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 In Between The Lines

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MessageSujet: In Between The Lines   In Between The Lines Icon_minitimeLun 14 Juil - 17:27


Un cri à haute teneur féminine se fit entendre dans le troupeau par quelques échos de redondances étouffées. Les bruissements assourdissants de l’avenue bondée déchiraient les flots infinis de parapluies qui convergeaient de toutes parts sur les trottoirs piétinés. La teinte aigue du son quasi transparent s’estompa rapidement, mais la répercussion immédiate fut l’amoncellement de regards soit agacés soit curieux de têtes à proximités. Puis, ce fut comme si plus rien n’avait existé du soubresaut collectif. Macabre conclusion d’une femme qui cherchait la foule du regard, farfouillant maladroitement ses poches de manteau, les yeux perlant la détresse face à ceux qui passaient en l’ignorant dans la froideur la plus monumentale.

Son portefeuille manquait par sa pesanteur au creux du repli de feutre du manteau qui pendait maintenant sans but, le fond percé par on ne sait quoi. Le rouge lui rongea les joues et l’embarras de la situation marqua ses gestes lorsqu’elle reprit sa route avec l’affluent citadin. Non loin de l’artère chaotique, passant devant un café italien d’un pas pressé, un homme, couvert d’une veste en cuir, interrogeait le contenu d’un portefeuille marron aux broderies fleurissantes.

**


Le craquement soudain d’une chaude averse d’été riposta en s’imbibant à la surface cahoteuse du pavé New Yorkais. Une nuque teinte de bleu se faufilant entre les individus, convergea à contre-sens sur la grande allée, serrant les épaules sur le large collet de sa veste ruisselante. L’homme à la foulée souple immergeait la masse humaine du quartier italien qui grondait déjà d’activités à cette heure du matin. L’odeur de la cigarette émanait de partout et nulle part à la fois dans l’assemblée grouillante, le jeune homme au visage pensif se retint de tirer le tube garnit de tabac qui trainait dans sa poche intérieure. Elliot Kane, absorbé par une fusillade de pensées éparses.

Il arrivait de son tour annuel à la terre familiale où il avait jadis jeté l’issue sordide dans les pages du passé. Jamais il n’aurait oublié les fracas du corps sans vie de sa sœur, mais le simple fait de retrouver l’ambiance de la vieille maison lui jetait au visage tous ses souvenirs les plus troublants. L’évènement marquait probablement la fin de son innocence dans ce monde et à la fois la réalisation du potentiel qu’il portait en lui. Un sourire vola sur ses lèvres pendant un instant. L’idée de se voir ainsi dans une ville pleine d’énergie lui rappelait également la distance qu’il ressentait face à cette masse de monde : humains et insouciants. N’était-il pas mieux qu’eux? Peut-être. Le pouvoir de détruire est certes précieux, mais précieux pourquoi? Il se mordit la lèvre inférieure en s’excusant brièvement lorsqu’il frôla l’épaule d’une jeune femme à la chevelure courte. Si sa sœur pouvait le voir en ce moment, elle se ferait une joie indéniable de lui rappeler à quel point il ressemblait à son père. Tant par ses actes que son faciès beaucoup trop sérieux, mais il repoussa cette pensée, préférant replonger dans la réalité de la cohue, libérant ses mains de gants en cuir sombre.

Le dessus de celles-ci se couvrit d’une pellicule de gouttelettes d’eau qui dégoutaient de ses manches, ruisselant sur les jointures marquées par l’encre noire. Les dessins discontinus arboraient des formes oblongues sans buts précis, rappelant les gravures amérindiennes de son enfance. Ne pas oublier ses origines, à tout prix. La paire de gant déposée dans la poche arrière de son jeans, ses bras le dirigeaient à travers hommes et femmes se serrant les uns contre les autres sur le trottoir. Son regard vert ne quitta pas des yeux les gestes de la femme qu’il suivait maintenant de quelques mètres. Cette dernière s’observait tout en marchant de ce petit miroir incrusté dans le repli de son portefeuille, un attrait particulièrement prometteur, libérant un tout autre sourire.

