avait moins de chance qu’il remarque sa petite absence le temps de la « communication ». Elle était sans doute un peu directe et pas très tendre avec lui mais elle avait l’habitude de diriger maintenant et son côté boulot reprenait le dessus en cet instant. Penché au dessus du moteur, la technopathe utilisa une nouvelle fois son pouvoir et se concentra sur ce qu’elle pouvait apprendre, oubliant à nouveau Qassim et le reste de la rue.

Spoiler:

Se contenter d'un sourire lui paraissait trop limite de l'insupportable. Mais ce fut tout ce dont il fut capable. D'un sourire étiré, un peu naïf peut-être quant à elle, quant à tout. La gène avait brusquement prise possession du moindre de ses mouvements en sentant l'impression familière qui détonnait dans la voix féminine, d'une presse qu'il n'expliquait pas mais qui semblait bien la ravir. Il conclu rapidement que ça ne l'enchantait guère plus qu'il ne le fallait et il ne su dire si ce sentiment provenait de lui ou de la situation elle-même. Quoi qu'il en soit, il se traita mentalement d'imbécile et continua de sourire faisant mine de rien, de ne rien saisir du non verbal qu'elle exploitait peut-être à son propre insu. Il était dans la nature de l'écossais de se laisser guider et de toute évidence, il était dans celle d'Ashlyn de marcher en tête. Ça ne le surprenait pas vraiment. Qui aurait osé marcher derrière lui? Il ne sentait pas forcément qu'elle tenait plus que ça à faire connaissance, même si l'occasion était pour lui plutôt présente. Soit. Il se contenterait de ne servir à rien, pour faire plaisir, peut-être. Sage comme une image, il se convainquit de ne rien dire, bien que sa curiosité enfantine le poussa un peu sur le bout des pieds, gamin curieux, à poser le regard sur ce qu'elle fabriquait. Mais il retint tant bien que mal cette rougeur de malaise en la voyant se tourner vers lui comme une accusation pitoyable. Décidément, il n'était pas fait pour ce genre de chose!

-Aaah vraiment désolé!

Facepalm mentale. Il ne réalisait décidément rien. Il s'était finalement quelque peu détourner, assez rapidement, question de ne pas trop se faire remarquer d'elle désormais, et se donna un petit air de s'occuper momentanément en se demandant encore ce qu'il fabriquait là. Peut-être était-il présent uniquement pour éviter de voir revenir le vieux qui aurait tôt fait de voir la catastrophe qu'il avait provoquer plus tôt en faisant la destruction public de ce stupide poste de radio. Chose qu'il regrettait pourtant, à présent. Il avait cette impression d'enfant de réduire à néant la vie de la personne qu'il aimait le plus au monde. Et pourtant, il était incapable de la quitter. Comme si partir seul au fin fond du monde le tétanisait sur place. Et elle ne l'avait jamais pousser à déployer ses ailes comme toute bonne mère qui se respecte. Elle s'était plutôt contenter de continuer à lui faire bouillir du chocolat chaud dans la casserole et à lui préparer un petit sandwich de temps à autre.

La voix résonna de nouveau, le forçant un peu à se retourner vers elle pour ne pas perdre le fil de ce qu'elle lui racontait, chose qu'il avait tendance à faire une fois décidé qu'elle ne s'intéressait guère à lui mais à ce qu'il lui donnait ou offrait. Triste perspective de sa vie de tous les jours. Mais son sourire franc ne l'avait pas lâcher malgré les dérivations de ses pensées.

-Y'a que les moustiques qui me dérangent, commença-t-il en se allant prendre place, sagement, derrière le volant, bien que ce n'était pas l'endroit qui lui plaisait le plus, laissant la portière ouverte, du coup. Ou alors la puanteur des égouts. Ou encore l'odeur des couches pleines.


Il se tut avant qu'elle ne s'énerve sur ce délire débile dont il faisait toujours preuve. Il se rabaissait sans doute lui-même sans en avoir conscience. C'était dans sa nature, certes, mais pas tous appréciait cet étrange humour dont il faisait part au moindre étranger. Et il ne réalisait pas que son radotage n'était sans doute pas entendu. Elle paraissait de toute évidence plus concentré qu'il ne le serait jamais lui-même. Il passa, entre temps, un doigt sur le dash pour se dire qu'il serait d'une propreté exagérée si jamais il se retrouvait avec une voiture à lui entre les mains. Il s'imaginait bien suspendre des dizaine de sapins odorant un peu partout.

