La nuit venait de s'abattre telle un immense voile noire sur la ville de New York. Le ciel était dégagé : on voyait ces milliers de tâches qui brillaient telles de petites ampoules, qu'on appelait plus communément étoiles. Le port, illuminé par quelques lampadaires, était d'un calme absolu. On voyait la lumière se refléter dans l'eau et dans les mouvements de celle-ci. Le vent soufflait légèrement, une petite brise s'installait de plus en plus. Le calme fut alors rompu par des bruits de pas. Ceux-ci ne donnaient pas l'impression que la personne qui marchait était pressée ou marchait vite : ils donnaient l'impression qu'une personne aimait cet endroit au point de venir s'y réfugier en pleine nuit. Un grand homme, imposant et plutôt musclé s'avançait calmement près du ponton, où il finit par s'asseoir. Il enleva ses chaussures et ses chaussettes, s'allongea sur les lames de bois et regarde le ciel et ses milliers d'étoiles.

Tellie aimait venir ici. Il se sentait bien dans ce lieu peu visité et calme, surtout lorsque la nuit les étoiles se mettait à scintiller dans cette vaste étendue noire. Il aimait venir se détendre, cesser de penser aux tracas quotidiens et à ses problèmes. Il aimait venir décharger sa colère envers les humains qui ne le comprenaient pas et qui le jugeaient monstrueux parce qu'il était différent. Il ne les détestait pas, mais il avait de la rancœur à leur égard. Cependant, les choses commençaient à changer. Il acceptait sa mutation, sa différence. Il acceptait de ne pas être comme tout le monde, et commençait à en être fier. Il ne doutait plus ni de lui même, ni des siens. Il savait qu'un jour, il rencontrerait une personne en adéquation avec ses idées qui lui permettrait de participer à l'acceptation de ses confrères et consœurs. Il était prêt à tout pour permettre aux siens de vivre librement, sans se cacher. Tellie savait qu'il n'était pas seul, il ne pouvait pas croire qu'il soit l'unique Homme sur Terre qui ait un don.

Notre protagoniste fut alors soudainement interrompu dans ses pensées. Du bruit, peu éloigné de lui, venait de se faire entendre. Le mutant se leva alors d'un bon, et s'approcha doucement de la source des sons qu'il avait entendu. Deux jeunes hommes, la vingtaine probablement, se tenaient là, derrière une poubelle, et buvaient de l'alcool. Ils lui avaient fait peur. Il était énervé, et n'hésita pas à le faire savoir à ces deux gosses.

« Bande d'imbéciles. Vous pouvez pas être plus discrets ? Si vous voulez boire et vous ramasser la tête par terre, allez autre part, mais faites pas chier. »

Tellie continua de ronchonner sur quelques mètres, remit ses chaussettes et ses chaussures et quitta le ponton. Il s'installa plus loin, entre deux bateaux. Il vérifia soigneusement si il y avait âme qui vive, mais personne. Il décida alors de se replonger dans ses pensées. Cette fois-ci, il se rappela cette journée où il avait fait face à la haine des humains. Il était seul, effrayé et plutôt jeune. Ses émotions étaient la source de sa puissance. Des gens se moquaient de lui, riaient de lui. Il explosa alors, et fit s'envoler sur plusieurs mètres bon nombre d'objets. Les gens qui se moquaient de lui hurlèrent et l'insultèrent de monstre, de bizarrerie, d'erreur de la nature. Il avait eu mal, et c'était alors renfermé sur lui. Désormais, ses émotions ne prenaient plus le contrôle de son don : il le maîtrisait assez pour le contrôler, mais pas pour utiliser tout son potentiel. Pourtant, il s'entraînait dur, et parfois des heures durant. Il manquait à Tellie ce dé-clique, ce petit truc qui lui permettrait d'exploser en contrôlant.

Une nouvelle fois, il entendit du bruit derrière lui. Il n'avait pas envie de se lever cette fois, ni même de s'énerver pour de stupides individus bourrés. Il utilisa alors son pouvoir et déclencha une tempête. Tout s'envola et attérit au milieu des arbres qui longeaient le port. Il se mit à rire en pensant aux deux andouilles qui venaient de finir bloqués dans un arbre. Lorsqu'il se releva pour constater ce qu'il avait fait, il fut surpris de voir qu'il n'y avait personne ici, et que la poubelle en métal avait disparût. Il entendait toujours du bruit, mais ne savait pas d'où ça venait. Tellie commençait de nouveau à avoir peur, comme lorsqu'il était plus jeune. Qu'allait-il se passer ?