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 Pas d'omelette sans casser des oeufs [PV]

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Pas d'omelette sans casser des oeufs [PV] Vide
MessageSujet: Pas d'omelette sans casser des oeufs [PV]   Pas d'omelette sans casser des oeufs [PV] Icon_minitimeMar 29 Juil - 19:00


Mahé-Lou & John

pas d'omelette sans casser des oeufs


made by LUMOS MAXIMA







Elle s’approcha tranquillement, les mains dans les poches. En la voyant arriver un des jeunes hommes se leva et la suivit dans un coin à l’abris des regards. Il sortit un billet, que Mahé prit, ou plus précisément échangea au creux de sa main contre un sachet d’herbe.

-« C’est la même que la dernière fois ? »
-« Ouais. »
-« Parfait ! Tu en auras encore la semaine prochaine ? »
-« Je ne sais pas.»
-« Ok, tiens-moi au courant. » Il lui sourit, affable. « Tu veux te joindre à nous ? »
-« Non merci, c’est gentil mais j’ai quelque chose à faire. A bientôt ! »

Il repartit s’assoir dans le cercle de hippies d’où il s’était levé. L’un jouait de la guitare tandis que les autres discutaient entre eux en faisant tourner un joint, et dissertaient probablement sur l’inutilité de la guerre et la corruption au sein du gouvernement. D’ailleurs ils n’étaient pas les seuls, dans ce coin de Centrale les sitting de hippies poussaient comme de la mauvaise herbe. Mauvaise herbe que la police se faisait une joie d’arracher. La jeune femme ne comptait plus les nombres d’interventions auxquelles elle avait assisté, du moins de loin, parce que dès qu’elle voyait que les choses commençaient à tourner au vinaigre elle décampait sans demander son reste. Mahé-Lou partageait les opinions des hippies sur la guerre, qui la révoltait tout autant qu’eux. Mais si elle avait refusé l’offre du jeune hippie de rester un moment avec lui et son groupe d’amis à disserter sur les maux de la société, c’était surtout parce qu’elle n’avait aucune envie de se faire interpeller par la police. Avec ses cheveux elle était déjà suffisamment associée à des groupes contestataires, et ce moment elle voulait éviter les ennuis le plus possible. Et puis bon, c’est bien gentil de jouer les anticonformistes, mais c’est pas en restant vautré toute la journée dans un parc à s’exploser les neurones que les choses allaient avancer. Mais ça, c’était une autre histoire, et exposer ce genre d’idées elle passerait pour une facho.

Elle quitta Central Park pour Harlem, qui à cette heure de la nuit fourmillait d’animation. C’était quelque chose New-York by night : il y avait toujours quelque chose d’insolite à voir, quelque chose de grandiose à regarder. Dans les rues elle se sentait comme un papillon de nuit irrémédiablement attiré par la lumière : elle voletait d’un endroit à un autre, s’arrêtait une demi-heure à un endroit puis repartait vers un autre, aussi libre qu’un atome porter par les aléas des molécules qu’il composait, dans l’air, invisible et insaisissable. Cela faisait un bout de temps qu’elle avait cassé sa montre mais elle arrivait toujours à se repérer dans le temps. La nuit à New-York était partagée en phases distinctes : d’abord, elle y avait celle ou les touristes et les hommes d’affaires pavanaient sur les trottoirs dans leurs plus beaux habits de soirée, se rendant à des cocktails huppés dans les palaces de beaux quartiers ou dans des restos branchés. Cette heure était aussi celle ou la symphonie des klaxons des taxis, des sirènes de police et des pompiers, faisait raisonner les grandes avenues d’une cacophonie infernale qui empêchait même de s’entendre penser. Au début c’était assez désagréable, mais on s’y faisait. C’était une des raisons pour laquelle l’ambiance de New-York était unique.

