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Il s’était toujours senti à l’aise en public. Il n’y avait nul gène. Peut-être parce qu’il s’était justement toujours trouvé là, au centre du monde, à les amuser, à les impressionner, à attirer l’attention, non pas sur sa peau, mais sur ce qu’il faisait. On aurait dit qu’un africain dans un cirque était moins choquant qu’un africain dans les affaires. Mais Solal était un homme impressionnant à regarder. On ne voulait guère s’y frotter, à première vu. Si sa musculature était imposante, sa taille et sa carrure massive l’était tout autant. Pourtant il n’y avait guère plus doux que lui. Un cœur de chaton dans le corps d’un tigre.

Le fouet claqua sèchement l’air. La bête bondit sur le second podium. Elle n’était pas mal à l’aise ni en colère. Solal ne l’obligeait jamais à faire la chose, et elle semblait s’en amuser. Il sourit en voyant l’énorme tigre gronder d’allégresse. Plus loin, le plus jeune semblait plus réticent à jouer le jeu avec l’homme noir. Son pelage était encore ébouriffé, un peu fou. Il s’approcha doucement, prudemment. Il savait que travailler avec les fauves étaient toujours quelque chose de risquer, du moins davantage pour lui que pour son nouvel assistant, le premier, d’ailleurs, qu’il eut. Il n’y avait jamais eu personne dans ses pattes avant cela, et il devait avouer que ce n’était pas particulièrement désagréable. À proximité, il se contenta d’écouter les réticences de l’animal craintif.

-Khaar, tout va bien, prononça-t-il doucement, de ce fort et chantant accent qu’était le sien. Il imaginait que le jeune tigre comprenait son langage par l’intonation déposée sur chaque syllabe.

Il tendit une main en sentant l’angoisse s’effacer du fauve qui se montra alors beaucoup plus joueur, se laissant volontiers approcher, toucher, avec un étrange ronronnement bruyant. Il le vit se redresser sur ses pattes antérieures pour poser celles de devant contre les épaules massives du cracheur de feu. Solal enfonça son visage dans le pelage encore doux du cou de l’animal, reniflant son odeur fauve. Si les jeux étaient toujours un peu brutaux, il ne s’en déplaisait guère. Il ne s’en lassait pas davantage. Le duo homme-bête se retrouva rapidement allongé sur le sol frais du temps de l’année. Ils se débattirent un moment ainsi sous le regard du second fauve, qui avait choisit de garder une distance considérable. L’homme se redressa après un moment. L’après-midi pointant déjà le bout de son né, il reconduit les fauve à leur abri, prenant soin de leur adresser une dernière caresse avant de refermer les barreaux de fer derrière eux, malgré le pincement qu’il ressentait de verrouiller leur prison qu’il voudrait beaucoup plus grosse. Faute de moyen, il se contentait de ça…

Il perçu un premier mouvement en revenant sur ses pas dans le but de ranger ce qui trainait sur le terrain. Son regard pétillant s’accrocha inévitablement sur le physique qu’il voyait déambuler. L’arrivée des frères Spickett récemment n’avait fait qu’agrandir la famille du cirque, pour le plus grand bonheur du Dragon. Et s’il ne s’était guère entretenu avec eux, encore, il les appréciait déjà, comme des frères de cœur, comme des fils, autant qu’il appréciait et aimait tous les autres membres de la troupe. Il leva une main massive pour attirer l’attention de l’ainé…

- Salamaleikum, Elliot! Kay fii, approche.

Il s’était toujours surpris à se montrer particulièrement paternel envers les derniers arrivants et ce n’était certainement pas aujourd’hui que ce petit côté changerait. Il réduisit lui-même la distance qui le séparait du jeune homme et se décida à poser une main contre son épaule pour lui signaler qu’il ne lui serrait certainement pas hostile, de cette main étrangement chaude pour n’importe qui, qui ne le connaissait pas.

-Nous n’avons guère eu l’occasion de se connaître, encore… très… occupés!

S’il éprouvait parfois certaines difficultés ou blocage sur quelques mots, il s’était toujours très bien débrouiller pour communiquer.