Le jeune homme accrocha sur sa tête une casquette noire et blanche faisant mine de se camoufler le plus possible de la pluie assourdissante, s’approchant à portée de bras de la femme qui replaçait maintenant son foulard rouge attaché au cou. Elle referma rapidement le portefeuille qu’elle laissa glisser sur la poche pendante de son manteau long avant de s’accrocher à son parapluie. D’un geste tout à fait simpliste et direct, l’index tatoué s’approcha juste assez pour toucher la couture inférieure de feutre qui se dégrada immédiatement. Une légère odeur d’oxydation s’émana à travers les flots humides. Attrapant l’objet rectangulaire de ses autres doigts, Elliot l’enfourna dans son propre manteau aussi vite qu’il était sorti de celui de la femme trop occupée à elle-même esquiver les passants. Les bruits de klaxons qui s’exacerbaient sur le bitume témoignèrent du vol opportuniste qui s’était déroulé en pleine rue, en pleine pluie. Il ralentit le pas doucement, laissant la foule le dépassé et du même fait, augmentant la distance le séparant de la femme au foulard rouge. Lorsqu’il se retourna pour se diriger dans l’autre direction de la petite Italie New Yorkaise, les échos d’un cri de surprise s’exerçaient déjà à travers les marcheurs.

**


Elliot s’arrêta au café qu’il venait de passer, se libérant de sa casquette lorsqu’il atteignit le paravent protégeant la pluie qui s’acharnait toujours. Un vingt dollar, pas plus, mais suffisant pour lui payer quelques repas et peut-être un café tout de suite. Poussant la porte d’une main, son veston de cuir agencé à ses gants ruissela sur le parquet aux tintements de la clochette annonçant les nouvelles intrusions. Quelques pas sur le plancher de bois de franc et la question habituelle de l’acte accompli voltigea quelque part entre la confiance et le doute. L’avait-on prit sur le fait?








[hrp] : Alors alors, à toi ma chère de faire entrer en scène Lucrecia Miss Rivendall! A-t-elle surprit le méfait? Est-elle sur les lieux par pur hasard? A-t-elle une envie incontrôlable de danser le goulou goulou de manière effrénée tout en balbutiant les sept contrées les plus visités dans le monde pour leurs attraits touristiques hétéroclites? :3 je sais pas mais toi tu sais peut-être !! huhuhu à toi <3
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MessageSujet: Re: In Between The Lines   In Between The Lines Icon_minitimeLun 14 Juil - 18:16


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In Between the Lines

feat ELLIOT & LUCRECIA



L'eau crépitait comme des bonbons pétillants sur les pavés de la ville New-Yorkaise. Je resserrais plus fort mon manteau beige sur mon corps frêle pour me protéger du froid, alors que la foule passait autour de moi. Tant d'inconnus, que je ne reverrais jamais. Il était inutile de m'attarder sur leurs visages, car leurs vies me seraient à jamais interdites. Je passais à travers eux comme un fantôme - nous étions tous le fantôme de quelqu'un, passant à travers les autres sans que l'on nous remarque. J'aimais cet anonymat des grandes villes : ici, personne ne savait qui j'étais, et c'était tant mieux. Mon caractère timide me forçait à ne pas me faire remarquer. Nul regard curieux, nulle attente que je ne pourrais combler. J'étais moi, invisible aux yeux des autres, et c'était remarquablement agréable de n'être rien, le temps de m'immerger dans ces rues.

Hélas, le problème des foules, ce sont les contacts. On se bouscule, on s'excuse, on se marche sur les pieds. C'est monnaie courante, et quand de l'épaule un homme me heurta, je n'y pris pas garde tout de suite. Pourtant, malgré moi je m'arrêtais et me retournai, bloquant la circulation un instant, des remarques diverses m'environnant pour me commander de me pousser. Je m'éloignais de la foule, en m'adossant à un mur, le regard rivé à l'homme qui m'avait bousculé. La pluie m'empêchait d'en voir plus, mais quelque chose chez lui me poussait à l'observer.