Un peu plus tard on ne pouvait pas faire dix mètres sans tomber sur une pute : elles flânaient perchées sur de hauts talons dans des atours qui mettaient d’avantages leurs corps en valeur qu’il ne les dissimulait. Il y en avait de toute taille, de toute forme, et de toute les couleurs. Ils arrêtaient les automobilistes, prenaient des pauses lascives, enflammaient les passants d’un regard sensuel et provocateur. Mahé ne pouvait s’empêcher de s’arrêter pour les regarder, ou plus précisément pour les admirer. Leur apparente vulgarité les rendait, à ses yeux, infiniment désirable, et il fallait avoir du courage pour passer toute une soirée avec des talons aussi hauts : un jour son père lui en avait prêté, et elle s’était avouée vaincue au bout d’un quart d’heure. Mais ce n’était pas uniquement pour cette raison que Mahé-Lou les admirait : vendre son corps était considéré comme l’acte le plus dégradant qu’il soit, de l’irrespect pour sa propre personne. Elle pensait au contraire, que pour vendre son corps il fallait aimer son corps, suffisamment pour ne pas y voir, à la longue, une vulgaire marchandise. Et une force mentale digne d’un soldat. Elle s’était fait plusieurs fois interpellée quand elle les observait : certaines lui demandaient d’un air agressif ce qu’elle regardait, d’autres au contraire lui demandaient d’un air aguicheur si elle était intéressée. Dans ces moments là Mahé-Lou s’en allait sans demander son reste en bredouillant, le feu aux joues, embarrassée d’avoir été surprise à se rincer l’œil. Même si elle s’était toujours promis qu’un jour, quand elle en aurait les moyens, elle s’offrirait une soirée avec l’une de ces déesses. Mais ça c’était un secret.

Cette heure était aussi celle ou des dealeurs à l’allure inquiétante écumaient les rues en essayant d’écouler leur mauvaise cam arrivée de Colombie. Ceux là, Mahé-Lou les fuyaient comme la peste et changeait de trottoir quand elle en repérait un. Ces gars là étaient inquiétants, mais recevaient leurs ordres de types encore plus inquiétants. Il était donc préférable de ne pas trop se frotter à eux. On croisait aussi quelques mafiosos de Little Italie au volant de leurs voitures aux vitres blindés. Ceux là surveillaient si les putes et les dealeurs faisaient bien leur chiffre d’affaire.
Ensuite, venait la dernière phase de la nuit, l’explosion de perversion avant que le jour ne remette un peu d’ordre. Tous ceux qui étaient encore dans les rues à cette heure là l’étaient sous l’emprises de substances prohibées, sous l’emprise d’alcool ou cherchaient des choses qu’il valait mieux ignorer.

Mahé-Lou s’arrêta dans un bar d’Harlem ou jouait un groupe de jazz venu tout droit de la nouvelle Orléans. Elle avait le ventre plein et commanda une bouteille de whisky. Il lui restait encore un peu d’argent, gagné en dealant, mais il était décidé à son grossiste et il ne valait mieux pas qu’il quitte sa chaussette. Elle entama sa bouteille, profitant de la musique, se leva même pour allez danser quand elle fut suffisamment alcoolisée et raconta à un type qui l’accosta qu’elle s’appelait Sydney, qu’elle venait de Sydney en Australie (humour de meuf bourrée faut pas chercher à comprendre) et que son petit ami était un riche pétrolier d’Arabie Saoudite. Quand le bar ferma la nuit était déjà bien avancée, et Mahé ne marchait plus droit. Mais elle marchait quand même c’était déjà ça. Ou du moins, elle ne voulait pas s’arrêter de marcher. C’était repartie pour une insomnie qui allait durer jusqu’à l’aube. Elle avait suffisamment d’alcool dans le sang pour s’endormir comme une masse, mais la nuit lui faisait peur. C’était comme ça tous les soirs : elle marchait jusqu’à tomber de sommeil pour ne pas se sentir angoissée à cause de noir.

-« Ca va mademoiselle ? Vous voulez que je vous accompagne quelque part ? Ils sont jolis vos cheveux mademoiselle…»

La jeune femme accéléra le pas sans même regarder l’homme qui venait de lui parler, sentant instinctivement le danger. Il la suivit, et alors elle se mit à courir sans de poser de question, le cœur battant la chamade, le souffle court. Le type la rattrapa sans mal, la prit par le poignet et la plaqua contre un mur en lui susurrant des obscénités. En sentant son haleine Mahé-Lou eu un haut le cœur. Elle se débattit en hurlant à s’en casser les cordes vocales et essaya tant bien que mal de le repousser.