-Ashlyn, je ne sais pas du tout comment... Ashlyn?

Il n'osait guère parler plus fort et sa voix se fit mis particulièrement basse en se rendant compte qu'elle ne réagissait ni ne l'entendait et il finit par ravaler sa honte de ne pas trop savoir que faire là, derrière le volant.

Que dire sur le comportement de Ash en train de farfouiller dans sa voiture si ce qu’il devait être assez blessant pour Qassim. Ce n’était pas qu’elle l’ignorait sciemment non, elle était juste plus attirée par la machine devant elle que par le pauvre garçon qui avait gentiment accepter de l’aider. Comme quoi il y a bien des inconvénients à être technopathe, on en oubli les êtres humains et aussi performante que soient les machines, il y a des choses que seul un être humain pourra apporter à un autre. S’il n’y avait pas eu ce tas de ferraille – un amour à ses yeux- elle aurait sans doute fait un peu plus connaissance avec Qassim, qui n’avait rien de désagréable et dont le côté touchant qu’elle avait noté sur le chemin, donnait envie d’en savoir plus et de le pousser à sortir de son flegmatisme qui semblait à tout épreuve. Elle avait à la place continué à chercher sous le capot sans se préoccuper plus de lui, que le risque qu’il se rende compte qu’elle était « différente ». Elle avait retrouvé un tant soit peu de politesse en lui demandant de s’installer côté conducteur, avait sourit de sa blague sur les moustiques, pour bien vite se reconnecter « technopatiquement » à la voiture tandis que la fin de phrase du vendeur se perdait dans le vent. Peut-être s’il avait été plus entreprenant et avait eu plus de présence qu’un fantôme, Ashlyn n’aurait pas cédé à l’appel de la voiture aussi facilement, occultant du même coup sa présence. Il lui aurait sans doute fallut insister pour attirer l’attention de la jeune femme, mais apparemment ce n’était pas dans son caractère.

C’est donc après une longue concertation avec son véhicule, durant laquelle Qassim était resté tout aussi discret qu’elle avait finalement localisé l’endroit et la pièce exacte qui rendait la machine déficiente. Elle releva finalement la tête pour se tourner vers lui. L’esprit maintenant plus détaché de l’emprise qu’avait eu le moteur du véhicule, elle se rendait bien compte que sa façon d’agir avait du être particulièrement désagréable pour l’aimable personne venu l’aidé. C’était même selon elle un miracle qu’il ne l’ait pas abandonné sur place en la laissant se démerder. Ashlyn n’aimait pas avoir ou être en tord vis-à-vis des autres, elle allait donc devoir rectifier le tir un minimum. Elle s’approcha de la portière et pencha un peu la tête vers lui.

« Désolé de t’avoir un peu ignoré, je tenais vraiment à trouver d’où venait le problème. »

Ce n’était pas totalement faux et en même temps pas totalement vrai. Elle ne pouvait pas lui expliquer que c’était dû à sa capacité de communiquer et de contrôler les machines. Il la prendrait à coup sûr pour une folle, personne ou presque ne croyait à l’existence des mutants. Et même auprès des autres mutants il lui été difficile d’exprimer le niveau de connexion qui s’établissait entre elle et les machines au point qu’il lui arrivait parfois encore de s’y perdre comme à l’instant.

« Mais maintenant que c’est fait je vais pouvoir essayer de faire quelque chose. »

Elle était hésitante, elle ne savait pas quoi dire pour le mettre plus à l’aise ou pour qu’il se sente plus utile. C’était un comble, elle pouvait pourtant compter sur les doigts d’une main, les personnes capables de la démunir et de lui enlever toute répartie et ils n’étaient en rien semblable à Qassim. Elle arrivait habituellement à toujours trouver les mots, savaient toujours quoi faire. En bref une battante, une personne forte, qui aujourd’hui semblait s’être envolé.

