(I need a friend to make me happy) Not so alone
Tellie McMiller & Thomas Ehrlich

Thomas était étonnamment de bonne humeur en cette fin d’après-midi de printemps. Il sortait de répétition pour l’opéra, et cela s’était passé bien mieux qu’il aurait pu le croire. Bien que ses partenaires ne soient pas aussi bons que lui – la façon dont il s’habituait à cet état de fait l’effrayait d’ailleurs un peu – Thomas devait reconnaître qu’ils faisaient tous des efforts et donnaient le meilleur d’eux-mêmes. Cela se ressentait énormément sur la scène, et Thomas ne se souvenait pas de la dernière fois qu’il s’était senti aussi satisfait après une répétition de groupe.

Et ça ne s’était pas arrêté là ! Alors que Thomas rassemblait ses efforts, ignorant les autres chanteurs qui se regroupaient pour discuter vivement du spectacle, son agent l’avait approché. Quelque riche vieillard organisait un gala de charité et avait demandé Thomas spécifiquement pour y jouer. Thomas n’était jamais très emballé par ce genre de proposition, même avec le cachet mirobolant qu’on était prêt à lui donner. Il avait néanmoins accepté en voyant les pièces qu’on lui avait demandé de préparer. La Sonate au Clair de Lune de Beethoven était un de ses morceaux favoris, et le Grand Galop Chromatique de Litz, qu’il n’avait jamais joué, lui paraissait être un défi intéressant à relever.

Le jeune homme ne pouvait d’ailleurs pas s’empêcher de retenir un sourire à cette pensée. Il avait hâte de rentrer chez lui ! Ses mains le démangeaient déjà, souhaitant se mettre au plus tôt à l’exercice.

Il secoua la tête tandis qu’il rentrait dans le supermarché et prenait un panier. Il sortit sa liste de courses et marcha d’un pas décidé vers les premiers rayons qui l’intéressaient. Son sourire s’affaissa mais ne disparut pas totalement tandis qu’il parcourait le magasin. Il détestait faire les courses, il détestait les personnes âgées qui avançaient lentement et bloquaient le chemin avec leurs cadis, il détestait les mères de famille incapable de contrôler leurs gamins qui courraient partout en criant. A vrai dire, Thomas détestait tout ce qui n’avait pas de lien avec la musique. Toutes ces tâches quotidiennes lui donnaient l’impression de perdre son temps. Il avait bien essayé d’embaucher quelqu’un pour remplir son frigo ou faire son ménage, mais il ne supportait pas qu’on pénètre dans son appartement, surtout quand il n’était pas là. Seul son agent possédait un double des clés, et c’était plus par nécessité que par envie.

Thomas était en train de comparer les prix entre différentes marques de céréales lorsqu’il aperçut du coin de l’œil une silhouette qui lui paraissait familière.

Tellie McMiller. Thomas fronça des sourcils en reconnaissant l’homme. Il ne savait pas quoi penser de ce dernier. Ils se connaissaient depuis plusieurs années mais ne s’étaient jamais parlé en dehors du cadre professionnel. Thomas avait remarqué Tellie, il était de ces rares personnes à vraiment faire du bon travail et Thomas n’avait jamais eu rien à redire sur lui.

Thomas baissa les yeux vers sa propre tenue. Même s’il faisait toujours attention à la manière dont il s’habillait, il n’était pas vraiment présentable. Il portait simplement un T-shirt bleu clair ample et un pantalon de toile brun clair, qui lui permettait de bouger et de respirer aisément sur scène lors des représentations et il avait prévu de rentrer directement chez lui après ses courses. Thomas reposa les boîtes de céréales sur les étagères et, tirant son panier à roulettes derrière lui, se dirigea vers une autre allée.

Lorsqu’il fut hors de vue de Tellie, Thomas s’arrêta et se frotta les yeux, surpris. Qu’est-ce qui lui avait pris ?

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