Quelques pas. Et ce que je vis me fis écarquiller les yeux. Cet homme avait touché le portefeuille et ce dernier avait ... Disparu. Je sentis la pluie chaude continuer de couler sur mon visage ; le temps continuait de filer, sans que j'y fasse rien. Et pourtant j'étais tétanisée - on avait commis un vol devant moi, et le fauteur de troubles était un mutant. Il m'était impossible de fermer les yeux là-dessus ; que pouvais-je faire ? Je ne pouvais décemment pas me mettre à crier ! Pourtant, c'est ce que fis la demoiselle, alors que l'homme s'éloignait comme si de rien n'était. J'étais la seule à avoir remarqué. J'étais la seule qui pouvait y changer quelque chose - le pouvais-je vraiment ? Je pénétrais dans l'établissement où il était entré, me postais face à lui, lui jetais un coup d'oeil noir et dis d'une voix un peu sèche à la serveuse :

« Un café pour moi. Et je prendrais la consommation de monsieur. »

Mon ton était de ceux qui ne se refusent pas. La serveuse haussa les sourcils mais hocha la tête. Mes traits étaient crispés et d'un air troublé, j'allais m'asseoir à l'écart de tout. Il y avait une musique de fond, très douce, au piano. Je reconnu la sonate au clair de lune 14 de Beethoven. Je posais mon sac à côté de moi puis dans un souffle je murmurais au jeune homme - qui devait d'ailleurs avoir sensiblement mon âge :

« Cela valait vraiment le coup ? »

Je soupirais et secouais la tête, presque tristement. Comment quelqu'un pouvait être poussé à de telles extrémités, j'en étais toujours triste. Je ne comprenais pas - j'avais vécu moi aussi des choses mauvaises, comme tout un chacun, mais je n'en étais pas devenue une voleuse. Et puis, quel était exactement son pouvoir ? Il était un être comme moi, sûrement paumé - et au fond, ne l'étais-je pas aussi ? Je l'invitais du regard à venir s'asseoir, avec un coup d'oeil signifiant que je ne lui voulais aucun mal. A présent, je m'en voulais d'avoir réagi, d'avoir levé le petit doigt - qui sait ce qui m'attendait ? L'idée que j'avais l'avantage ne me venait pas, car je ne fonctionnais pas comme ça. Chez moi, l'idée d'ascendance sur autrui n'existait pas - un monde naïf et sûrement trop doux pour la réalité.

« Je ne dirais rien. Mais je voudrais savoir pourquoi - vous ne me devez rien, certes, mais je pense mériter une réponse à ça. » Puis, comme je réalisais qu'il devait avoir peur - ou pire être en colère - à l'idée que j'ai vu l'usage de son pouvoir, je le rassurais d'un petit sourire timide. « Je suis comme vous. »

Je ne pouvais décemment pas faire de démonstration ici, mais je pense que c'était une bonne chose que d'avouer cela. Entre mutants, il y avait une espèce d'entente - du moins avec ceux que j'avais rencontré. Je remerciais la serveuse qui vint nous servir, et je m'occupais un instant l'esprit à mettre du sucre dans mon café, cherchant mes mots. J'avais le sentiment diffus et étrange d'être face à un grand élève de vingt-cinq ans qui avait volé le doudou préféré d'un autre. Mais là, c'était sérieux. C'était la vraie vie. Et qui étais-je au juste pour le juger ? D'une voix beaucoup moins assurée, comme si ma colère était retombée comme un soufflet, je dis d'une voix basse, un brin musicale :

« Si vous avez tant besoin d'argent, je veux bien vous en donner, moi. Mais ... Mais si vous continuez comme ça, vous risquez de vous faire prendre. Vous risquez de gros ennuis ... »

J'étais réellement inquiète, pour un inconnu. C'était ma nature profonde. Les autres en étaient souvent surpris - comment pouvais-je me faire du souci pour quelqu'un que je ne connaissais ni d'Eve ni d'Adam et qui pouvait me trahir, me faire du mal ? La réponse était simple : je croyais en les gens. Je croyais fondamentalement en la bonté humaine, même quand sa cruauté ou son horreur me flagellait. Même quand je me prenais des claques à chaque acte inhumain. Je voulais voir le meilleur des autres, et le jeune homme face à moi n'était pas mauvais. Je voulais le croire, de toutes mes forces.