« Toujours partant pour m’aider ? Je vais me servir de tes outils pour réparer et il faudra que tu essayes de démarrer quand je te le demande…sauf si tu penses pouvoir m'aider autrement ? »

En réalité la panne était trop importante pour qu’elle puisse s’en charger manuellement avec une simple boite à outil. Il lui faudrait donc se servir de sa technopathie si elle voulait repartir sans le concours d’une dépanneuse. Elle était allée embêter le vendeur pour rien au final, mais ferait comme si ce n’était qu’un petit rien à régler. C’était une chance qu’il ne s’y connaisse pas beaucoup finalement, il remarquerait moins les choses qui clochaient dans sa façon de faire…

Il avait finit par abandonner l'idée de discuter un peu, faire comme si de rien n'était, même si c'était plutôt son plan dès le départ, dès qu'il s'était assis là. Il avait baissé les yeux sur un peu tout ce qui l'entourait, posant un drôle de regard ici et là, en songeant qu'il en apprendrait peut-être plus sur elle qu'en tentant de vainement lui poser des questions auxquelles elle ne répondait pas de toute façon. Rien de particulier si ce n'était l'idée tordu qu'il se faisait d'une voiture de femme. Bien que c'était loin d'être le cas, il avait toujours imaginé la chose avec beaucoup de recule et d'imagination. Peut-être plus rose, plus bordélique, plus... féminine. Mais Ashlyn ne lui paraissait pas être le genre de fille particulièrement fille blonde comme il avait tendance à se l'imaginer la plupart du temps. Ça ne lui était pas désagréable de constater que ce n'était pas son cas et, en fin de compte, ça lui paraissait un peu comme un soulagement qu'elle sache se servir de sa tête à son propre défaut. Lorsqu'il entendit de nouveau la voix à l'extérieur, il ne pu retenir un sursaut et se redressant, faisant mine qu'il n'avait pas chercher à fouiller partout, poussé par une curiosité impossible à laquelle il tentait vainement de mettre des chaines. Et puis, elle lui était inconnu. Ce n'était pas non plus comme s'il n'avait pas eu raison de regarder tout ce qu'il y avait avoir, même s'il n'y avait rien de fascinant dans la cabine. Il s'en était mentalement presqu'indigner du peu d'intérêt qu'il y avait à voir, d'ailleurs. Il eut donc un haussement d'épaules un peu las, reprenant son petit air de vendeur ennuyé d'auparavant, faisant mine de ne pas le lui démontrer, lui décrochant un nouveau sourire, aussi faux que sa propre personnalité ennuyante.

Il l'écoutait parler... sans comprendre ce qu'elle cherchait à lui dire, ayant même plutôt l'impression qu'elle ne lui disait rien du tout à travers ces quelques mots plutôt vide de sens à ses yeux. À croire qu'elle ne parlait que pour le sortir de ce silence mal à l'aise qui durait depuis plus d'une minute maintenant, chose pas particulièrement bien vue lors... d'un souper par exemple! Il n'avait pourtant pas l'impression d'avoir un effet quelconque sur elle. Peut-être aurait-il mieux fait de demeurer dans la petite boutique en attendant les futures représailles qui lui tomberaient de toute façon sur la tête d'ici quelques heures sans doute. Et il se remettait de nouveau en doute, comme s'il ne parvenait pas à se laisser aller plus librement. Dès qu'il oubliait un peu son quotidien et sortait des chemins battus, il y avait le petit ange sur son épaules droite qui sortait le fouet et le menaçait vivement pour le voir revenir sur la bonne voie, bien que ce n'était pas toujours choses gagnées d'avance avec le diablotin mental qui lui hurlait des injures.

Ses doigts glissèrent le long du volant. Il s'apprêtait à lui annoncer sa décision qu'il laissait tout tomber, qu'il était tard et qu'il ferait sans doute mieux de retourner à la boutique avant que quelqu'un ne s'aperçoive de sa rébellion contre son employeur-beau-père-emmerdeur. Mais il avait fallu qu'elle lui décroche ce petit sourire auquel il se laissait facilement prendre, hameçon pour les cœurs en tout genre. Ses épaules s'affaissèrent un minimum à ce moment précis et il eut l'impression d'être balancer entre deux décisions pourtant si peu importante. Il en ferait bien un drame mental, un de ces quatre.