-« Tu vas te taire, tu vas te taire !! »

Le type lui envoyait une gifle, puis une autre, ce qui lui arracha un sanglot désespéré. Il lui arrachait son haut en ouvrant descendant son pantalon. Mahé continuait de crier, et à travers ses larmes enleva un des gants en cuir et plaque sa main sur le visage du type. L’effet fut immédiat : son pouvoir, décupler par l’adrénaline, fit tomber le type en hurlant. Elle s’enfuit aussi vite qu’il lui était possible de le faire en se rhabillant.

Sa course folle la mena jusqu’à Central Park : c’était un endroit qu’elle connaissait bien et cela la rassurait. Elle s’assit sur un banc et se plia en deux pour vomir, aussi bien à cause de ce qui venait de lui arriver qu’à cause de l’alcool. Elle resta un moment sans bouger le temps de reprendre ses esprit. Elle passa les doigts sur sa tempe et s’aperçu qu’elle avait une énorme bosse. Maintenant elle titubait de fatigue, et se servit de son sac en guise d’oreiller puis s’allongea et s’endormit immédiatement.

Il devait déjà être plus de midi quand elle rouvrit les yeux. Et immédiatement elle sursauta, en voyant non long d’elle un visage fin, des cheveux vénitiens et un regard clair. Elle se tut un moment, sous le choc face à cette rencontre impromptue, mais attendue et rêvée depuis longtemps. Elle sourit d’un air sarcastique.

-« On t’a jamais dit que c’était mal élevé de regarder les jeunes filles dormir, Crocodile Dandy ? Pervers va ! »

Elle quitta sa position allongée en faisant bien attention de ne pas mettre les pieds dans la flaque de vomit qu’elle avait laissé la veille. Sa tête était lourde et elle se sentait pâteuse
Pour une surprise c’était une surprise. Elle était immensément heureuse de revoir John, mais craignait de voir expliquer sa soudaine disparition. Ou pire, que John lui en veuille de ne pas lui avoir donné de nouvelles.
Elle avait souvent imaginé ses retrouvailles avec lui, mais jamais de cette manière : elle puait l’alcool, le vomit, elle avait un énorme hématome sur le visage, et devait être encore plus pale que d’habitude –si c’était possible- en vu de la nuit qu’elle venait de passer.
Pour tout dire, elle avait un peu honte qu’il la voit dans cet état.
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MessageSujet: Re: Pas d'omelette sans casser des oeufs [PV]   Pas d'omelette sans casser des oeufs [PV] Icon_minitimeMer 30 Juil - 1:04


    Dans le métro surchargé d'employés de bureau en pause de déjeuner, John lisait le journal, apparemment trop obnubilé par celui-ci pour être en mesure de donner sa place à une dame âgée, qui le pourrissait à distance. Les nouvelles n'étaient pas bonnes, la majorité des articles diabolisaient les mutants, se servant de cas isolés pour les rendre subversifs et créer de dangereux amalgames dans la tête des humains. Cette histoire allait mal finir selon lui, mais il était trop heureux d'avoir un quartier libre en pleine semaine pour se faire du souci aujourd'hui. Il descendit au Grand Central Terminal en laissant son journal sur le siège, joua des coudes pour sortir de la station et refoula un groupe d'européens perdu avant de se prendre un café. Il s'étonnait d'avoir acquis aussi rapidement les gestes du bon New-Yorkais, et même s'il détestait se fondre dans la masse, il lui était de toute manière interdit d'agir autrement. Le plus dur pour lui, c'était de ne pas penser à son don lorsqu'il se trouvait dans la foule. John avait appris cette capacité d'adaptation dans l'Institut du professeur Charles-Xavier, qu'il aimait comparer à un centre de détention provisoire pour jeunes délinquants. Il avait en effet beaucoup de mal à accepter l'isolement des mutants, même si certains n'avaient pas d'autres choix - comme lui.