« Eole » me présentais-je sous mon pseudonyme mutant.

Une autre façon de le faire réfléchir à mon pouvoir - et de rester anonyme. On m'avait dit de me méfier et je voulais suivre ce conseil. Cet inconnu ne m'inspirait aucune peur ou aucun dégoût, et je voulais juste l'aider. Je repris ma tasse pour en boire une gorgée, l'amertume cassée par le saccharose. Toute ma colère à l'idée que quelqu'un ai commis un délit face à moi s'était envolée. J'étais face à quelqu'un que je désirais aider, ou au moins comprendre. Mes prunelles sombres ne lâchaient plus le jeune homme, et je lui fis enfin un vrai sourire, comme pour l'encourager à me parler un peu. Il pouvait parfaitement se lever et s'en aller, je n'allais pas le pourchasser. Mais rencontrer de nouveaux mutants était toujours intéressant - connaître leurs vies, leurs pouvoirs, leurs personnalités, ce qu'ils faisaient de leurs dons, tout cela était primordial selon moi pour devenir quelqu'un de bien.


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MessageSujet: Re: In Between The Lines   In Between The Lines Icon_minitimeMar 15 Juil - 17:02


Les contrastes de la surprise qui sursaute par la coïncidence d’une pensée ne peuvent mériter autre chose que l’attention. Tout juste avait-il formulé le questionnement mental « L’avait-on prit sur le fait? » qu’une femme la harponnait du regard après l’avoir contournée nonchalamment, poussant l’audace jusqu’à commander son breuvage en incluant le sien sur sa facture à elle. Mais quel genre de personne faisait ça de manière tout à fait ordinaire? Ses cheveux bleutés collés sur le crâne par la pluie, restant immobile, dégoulinant, Elliot leva un sourcil en signe d’étonnement, fixant la nuque courte de la femme qui s’adressait à la serveuse. En se retournant vers lui, la scène sembla griser au ralentit.

Une nuque courte … Cette femme ! Il lui avait à peine frôlé l’épaule d’un marmonnement d’excuses imprécises et voilà qu’elle se retrouvait face à lui. Ses poings se serrèrent lentement, mais il n’eut d’autre choix que de conserver la rage d’orgueil d’avoir été pris la main au portefeuille. Elle avait quelque chose dans son regard lointain de verts nuancés aux parcelles presque lumineuses, mais ce n’était pas de la méchanceté, loin de là. Il ouvrit les paumes.

La jeunesse de ses traits s’apparentait probablement à la catégorie d’âge dont il était lui-même, s’attardant au contour fin et régulier de sa mâchoire féminine distinguant un faciès agréablement délicat. Elle avait une vingtaine de centimètre de moins que lui et pourtant, son regard soutenait le sien sans compromis laissant la question « Cela valait vraiment le coup ? » en suspens, ne voulant se résoudre à y répondre. Ses lèvres restèrent scellées.

La chaleur du café tranchait l’ambiance extérieur, illuminant les tables basses jusqu’au contour de bois sombre verni du comptoir. De vieilles lampes s’accrochaient paresseusement de manière aléatoire au plafond, diffusant une teinte orangée sur les objets épars typiques de ce genre d’endroit. Divers drapeaux italiens perçaient les murs tapissés. Un simple coup d’œil suffisait à catégoriser les lieux, mais par le temps macabre qui tonnait à l’extérieur, l’endroit le plus miteux aurait fait office de harem douillet. Elle l’invita à s’asseoir. Il se dit « pourquoi pas ».