-Hé bien, commença-t-il sur un ton hésitant, comme s'il ne savait plus trop sur quel pied danser. Et il observa de nouveau son visage de quelques années à peine plus jeune de lui, la différence d'âge ne se voyant même pas. Et pourtant, il sentait qu'elle était plus mature qu'il ne l'était lui-même. Sauf si tu crois que mon manque de culture mécanique peut te servir, ce qui m'étonnerais beaucoup, oui, oui, encore oui, en fidèle esclave que je peux être pour toi en cet instant.

Avait parlé sur un ton mi-sérieux mi-familier. comme il l'aurait fait avec une vieille amie qu'il connaissait bien. Bien que ce n'était absolument pas le cas, fallait-il en convenir. Il haussa de nouveau les épaules.

- Mais n'en prend pas trop l'habitude. Plaisanterie amusée. Il se délectait de son propre humour en n'espérant pas qu'elle s'y plaise autant que sa personne.

Il avait eu un sursaut en entendant sa voix puis il avait eu cet air d’enfant pris en faute qui était apparu sur ses traits de manière fugace. Ashlyn eu un sourire, il avait beau tout faire pour la cacher, sa curiosité ne lui avait pas échappé, que ce soit dans la boutique où à l’instant. Elle s’attendait à ce que poussé pas cette dernière il lui pose une série de questions qui devaient lui brûler la langue mais rien, si ce n’est ce sourire bateau et son air las. Elle en était perdu, et à nouveau la technopathe ne savait plus sur quel pied danser, ni quoi dire en dehors de banalités bien loin d’intéresser le vendeur de tout évidence.

Le malaise entre eux s’était alors réinstallé et elle ne savait toujours pas quoi faire pour en sortir. Elle allait de toute façon repartir une fois le véhicule remit en marche et les chances qu’ils se recroisent après étaient proche de zéro, il ne lui serait donc normalement pas venu à l’idée de faire plus ample connaissance ou de s’inquiéter de ce malaise. Ils étaient tout deux d’univers opposé, évoluant dans des sphères différentes et semblaient bien loin d’avoir des points communs. Elle avait vécu une partie de sa vie à 100 à l’heure, aujourd’hui plus calme, elle n’en aimait pas moins la nouveauté. Lui semblait s’accrocher à sa routine et à la monotonie de ses journées, effrayé peut-être à l’idée de sortir des sentiers battus. Alors pourquoi voulait-elle faire disparaitre ce malaise, vu l’improbabilité qu’ils se recroisent. Peut-être parce qu’au fond elle aussi était curieuse, peut-être parce qu’elle avait envie de lui donner un grand coup de pied dans le derrière pour qu’enfin il ait plus de réaction que des haussements d’épaules ou des sourires et qu’il soit plus actif. Peut-être aussi parce qu’elle était curieuse de savoir si il y avait quelque chose derrière ce flegmatisme ou tout simplement parce que ce n’était pas donné à tout le monde de la mettre ainsi mal à l’aise et qu’elle n’aimait pas ça.

Elle était quand même bien loin de se laisser démonter par cette atmosphère un peu pesante et adressa à Qassim un de ses sourires fin et particulier qui lui servait à attirer et embobiner les gros poissons. Non pas qu’elle veuille en quoi que ce soit embobiner le vendeur, mais c’était un moyen simple pour que elle sorte de son propre malaise et de savoir s’il était toujours partant pour lui apporter son aide. Le coup du sourire marcha on ne peut mieux d’ailleurs, puisqu’il sortit de son hésitation et accepta de l’aider encore. Elle ne put d’ailleurs retenir un éclat de rire franc à la réponse qu’il lui apporta.

« Je m’attendais plus à une main secourable mais un esclave ça ne se refuse pas. Et sache que la culture mécanique ne fait pas tout. »

Au moins ils étaient désormais tous les deux un peu plus détendu. Même si en fait elle n’avait fait que rebondir sur les propos de Qassim. Elle s’éloigna un peu du véhicule, pour récupérer deux trois outils dans la boîte qui était resté plus loin sur le trottoir avant de revenir à hauteur de portière.