    En vue de passer chez un disquaire avant la fermeture du midi, John pressa le pas, risquant ainsi sa vie aux quatre coins de la ville. Les rues noircies de monde eurent raison de sa patience et il bifurqua machinalement sur Central Park, son gobelet de café resté miraculeusement intact. Il jeta un œil à son montre : trop tard. John avait la terrible impression d'avoir gâché sa matinée, il continua son chemin, à la recherche d'un bon spot pour patienter jusqu'à la réouverture des commerces - et surtout pour boire ce foutu café. A cette heure-ci les bancs coûtaient chers et il commençait à douter de ses capacités d'orientation lorsqu'il croisa par deux fois la même fontaine. Lorsqu'il trouva un coin sans petits merdeux dans les alentours, le banc était occupé par une clodo. Mais tandis qu'il rebroussait chemin, il fut pris d'un terrible doute, à tel point qu'il revint sur ses pas pour analyser la touffe de cheveux multicolores de la sans-abri allongée sur le banc. John l'observa de plusieurs angles avec précaution - presque charmé à l'idée de l'évaluer du bout d'un bâton, car il n'arrivait pas à croire ce qui était en train de lui arriver. Tout un passé défila devant ses yeux, celui qu'il avait en commun avec cette clodo.

    John n'arrivait pas à comprendre par quelles circonstances Mahé se trouvait ici, et il espérait grandement que tout cela n'avait rien à voir avec sa mutation. Mahé avait été pour lui ce qui se rapproche le plus d'une petite-copine, durant leurs études. Ils avaient une sorte de connexion qui faisait qu'ils pouvaient ne pas se donner de nouvelles pendant un an et rester totalement inchangé dans leur rapport. Mais John était bien loin de s'imaginer que leur complicité allait défier les lois du temps et de l'espace pour les réunir de nouveau. Curieusement, il ne la réveilla pas immédiatement et sembla même apprécier le spectacle de sa déchéance, visiblement punitif envers Mahé qui ne l'avait pas informé de sa situation - et même s'il aurait agi de la même façon. Celle-ci ouvrit les yeux avant qu'il n'ait pu décider quoi que ce soit - car il envisageait la fuite comme une véritable option. Il resta prostré comme un gros débile, lorsqu'elle sursauta. « On t’a jamais dit que c’était mal élevé de regarder les jeunes filles dormir, Crocodile Dandy ? Pervers va ! lui lança-t-elle pour démarrer les hostilités. « J'avais plutôt l'impression d'observer un vieux drapeau de la dernière Gay Pride, en fait.

    Sa rancœur semblait parler à sa place, il ne voulait pourtant pas la blesser... Il avait terriblement envie de la serrer dans ses bras, mais elle puait le vomi alors il se contenta de lui rendre son sourire - ce qui était quelque chose de très malsain chez lui. John s'installa à côté d'elle, c'était amusant de voir qu'ils n'avaient pas changé d'un pouce - l'aspect détérioré de Mahé mis à part. Il remarqua alors - avec ce faux-air de fascination - l'énorme bleu qu'elle avait sur le visage, mais, avant de lui demander comment elle s'était faite ce gros machin (cette question lui brûlait les lèvres mais il avait un sens étrange des priorités), John lui demanda s'il pouvait le toucher... Et le toucha finalement sans attendre sa permission - ayant donc pris la décision que sa séance punitive n'était pas finie. « Navré, fit-il sans le penser. Il but alors une gorgée de son café, pour lui donner envie - même s'il était froid. J'espère que tu ne m'en veux pas d'être rentré sans permission dans ta chambre. » Il baissa les yeux pour désigner le banc. Le mutant attendait des explications sur sa présence ici à Central Park, mais également sur son départ inattendu de leur école, alors qu'il venait de rentrer des champs de bataille Vietnamiens, visiblement très rancunier d'avoir été écarté de sa vie - mais il était trop fier les lui demander avec tact. Mais il avait beau être capable de lui dissimuler une mutation à base de flammes et d'explosions, il n'arrivait pas à lui cacher son regard préoccupé.


Dernière édition par Saint-John Allerdyce le Ven 1 Aoû - 12:23, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Pas d'omelette sans casser des oeufs [PV]   Pas d'omelette sans casser des oeufs [PV] Icon_minitimeMer 30 Juil - 16:58