Elliot finit par faire un mouvement pour défaire son veston trempé, frissonnant un peu en faisant glisser une manche. Sous ce dernier, il portait une simple chemise blanche insérée dans son jeans ceinturé. Les manches roulées laissaient transparaître les dessins gravés sur ses avant-bras, la pluie avait eu raison de son collet où la teinte plus sombre de blanc indiquait l’humidité affectant le tissu. Tout en accrochant son manteau sur un minuscule crochet près de l’entrée, les premières paroles qu’il laissa s’échapper s’adressaient à la serveuse.

« Un café. Noir le café. »

Sa voix en teintes de graves laissait suspendre une fluidité tout à fait perceptible. Se tournant vers la jeune femme, il l’observa un instant, déjà assise dans une petite banquette près de la fenêtre, mélangeant son café. Elliot tandis le bras pour se saisir du sien qui trainait déjà sur le comptoir et le fit glisser tout en prenant place devant elle dans un mouvement continu. Ses doigts passèrent sur ses yeux qui brûlaient doucement et il se saisit de la tasse en céramique pour siroter une gorgée qui immergea son œsophage de la chaleur du liquide. La sensation délectable lui détendit les épaules et il n’eut d’autres choix que de reposer son regard sur ce brin de femme qui avait eu le courage de l’interpeler tout bonnement. Deux inconnus totalement séparés l’un de l’autre et voilà que maintenant il n’y avait que cette table et deux cafés fumants vers le lampion mural.

Il la laissa parler en premier, encore douteux de ses intentions à son égard. Elle affirma même être « comme lui », mais qu’est-ce que cela signifiait exactement? Qu’avait-elle vu au juste? Pouvait-elle fragmenter la matière au même titre que lui? Il fronça les sourcils en l’écoutant, s’appuyant sur le dossier coussiné ne cessant d’observer ces yeux qui avait un quelque chose de quasi hypnotique.

Elle eut finit de prononcer toutes ces choses sans même le connaître. Elle se présenta même sous un unique nom dont il n’avait jamais entendu. Un instant, il crut qu’elle lui faisait la morale, à lui, mais il se retint de rire en se disant que c’était probablement la réaction ordinaire d’une personne ordinaire qui assistait au premier vol de sa vie. Une petite vague d’adrénaline avait définitivement ses résultats surprenants. Pourtant, il y avait quelque chose en elle qui n’émanait pas la platitude ordinaire. Cette Eole avait accroché son attention, il se frotta lentement le menton ponctué d’une pilosité de quelques jours et se pencha sur la table en s’approchant de son visage, plantant ses yeux foncés dans les siens.

« Je ne suis pas un imbécile et je ne veux pas de ton argent »

Sa main glissa sur la table où un vingt dollars flotta lorsqu’il la retira.

« Ce bout de papier me remplira l’estomac pendant quelques jours et ma conscience en sera tout à fait satisfaite parce que je sais que cette femme n’en a rien à foutre avec le salaire astronomique de son mari. Les temps sont durs et même si ce que tu as vu, peu importe ce que tu as vu, peut paraître loin de ta réalité, je n’ai rien à justifier à quiconque. Pas même à une belle inconnue qui joue les héroïnes. Et puis pourquoi tu m’as suivit dis-moi? »

Il se recula sur son côté de la banquette tournant un peu la tête pour regarder à l’extérieur, laissant la question dans l’air ambiante du café. Parmi les tracés sinueux des gouttes gravitaires contre la surface lisse de la vitre, Elliot s’exprima sur un ton beaucoup plus faible, à peine discernable.

« Tu ne peux pas être comme moi. Tu ne veux pas. »

Quand il se retourna vers elle, fixant ses lèvres qui s’étiraient délicatement dans un sourire, il remonta pour se noyer dans ses yeux, fenêtres de l’âme, et se rappela.