« Trop tard pour toi, te voilà officiellement esclave et j’ai désormais le pouvoir de te harceler jour et nuit ! »

Elle avait dit ça sur un ton très amusé, mais le pire c’est qu’elle pouvait vraiment ce montrer tyrannique pour certaine chose. Heureusement pour lui, sa tête de personnage tout gentil, le rendait attachant et même touchant. Puisqu’il semblait aimer la plaisanterie, autant continuer dans cette voie-là. Elle retourna s’occuper du moteur, en prenant garde à ne pas trop se laisser emporter cette fois. Elle fit semblant de réparer son moteur pendant plusieurs minute, échangeant des plaisanteries avec Qassim par moment. Elle s’était finalement redressé tout en restant connecter à la pièce défaillante pour lui ordonner de marcher quand « son esclave » mettrait le contact.

« C’est bon normalement, tu peux essayer de démarrer. »

Elle était restée devant le capot pour donner le change, mais le vendeur ne semblait pas réussir à mettre le contact. Ashlyn reparti donc ranger les outils dans leur boîte, toujours sur le trottoir, avant d’aller l’aider à démarrer. Elle refermait la boite quand elle entendit le bruit caractéristique des moteurs essayant de démarrer. Il était finalement parvenu à mettre le contact seul, aussi Ashlyn ordonna au véhicule de se mettre en marche grâce à sa technopathie. Le don d’Ashlyn lui permettait de se faire obéir des machines, même les non-fonctionnels, mais il fallait se méfier avec ces dernières car parfois cela avait des effets inattendus tel qu’une étincelle au mauvais endroit au mauvais moment, faisant alors sauter la voiture dans son dos, les flammes s’emparant du véhicule alors que le pauvre Qassim était toujours au volant.

Spoiler:

Elle avait sans doute capté le dilemme qui persécutait son esprit, alors qu'il se laissait martyrisé par l'indécision flagrante, par une hésitation sans raison valable. Mais c'était dans sa nature, n'est-ce pas, de ne pas savoir prendre sa place lorsqu'on le lui demandait? Il était le parfait citoyen modèle, sage, qui ne dérogeait pas des règles, et qui, lorsqu'il se faisait, se punissait presque lui-même. Il était le symbole de celui que la société accepte sans le voir. Celui que les gens ne remarque pas. Celui qu'on ignore et qui passe ni vue ni connu. Bref, il était trop commun et ordinaire pour attirer l'attention sur lui. Mais était-ce un défaut? C'était un homme sans grandes ambitions qui n'avait connu que les bras de sa mère et qui se contentait de suivre le mouvement de la foule en silence, sans tenter de marcher à contre courant.

À son plus grand plaisir, elle daigna soutenir son petit air imbécile d'humoriste sans avenir. Elle joua à ce jeu que sa mère se plaisait à faire. Il ne comparait pas Ashlyn à sa mère, bien sûr que non, là n'était pas la question. Mais la femme maternelle était sans doute la seule avec qui il avait réellement des conversation et la jeune mécanicienne lui semblait être la seconde avec qui il s'attardait aussi longuement sans la faire fuir d'ennuis. Il ignorait s'il avait réellement touché une corde sensible chez elle, mais il ne pouvait s'empêcher de penser au plaisir qu'une nouvelle présence faisait dans sa petite existence tranquille. Et il ne se doutait pas à quel point la jeune femme changerait ce quotidien ennuyant qu'était le sien.

Un brusque éclat de rire sortit finalement de lui, aussi involontaire que spontané, un peu étrange à quel point il était aigue pour un type de son genre. Un rire sur les ton de i qu'il stoppa rapidement avec un rougissement léger aux joues, comme s'il se trouvait ridicule d'un seul coup. L'idée l'avait amusé plus qu'il ne l'aurait démontré habituellement et, comme gêné d'avoir laisser ressortir ce petit côté de sa personnalité, il s'était rapidement repris pour dardé ses yeux gris sur elle. Elle qui s'éloignait un peu pour finalement revenir dans sa direction. Il n'avait pas vraiment osé pensé à quel point tout chez elle lui plaisait, songeant qu'il ne savait rien d'elle et qu'il n'y avait pas de raison. Mais c'était dans la nature de l'homme que de constater les faits et il ne faisait pas défaut à cela à son sexe: les courbes féminines l'intriguait autant qu'il les admirait, à distance, en silence, en secret.