Plusieurs émotions contradictoires essayaient de se frayer un chemin sur son visage. D’instinct, elle voulait afficher une mine impassible et souriante : c’était devenu pour elle presque une question de survie, de sembler imperturbable tant qu’elle n’avait pas jaugé, évalué et analysé la situation et de ne pas être pris au dépourvu en adaptant sa réaction à la situation sans se laisser guider impulsivement par ses émotions. Elle avait honte qu’il la voit sous un jour aussi négligé, et aurait préféré être tout à son avantage pour leurs retrouvailles. Et puis aussi, elle avait une sacrée trouille de devoir lui fournir des explications, parce que cela risquait de la mettre en position de faiblesse. A vrai dire elle avait presque envie de prendre ses jambes à son cou. Mais elle était aussi heureuse, voire soulagée, de revoir le jeune homme (qui plus est en un seul morceau). Elle ne l’avait pas revu depuis son départ pour le Vietnam. Et malgré les lettres qu’ils s’étaient envoyés régulièrement elle n’avait pas cessé de s’inquiéter pour lui : quelques rumeurs de plus en plus alarmantes arrivaient du front. On parlait de tortures, de prise d’otage, de gaz toxique, de maladies tropicales, de tuerie à répétition, de fatigue psychologique des soldats. La censure s’émiettait petit à petit et chaque jour dans les journaux on apprenait de nouvelles horreurs. Et il était certain que se passait là-bas des choses encore plus terribles que ce que les médias relataient, des choses qu’on n’apprendrait que dans cinq, dix, vingt, trente ans. John n’avait pas été soldat, mais photographe. Cela pourrait sembler moins dangereux. Sauf quand on est un australien du nom de Saint-John Allerdyce et qu’on a une sacrée tendance à jouer les têtes brulées : Mahé-Lou ne doutait pas que le jeune homme n’avait pas hésité à se mettre en danger pour prendre les plus beaux clichés possible. Et pour ça elle avait envie de le frapper, même si elle n’avait aucune preuve et que cet aspect de sa personnalité lui plaisait beaucoup : elle avait toujours eu de l’admiration pour les personnes téméraires, parce qu’elle ne l’était pas du tout.

Bref de nombreuses informations contradictoires trituraient son système nerveux, et sa tête était sur le point d’exploser, et pour l’instant la seule marque d’émotivité qu’elle pouvait se permettre était un petit sourire ironique quoiqu’un peu crispé. Son cœur tambourinait furieusement dans sa poitrine et sa gorge était nouée, sa bouche sèche (et ce n’était pas seulement dû aux relents d’alcool de la veille). Mais son regard quand à lui restait totalement inexpressif. C’était peut-être dû à leur couleur bleu givre, mais ses yeux n’exprimaient jamais beaucoup d’émotions, elle paraissait toujours lointaine et rêveuse. Ou bien défoncée. Bref, même sans le vouloir elle dépensait énormément d’énergie à calculer la moindre de ses émotions pour ne pas se dévoiler dans les moments délicats.
La présence de John lui mettait véritablement du baume au cœur après la soirée qu’elle venait de passer.

« J'avais plutôt l'impression d'observer un vieux drapeau de la dernière Gay Pride, en fait. » répliqua-t-il pour répondre à son ‘’bonjour’’.

Son sourire en coin s’élargit. Il n’avait rien perdu de sa répartie, et ça, c’était tant mieux. Au moins quelque chose qui n’avait pas changé et qui lui rappelait leur complicité. Il lui rendit son sourire et prit place à côté d’elle. Mahé en profita pour détailler son visage : elle voulait de nouveau graver dans sa mémoire chaque détail de son visage, ses pommettes hautes, ses yeux en amandes, son nez droit et un peu long, ses lèvres bien dessinées et presque pulpeuses, la forme de ses sourcils. Son teint était légèrement plus halé que dans ses souvenirs mais cela lui allait très bien. Il avait les joues un peu plus creuses, aussi, mais cela ne faisait qu’accentuer la finesse de ses traits. Elle aimait le dévisager, qu’il soit en train de parler ou pas.
Elle passa sa main dans ses cheveux avec fatigue et répondit à sa provocation.

-« alors là, je pense que le soleil du Vietnam t’as définitivement fait griller les neurones. »

Elle n’était certes pas en état pour se lancer dans une joute verbale (du moins, pas en état de la gagner) mais elle ne pouvait se permettre de ne pas répliquer. Et dans sa phrase il y avait une inquiétude déguisée : elle voulait savoir si il ne lui était rien arrivé de notoire au Vietnam, mais était trop fière pour exprimer clairement ses inquiétudes. Entre eux s’établissait un véritable langage codé ; l’un et l’autre étaient trop fiers pour exprimer leurs sentiments clairement, alors ils le faisaient en employant tout un tas de détours. Ils avaient tous les deux conscience de cela et c’était devenu comme un accord tacite : tu ne me mets pas au pied du mur, je ne te mets pas au pied du mur. Donc, malgré leur orgueil mal placé la communication restait possible car ils comprenaient –en général- assez bien les émotions de l’autre.
John lui demanda s’il pouvait « toucher ». La jeune femme haussa un sourcil.

