♣ Alice se dirigea vers le téléphone. La jeune fille avait promis d’appeler sa mère et son père toutes les semaines. Cela dérangeait quelque peu Alice. Non pas qu’elle n’aimait pas ses parents, mais cela coûtait pas mal d’argent d’appeler des Etats-Unis jusqu’en Allemagne et jusqu’en Russie. Alice saisit le téléphone et commença à composer le numéro de sa mère. Elle ne souhaitait pas téléphoner à son père ce jour-là. Cet homme a toujours été plus distant et Alice le connaissait bien moins que sa mère. Et avec les évènements qui se passaient, c’était la voix douce de sa mère qu’Alice avait besoin d’entendre. La sonnerie retentit trois fois avant de laisser la parole à la mère d’Alice.

« Allo ? »

Rien que ce Allo réconfortait Alice. Ce jour-là, elle n’avait pas réussi à contrôler ses sentiments et à provoquer une grande cohue en libérant par mégarde un arc électrique. Alice répondit à sa mère. Le ton de sa voix n’était guère agréable. Mais cela avait toujours été comme ça, et sa mère y était habituée. Bien que la journée fût relativement mauvaise, Alice n’en toucha pas un mot à sa mère. Elle ne voulait pas l’inquiéter.

« C’est moi. J’veux juste savoir comment vous allez, toi et Manuel. Quoique je m’en fous un peu de Manuel. »

Alice était bien décidée à ne pas se montrer plus aimable. Elle refusait déjà de prendre des nouvelles de son frère et parlait avec un air arrogant et moqueur qu’elle arbore toujours. La réponse de la mère était simple. Elle ne fit aucune remontrance à sa fille. De toute façon, elle en avait déjà tellement fait, mais la jeune fille refusait d’obéir.

« Bien. Et toi ? Tout se passe bien aux Etats-Unis ? »

Alice savait très bien ce qui allait se passer ensuite. La routine habituelle. Lorsqu’elle téléphonait à sa mère, la conversation n’était guère différente. Elles prenaient des nouvelles l’une de l’autre, discutait un peu sur le temps qu’il faisait aux Etats-Unis ou en Allemagne, et elles se quittaient. Même si Alice ne se montrait jamais entreprenante lors des discutions mère-fille, cela la réconfortait énormément de l’entendre parler, de l’entendre lui parler.