Finalement, le malaise passa et il se permis de s'ouvrir un peu plus envers elle. On aurait dit qu'il bavardait tranquillement comme il l'aurait fait avec une bonne connaissance qu'il n'avait pas vu depuis un moment déjà. Quelques minutes s'écoulèrent sur ce ton devenu quasiment naturel entre les deux et le moment de vérité sonna. Il se mordit le creux de la joue en songeant qu'il ne parviendrait jamais à faire démarrer ce maudit véhicule. Déjà, s'il pouvait savoir où cette saleté de clé se fourrait, ça irait mieux.

-Ho, c'est facile. C'est un peu comme mettre sa q... main dans la boite aux lettres.

Il avait faillit laissé échapper le fond de sa pensée. Vrai. Qassim était un espèce de type bien plus vulgaire qu'il ne le laissait paraitre en cet instant. Et c'était bien tant mieux, d'ailleurs, qu'il le taise. Ce n'était certainement pas le moment de se montrer sous cet angle parfois désagréable à certains yeux. La clé glissa finalement d'elle même dans le contact et il joua un peu avec. Il sentit la vibration sous sa main restée sur le volant et lâcha un de ces cris victorieux qu'il ne pouvait retenir.

-Pouahahahah je sais tout faire, que j'ai dis.

Non, en fait il ne l'avait jamais dit, mais qu'importait? Il écouta le mécanisme se mettre péniblement en marche, avec toutes les difficultés du monde pour tourner sur lui-même. Il ne nota pas l'étrangeté du son, d'ailleurs. Il ne nota pas non plus que la clé venait de tournée dans le vide entre ses mains. Il releva les yeux en étouffant un juron bien placé. Il n'avait vu que l'éclair soudain, devant lui. Son ouïs, soudainement mise à rude épreuve, n'entendit plus que le son terrible de l'explosion. Il avait par réflexe porté un bras devant lui avant de sentir quelques flammes brulantes l'acculer dans le véhicule. Et il oublia Ashlyn sans remarqué non plus les passants fustigés par l'évènement inattendu. Il se contentait de subir sans rien dire sa brulure. Brulure qui s'étendit en un clin d'œil jusqu'à son épaule, son cou, et tout le reste, finalement, n'épargnant que son visage minimalement protégé. Il ne sentit pas, entre différentes sensations douloureuses, le métal massacrer son abdomen. Il eut finalement le réflexe de se dégager du véhicule en fusion, la portière étant restée ouverte, il parvint à se jeter littéralement en bas, contre le trottoir brulant, n'entendant plus rien en cet instant que son propre cri, sans voir l'ampleur des dégâts sur la voiture ni sur sa personne. Bref, perdre la notion des choses n'était pas agréable, il en conviendrait.

L’explosion l’avait fait sursauter puis se retourner à une vitesse folle pour voir que sa voiture n’était plus désormais qu’une boule de feu. Bon sang mais qu’est ce qu’elle avait encore fait ! Elle y était forcément pour quelque chose, les voitures n’explosent pas toute seule et il n’y avait que sa technopathie qui avait pu provoquer ça. Elle ne pouvait pour le moment détacher son regard du véhicule en proie aux flammes, les hurlements de Qassim la clouant sur place. Qassim ! Il était dans la voiture quand elle avait provoqué cet incident. Une vive douleur sur son avant bras droit la ramena en quelque sorte à la réalité. Un éclat de métal brulant du véhicule venait de lui retomber dessus, la brulant au passage. Qassim ! Elle se précipita sur lui tandis qu’il parvenait elle ne savait comment à s’extraire de la voiture. Ca avait été son premier réflexe… se précipiter vers lui. Décidément aujourd’hui le monde tournait vraiment à l’envers ou peut-être n’était-ce qu’Ashlyn. Pourquoi avait-elle foncé vers lui au lieu de fuir le plus loin et le plus vite possible du tas d’ennui qu’elle venait de se créer. La voiture elle l’avait volé il y a des années, personne n’aurait pu faire de lien avec elle. Elle aurait du fuir pour assurer sa survie plutôt que de se risquer à répondre à des questions qui attirerait forcément l’attention sur elle et sur ce qu’elle était. Elle avait déjà trop sacrifié et trop souffert, elle ne devait pas perdre ses résolutions et ses objectifs au risque de voir sa vie s’écrouler à nouveau, non !