-« Quand je te traite de pervers ne te sent pas obliger de te comporter en tant que tel… ah mais putain ! »

Elle ne l’avait pas comprit, mais quand sa chère tête blonde lui avait demandé s’il pouvait toucher, il n’y avait là aucune proposition érotique. Il voulait juste toucher l’hématome qui lui colorait une bonne partie du visage. Le contact lui procura une douleur vive et instinctivement elle porta sa main à la source de sa douleur. Elle ferma brièvement le yeux le temps de se ressaisir et serra les dents. Il l’avait fait exprès, elle en était certaine. Mais d’un côté elle ne pouvait lui en vouloir de lui en vouloir.

-« Navré. » Il prit un gorgé de café en observant Mahé par dessus son gobelet. « J’espère que tu ne m’en veux pas d’être rentré dans ta chambre sans permission. »
-« Penses-tu. Qu’est-ce que je peux faire maintenant ? Appeler la police ? »

Elle fouilla dans son sac et en sortit son paquet de cigarettes. Elle l’avait trouvé par terre la veille et il n’en restait que quatre. Elle en prit une, l’alluma de son briquet, et tendit le paquet à John. Elle avait bien sentit des reproches dans sa voix et elle lui devait quelques explications. Elle aspira quelques bouffées de nicotine pour se donner du courage, et détourna son regard du sien comme s’il venait de la brûler. Ses yeux étaient bleu vert, comme un lac en fin de soirée quand le soleil décline et que les arbres se reflètent dessus, un lac plein d’inquiétude. Cette soudaine douceur lui fit chaud au cœur, mais elle savait que si elle soutenait trop longtemps son regard elle allait se mettre à pleurer. Elle avait tellement de choses à lui dire… Elle triturait nerveusement son briquet, le regard dans le vague.

-« J’ai été renvoyée de l’école il y a à trois mois je crois. Ou peut-être quatre ? Je ne sais plus. C’est bête, très bête. Je suis arrivée au cours de Mrs Stonson –Histoire des arts quoi- j’avais fumé avant. Elle m’a cramé. Elle m’a fouillé et elle a trouvé de la beuh dans mon sac. Et voilà. » Elle haussa les épaules. « Comme tu le sais, ces derniers temps beaucoup des élèves de l’école on été réquisitionnés pour par l’Etat pour partir à la guerre. Il y a eu beaucoup de manifestations dans l’enceinte même de l’école, et crois moi ça chauffait : les flics ont arrêté plein de monde –la plupart des gens qui venaient manifester n’étaient même pas de l’école d’ailleurs. Y’a plein de groupes de hippies qui se sont ramenés, ils ont commencé à faire tourner des drogues durs, les flics contrôlaient tout le monde, bref c’était la grosse merde quoi. La réputation de l’établissement en a prit un sérieux coup quoi. Ca s’est un peu calmé, mais les profs et l’administration on commencé à établir une grosse politique anti-drogue, et plus globalement, anti-hippies. Donc pas la peine de te faire un dessin je pense : avec ma weed et mes cheveux j’étais le bouc-émissaire tout désigné pour montrer à d’éventuels contestataires que maintenant il allait falloir rentrer dans les rangs. Donc le soir j’étais renvoyée. Et comme j’étais en résidence universitaire, qui dit plus d’école dit plus de piaule. »

Elle venait de parler longuement. Mais elle n’avait rien à cacher à John, et dans le fond ça lui faisait du bien de discuter de tout ça avec quelqu’un. Elle avait beau se la jouer chat sauvage elle avait besoin –comme tout le monde- d’extérioriser de temps en temps. Et John était de loin la personne la mieux placée pour lui prêter une oreille attentive et à qui elle pouvait se confier sans avoir honte de montrer sa vulnérabilité (enfin pas trop non plus).

-« Hors de question de retourner en Arizona dans les jupes de ma mère. Donc je suis restée à New-York. »

Elle se sentit gênée de se plaindre de la sorte.

-« Mais bon. Maintenant t’es là. »

Et elle lui sourit timidement.

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