« Elliot. Eole c’est joli mais c’est faux pas vrai? Je te comprends. Moi non plus je ne dévoilerais pas mon nom au premier voleur que je croise sur ma route. Mais toi, tu n’as pas l’air d’une voleuse. »

Il tira un sourire à son tour, la tête légèrement penchée vers l’avant dans une expression presque moqueuse. Ses lèvres fines rejoignirent la tasse qui y déversa le liquide amère. Sans pouvoir mettre le doigt dessus, ce petit quelque chose qui le fascinait, il devait se lancer à sa poursuite. Un quelque chose entre les lignes.
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MessageSujet: Re: In Between The Lines   In Between The Lines Icon_minitimeMar 15 Juil - 17:46


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Mes cheveux courts dégouttaient doucement et j'y passais la main, fébrilement, pour en chasser les gouttes d'eau, perles translucides qui formaient comme des larmes transparentes sur ma peau, glissant dans mon cou sous le col de ma chemise sage. Je retirais paresseusement ma veste, pour dévoiler des vêtements simples - j'avais l'air de ce que j'étais, une institutrice, avec une jupe bleue, des collants noirs et des bottines. Rien d'exceptionnel. Rien comparé au jeune homme face à moi : au-delà de son visage aux traits réguliers et séduisants, son regard accrochait le mien comme des griffes. Je l'observais avec curiosité ; il avait l'air normal, rien d'hideux ou de monstrueux. Au contraire ; ses bras musclés étaient parés d'encre et de couleurs. Je clignais des paupières, lentement, admirant avec audace les circonvolutions d'encre sur sa chair. Mon regard remonta jusque son visage, sa pilosité récente, ses traits. Je n'avais pas un simple humain face à moi. Il m'écouta silencieusement, nos deux cafés offrant des arômes délectables à mes narines. Si je m'étais écouté, j'aurais commandé quelque chose de plus fort - pour me calmer un peu. J'avais toujours mon sens de la justice qui vibrait en moi, mais je le repoussais. L'homme face à moi avait sûrement de bonnes raisons de faire ce qu'il avait commis.

Sa voix résonna de nouveau, et à présent que j'étais concentrée sur elle, j'eus un petit frémissement. Il avait une voix assez grave et virile, mais c'était surtout la façon dont il parlait qui m'étonnait un peu, même si je m'y étais attendu. Il avait tout du mauvais garçon des rues. Je ne dis rien, alors qu'il continuait de parler. Alors comme ça, il avait besoin de voler pour vivre ? Quand il parla de repas, je fronçais les sourcils - avait-il tant besoin que ça de détrousser les gens ? Une inquiétude sincère pointa en moi. Je ne voulais pas qu'il ait des ennuis. Je ne voulais pas non plus qu'il meure de faim. Je soupirais un peu, reposais ma tasse de café et me mordillais un instant la lèvre inférieure, avant de répondre d'une voix douce à sa question :

« Je ne sais pas. »

C'était totalement vrai. J'aurais pu expliquer que j'avais voulu au début lui dire de rendre ce qu'il avait volé. Mais au fond, je n'étais pas venu pour ça. J'étais venu parce que j'avais été attirée par lui, par son pouvoir, par ce qu'il venait de faire, tel un papillon face à une flamme. Si il était capable de faire ce genre de choses avec n'importe quoi, il pouvait se révéler dangereux. Mais j'étais trop naïve pour le croire méchant - il était forcément bon. Ou au moins en avait-il des parcelles en lui. Il aurait pu partir, s'enfuir, mais il était resté. C'était déjà un grand pas, à mes yeux. Et puis je me sentis toute gênée d'avoir été qualifiée de belle inconnue. Je n'étais pas l'héroïne non, j'étais sûrement la comparse, la faire-valoir - où était la princesse ? Je ne le savais pas, mais ce n'était sûrement pas moi. Mieux valait sûrement effacer ce compliment qu'il avait dit par politesse. Ce n'était pas comme si j'étais réellement jolie.