Et pourtant rien de ce qu’elle avait fait aujourd’hui n’avait relevé de son comportement habituel. Aller demander de l’aide à quelqu’un déjà alors qu’il y avait bien longtemps au final qu’elle avait comprit qu’elle ne pouvait compter que sur elle seule. Elle se laissait rarement aller au naturel, ne se laissait pas approcher aussi facilement et pourtant elle avait cherché à sympathiser avec Qassim. Elle était aimable avec presque tout le monde certes, mais elle gardait une certaine réserve, une certaine méfiance. Alors pourquoi avait-elle été aussi différente aujourd‘hui ? Parce que Qassim avec sa tête de gentil et son petit air un rien benêt, avait fait sauter toute idée de méfiance ou de rejet. Oui à cet instant elle aurait déjà du être loin de cette ruelle, mais les cris de douleur du vendeur la paralysaient sur place. Elle se rapprocha donc de lui, sans parvenir à dire quoi que ce soit où à le rassurer trop tiraillé qu’elle était entre sa nature profonde qui ne s’était pas exprimé depuis une éternité et cette carapace, cette armure qu’elle s’était forgé pour ne pas finir réduite en miette par un monde qui était au fond sans pitié.

Autour d’eux s’était l’agitation, l’explosion ayant attiré les regards bien sûr. Les quelques personnes présentent au moment de l’accident sans avoir vraiment vu ce qu’il se passait s’étaient déjà chargés de prévenir police et ambulance. Ashlyn après un regard circulaire à la rue reporta son attention sur Qassim, faisant taire sa panique, remettant son cerveau et sa raison en marche. Elle allait devoir trouver un bon moyen, une bonne histoire pour expliquer la situation sans attirer la moindre suspicion sur elle…sur eux en fait. Elle n’était pas experte en explosif ou en médecine, mais elle était certaine qu’aucune personne se trouvant au volant de la voiture ai pu survivre, pourtant Qassim était toujours vivant. Même elle avait eu de la chance de s’être finalement trouver plus loin sur le trottoir plutôt que devant le capot où la aussi les chances de survie étaient mince. Par quel miracle le vendeur était-il donc encore en vie. Elle n’avait pas le temps de penser à ça maintenant, déjà les sirènes retentissaient et elle allait très vite devoir trouver quoi dire à tous ses gens.

L’ambulance fut finalement là suivi de prêt par la police qui elle était là bien trop vite au goût d’Ashlyn. Qassim fut prit en charge alors que déjà on la harcelait de question pour savoir comment tout ceci avait pu arriver. Elle n’avait pas dit toute la vérité, seulement une partie. Elle avait menti quand on lui avait demandé si elle savait ce qui avait pu faire exploser la voiture, avait hésité à dire que Qassim était à l’intérieur, préférant finalement passer ça sous silence de peur que trop d’attention sur cette histoire leurs crées encore plus d’ennui. Au final elle s’était donc contenter d’expliquer que la voiture était en panne, qu’ils avaient chercher à la réparer, qu’elle n’avait pas vu comment le véhicule avait pu sauter et que le vendeur s’était trouver un peu trop prêt. On la laissa donc à son tour partir pour l’hôpital afin de soigner sa brûlure. Là-bas elle aurait tout le temps de réfléchir au mystère de la survie de Qassim en attendant des nouvelles de ce dernier. Tout avait été décidemment bien étrange aujourd’hui, elle comme les événements, il fallait donc absolument qu’elle garde son calme et reprenne son comportement habituel.

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