Désespoir, chagrin, colère, satisfaction, vengeance, amour, malheur, crainte, terreur. Tous ces flots d’émotions me submergent à chaque pas que je fais dans la rue. Je me tiens le crâne, le serrant de toutes mes forces comme si il allait exploser. Un homme me bouscule violemment, et sa rage me consume en un instant. Je tombe en hurlant. Des gens accourent vers moi pour m’aider. Je ne veux pas qu’ils me portent secours, je veux qu’ils me foutent la paix !
« Allez-vous en ! » je crie, à genoux, les larmes aux yeux,
« Laissez-moi tranquille ! »Je sens leur inquiétude, leur incompréhension face à ma réaction. Certains s’éloignent, compatissants. Deux personnes restent seulement. Un jeune garçon, et sa mère. Ses cheveux blonds, presque blancs sont attachés en un chignon parfait. Elle s’agenouille à mes côtés, me chuchote des mots doux que je n’arrive pas à comprendre. Je ressens sa douleur, la perte récente de sa fille, à qui je ressemble étrangement dans ma misère. J’inspire profondément, me concentrant sur les battements de mon cœur, sur mon sang qui circule dans mes veines, mes artères, mon corps tout entier. Le petit me déteste. Il me hait parce que je rappelle de mauvais souvenirs à sa mère. Ce n’est pas ma douleur, c’est la leur. Je dois fuir. Loin d’eux et de tous les autres.
000
Mais Saoirse n’a pas toujours vécu de cette façon. Elle a grandi dans une petite maison, près de la ville de Sydney en Australie. Elle a toujours su qu’elle était différente. Sa faculté de faire de l’eau tout ce qu’elle désirait n’était pas donnée à tous. La jeune fille n’a jamais rien dit. Les gens anormaux ne sont pas acceptés dans la société. Elle ne s’entraînait pas, évitait même d’utiliser son don, honteuse de l’avoir acquis sans savoir comment.
Saoirse déménagea aux Etats-Unis, aux alentours de Denver dans le Colorado, avec ses parents. Elle pensait continuer une vie normale.
FLASHBACKJe me fonds dans la foule d'élèves. On ne me voit plus, je suis invisible. Je les regarde tous, détaillant chaque partie de leur visage, analysant chacun de leur gestes. Certains rient, d'autres s'engueulent ou s'embrassent. Et moi, je suis là, seule, n'appartenant à aucun groupe, sans amis, sans aucune bouée à laquelle se raccrocher. Une bande de garçons, populaires auprès dans toute l'école bousculent volontairement un jeune homme. Ils le ridiculisent, le poussent. Son chagrin, son humiliation s'emparent de mon corps et me clouent contre les casiers, qui griffent mon dos. Ma panique se mélange à celle de la victime. Tout le monde rit, se moque, personne ne les arrête. J’ai mal partout. Je ressens ses cris intérieurs, ses appels à l’aide qui refusent de franchir ses lèvres, sachant pertinemment que personne ne répondra. Je pleure silencieusement, pour lui, pour tous ceux qui doivent vivre ça au quotidien. Ce sont des connards. Des pourritures. La colère, la haine me compressent la cage thoracique et écrasent chacun de mes organes vitaux. Je hurle. Tellement fort, tellement longtemps que mes cordes vocales me brûlent la gorge. Ils se tournent tous vers moi, surpris.
« Crevez ! Crevez-tous ! ». Sans un regard pour eux, je m’éloigne en courant.
FIN DU FLASHBACKAprès cet incident, la jeune Hopkins se terra dans sa chambre, refusant de retourner au lycée et d’approcher qui que ce soit d’autre. Ses parents ne luttaient plus, et entrèrent en contact avec divers médecins, psychologues, psychiatres et tous ceux qui avaient le pouvoir d’aider leur fille. En vain. Ils parlaient même de l’enfermer à l’asile. Les murs de la chambre de Saoirse étaient couverts de gribouillis, de citations, de phrases concernant tous les thèmes les plus sinistres. Elle devenait complètement folle.
Mais la venue d’un certain professeur Xavier changea la donne. Saoirse n’hésita pas et accepta de rejoindre cet étrange institut où des gens comme elle vivent sans se cacher. Des mutants. Elle avait enfin trouvé un groupe. Un endroit où elle pourra se reconstruire, et être elle-même. Sa nouvelle famille.