Sa voix, rendue basse par le besoin de ne pas être entendus, me fit frémir de nouveau. J'avais l'impression de partager des secrets avec lui, et au fond, nous n'étions pas loin de cela. Qu'y a t-il de plus intime que de connaître l'être fondamental de quelqu'un ? Je le savais mutant - lui ne le savait pas encore, n'avait pas semblé comprendre. J'avais espéré qu'avec mon surnom, il fasse le rapprochement mais je m'étais fourvoyée. Non, je n'étais pas exactement comme lui. Mais nous avions plus en commun que beaucoup - nous avions dans nos chairs des génomes communs, qui nous liaient. J'étais attachée à lui par ce que j'étais. La musique continuait de couler comme les flots au-dehors, dans un bruit de fond agréable qui me berçait presque autant que les modulations sonores de mon compagnon.

Elliot. Je clignais des yeux avant de rougir furieusement, mes joues prenant une teinte délicate de rose soutenu. Je baissais mon regard, ne pouvant affronter ses yeux si francs. Il y avait quelque chose chez lui de droit, je le devinais, et je me mordillais les lèvres, gênée d'avoir été prise sur le fait. Je m'étais peut-être méfié du mauvais homme, et comme pour effacer cette erreur, je murmurais de nouveau d'une voix musicale et rendue rauque par l'embarras :

« Lucrecia. Je m'appelle Lucrecia. Mais je me fais surnommer Eole, car je sais faire ceci. »

Il n'avait pas eu l'air de comprendre. Je jetais un rapide coup d'oeil autour de moi et comme personne ne regardait, j'indiquais à Elliot de suivre mon regard : l'index pointé vers ma tasse de café, je créais un courant d'air qui sépara mon café, le fit voltiger un instant, puis une minuscule tornade sembla se libérer dans mon récipient avant de s'évanouir, comme si tout cela n'avait jamais existé, comme si ce souvenir gravé de quelques secondes n'était qu'éphémère. Toujours rougissante, je haussais les épaules, avec un coup d'oeil un peu amusé, l'air de dire : tu vois, je suis réellement comme toi.

« Je comprends le bien fondé de ce que vous avez fait : un peu comme Robin des Bois, vous volez aux riches pour vous servir de ce dont ils se fichent. » Je me sentais étroite d'esprit à tenter de lui faire la morale, mais il avait refusé mon argent, et je me sentais inquiète pour lui. Malgré moi, le réflexe du contact revint et je frôlais sa main de la mienne, le bout de mes doigts trouvant le dos de sa paume, la pulpe de mes doigts s'y attachant un instant, dans un contact quasi électrique. Je retirais ma main aussi rapidement que je l'avais touchée, réalisant ce que je venais de faire, ajoutant un degré à ma gêne. J'avais l'habitude de prendre la main de mes élèves quand je tentais de leur faire comprendre quelque chose, et j'avais bien failli faire de même ici - qui sait comment il pouvait réagir ? Je ne voulais pas lui faire peur ou paraître bizarre. Même si c'était sûrement déjà fait.

« Tout le monde doit manger. De quand date votre dernier repas, Elliot ? » demandais-je doucement.

J'avais l'impression d'être dans un de ces contes où un héros un peu roublard essayait de rouler dans la farine les méchants. Cette étiquette un peu chevalière, terriblement séduisante, était collée à la peau de mon vis-à-vis. Il y avait un je ne savais quoi d'excitant, à la voir, comme si il risquait à chaque instant de faire des choses inconcevables. Je bus une gorgée de café, pour mieux mettre de l'ordre dans mon esprit. J'étais calme d'apparence, mais intérieurement je bouillonnais. Mes joues restaient de ce rose soutenu, contrastant avec mon teint pâle. Je continuais à le vouvoyer, malgré qu'il me tutoie - le fait qu'il le fasse ne me gênait pas, mais pour une fois, je me sentais terriblement coincée de faire ce que la politesse m'obligeait habituellement. Est-ce qu'il me trouvait ennuyeuse, à parler comme une vieille ? Pourquoi est-ce que je trouvais ça important, la façon dont il me voyait, de toute façon ? Ma main droite remonta mon col sur mon cou, dans un réflexe défensif - je sentis mon corps se tendre, à l'idée qu'il ait pu deviner, mais c'était idiot. Ma cicatrice n'était pas visible ainsi, ma petite monstruosité. La raison pour laquelle je ne m'habillais pas comme les jeunes femmes de mon âge, de façon féminine et plus, disons, ouverte. J'avais honte de ce que j'étais, et de mes cicatrices. Mais je n'avais pas honte des autres - je n'avais pas honte d'Elliot. Je l'appréciais, au contraire, malgré que je vienne de le rencontrer. L'inconnu qu'il avait été avait disparu pour laisser place à un homme qui ne faisait qu'exciter ma curiosité.

