Réveil aux aurores, petit-déjeuner sur le pouce, une douzaine d'heures de travail.
George ne pouvait s'empêcher de constater que ses journées se suivaient sans varier d'un iota. Comment ses jeunes années d'insouciance avaient-elles pu filer si vite ?
Il ne se plaignait jamais de sa petite vie de libraire, il en était au contraire assez satisfait, mais il connaissait ce soir-là un petit passage à vide qu'il ne pouvait ignorer. Faire un inventaire, appeler des fournisseurs, gérer sa comptabilité... toutes ces tâches qui habituellement constituaient presque un amusement l'avaient aujourd'hui plutôt agacé et il avait absolument besoin de décompresser.
Spontanément, il pensa à ses sœurs. Leur lien était fort et discuter avec elles était souvent le meilleur moyen d'aller mieux. De s'oublier aussi, en s'inquiétant pour elles au lieu de gérer ses propres turpitudes.
Mais il était hors de question pour lui d'imposer ses propres problèmes à sa famille, ça n'était tout simplement pas l'ordre des choses. Pourquoi les ennuyer inutilement alors qu'il avait simplement besoin de se déconnecter le temps d'une soirée, de prendre l'air.
Après avoir nettoyé et fermé sa précieuse librairie, le jeune homme décida donc de se changer et d'aller faire un tour seul. Après quelques minutes de marche, il arriva devant un bar qu'il n'avait jamais remarqué auparavant. Sans réfléchir, il ouvrit la porte et y entra sans même observer les lieux au préalable. N'étant pas un habitué de ce genre d'endroits, il n'avait pas l'intention de faire le difficile.
Jetant un coup d’œil rapide à la clientèle, il remarqua que la salle était plutôt bondée pour un soir de semaine. Rien de trop anxiogène mais tout de même. George se fraya aisément un chemin et s'installa directement au bar.

- Bonsoir ! Une flûte de champagne s'il vous plaît.

L'occasion était plutôt exceptionnelle après tout, autant fêter cela avec du champagne.
La serveuse, une jeune fille plutôt mignonne mais à peine majeure, le servit avec un petit clin d’œil. Après un simple merci, il détourna le regard et se laisse aller à ses rêveries.