♣ « 76 votes à 24, l’amendement est rejeté. »
Regina ferma les yeux et inspira profondément, essayant désespérément de garder son calme.
Même après toutes ces années à évoluer dans l’arène politique, elle n’arrivait toujours pas à se faire à la déception et la rage qui la gagnaient lorsqu’une de ses propositions était rejetée au Sénat.
Ce projet-ci lui était particulièrement cher, et l’échec en était d’autant plus cuisant.
Depuis qu’un mutant avait organisé un attentat pour révéler au grand jour l’existence des mutants, Regina avait travaillé sur des projets de lois pour protéger les mutants. A vrai dire, cela faisait des années qu’elle y réfléchissait, se préparait à cette éventualité. Hélas, elle aurait dû s’y attendre, les politiciens préféraient attendre et voir avant de trop se mouiller dans cette affaire. Encore une grosse minorité de gens ne croyaient pas à l’existence des mutants, et la majorité qui en était convaincue n’osait rien faire. Le terroriste semblait isolé et, depuis l’attentat, aucun autre mutant n’avait fait parler de lui (pas en mal en tout cas). Ils ne représentaient donc pas une menace pour les politiciens et, malgré les attaques anti-mutantes de plus en plus nombreuses, ils préféraient rester en retrait.
Regina rageait. Elle pensait à ses enfants, Castiel et Lauralee, tous deux mutants, à leur sécurité, à leur survie. Elle était effrayée de voir l’existence des mutants être mise en danger, comme celle des noirs avant eux, et elle avait peur que les mutants subissent à leur tour une ségrégation. Elle ne le souhaitait ni pour ses enfants, ni pour personne d’autre.
Cependant, tant que ses collègues, que le Président continueraient de fermer les yeux sur cette situation, elle resterait impuissante. Dieu ! Qu’elle détestait être reléguée au rang de simple spectatrice, particulièrement lorsque ses propres enfants étaient concernés.
Elle rouvrit les yeux, échangea un regard avec les quelques membres de son partie qui avaient osé voter en faveur de sa proposition pour la protection des mutants et, après un bref sourire désolé, elle se concentra sur la nouvelle discussion qui commençait.
La journée continuait, les affaires n’attendaient pas.

~

La journée avait été plus longue que prévue, et Regina l’avait vu passer avec une lenteur incroyable. Il était près de 23h lorsqu’elle put enfin rentrer chez elle. Dès qu’elle ouvrit la porte d’entrée, ses deux chats Horus et Hadès l’assaillirent, lui arrachant un sourire. Une fois à l’intérieur, la porte fermée, elle s’autorisa quelques minutes pour s’asseoir et jouer avec ses chats, tandis que les larmes roulaient enfin sur ses joues.
Regina les avait senti monter depuis le résultat du vote le matin-même, mais n’avait pu se retrouver toute seule de la journée pour leur laisser libre cours. Il était déjà difficile d’être une femme au Sénat, ou dans la politique en général, elle ne pouvait pas se permettre d’être surprise en train de pleurer, en train d’être « faible ». Dans la sécurité de sa maison, néanmoins, elle pouvait enfin se laisser aller à ses émotions.
Elle se releva et, souriant aux miaulements de ses chats, elle alla remplir la gamelle. Quand elle eut fini, elle jeta un regard à sa montre. Elle hésita un moment mais se résigna ; il était bien trop tard pour appeler ses enfants. Elle avait pourtant tant envie d’entendre leurs voix ! Elle les appellerait demain matin du bureau, Castiel serait probablement là pour répondre, il lui avait dit qu’il était en congés pour quelques jours.
Épuisée tant physiquement que moralement, Regina se dirigea ensuite directement vers sa chambre pour aller se coucher.
Pourtant, malgré sa fatigue, cette nuit-là le sommeil mit longtemps à venir s’emparer de son esprit préoccupé.