« Est-ce que vous m'autorisez à vous poser d'autres questions ? Nous sommes à l'abri, et je suis prête à vous offrir le repas, ça me ferait plaisir. Si vous préférez, passons un marché : je paye nos consommations, et vous répondez à mes questions brûlantes de curiosité. Un bien pour un bien. Promis, je saurais quand m'arrêter, et vous avez parfaitement le droit de refuser de répondre. »

J'essayais de l'amener à parler de lui. J'espérais qu'il accepterait. Je voulais vraiment lui offrir un repas chaud - et puis javais faim moi aussi - et peut-être que ce marché lui semblerait plus profitable. Je ne faisais pas la charité - j'achetais ses secrets. Mais où était la Lucrecia prude qui aurait refusé de faire de telles choses ? Peut-être qu'elle s'était évanoui lors des premières gouttes de pluie. En tout cas, mon regard toujours ancré au sien, mes prunelles le dévisageant avec envie, je lui offris un nouveau petit sourire, les joues toujours aussi roses.


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MessageSujet: Re: In Between The Lines   In Between The Lines Icon_minitimeDim 20 Juil - 17:21


Dans l’écoulement momentané qui bercent les cœurs en pulsations, réside la chance approximative de l’arrivée d’un soubresaut de surprise qui percute, afflige et trébuche face à l’inconnu. L’inconnue qui déroute pendant que la suspension des particules infimes immobilise le temps et dépose délicatement son empreinte indélébile sur la scène d’un petit café italien, dans un quartier très moyen de New York. Non loin du bourdonnement humain et omniscient, Elliot se figea.

Son doigt fin à féminité marquée, pointant la masse liquide, les secondes se démantelaient partiellement au fil des respirations et la plus grosse tempête aurait fait valser ses ronronnements que le regard figé du jeune homme n’aurait quitté son point de mire. Ses pupilles cadencées, suivant l’infusion caféinée, ne distançaient aucune ondulation. La main sur sa tasse en porcelaine blanche se délesta lentement, les sourcils s’élevant dans un état de stupeur. Quelque chose monta en lui, une sensation de peur mélangée au compte-gouttes par la curiosité. L’étincelle qui sommeillait au creux de sa pupille s’éveilla doucement et lorsque le mouvement subtil tomba dans l’inertie, un coup de vent vint épouser la fenêtre immuable.

Lucrecia. Ainsi était son véritablement prénom. Pourquoi toi aussi? Pourquoi possédait-elle la même malédiction à son code génétique. Une affliction qui se cache sournoisement aux fins fonds de leurs êtres et qui s’imprègne de la moindre pulsion cardiaque, du moindre souffle, qui définit une existence scindée par l’amertume. N’était-il pas arrivé à cette conclusion qu’une étrangère au sourire aussi doux qu’un vent d’été venait lui chuchoter à l’oreille qu’il n’était pas le seul à porter son fardeau. Il s’imagina, le temps d’une inspiration, le repos le gagné subitement. Que la tension sur ses épaules se délestait à la chaleur du réconfort et de la brise d’un sourire vaporeux. Un sourire si délicat que ses doigts glissaient dans l’impuissance de le saisir.

Le jeune homme approcha son visage du sien comme pour scruter ses intentions les plus intimes, ses traits basculant entre l’incompréhension et le trouble. Elle frôla le dessus de sa main dans un frisson sous-jacent et le toucher eut pour effet de le tirer de sa contemplation mêlé au fil de ses pensées. Juste avant qu’elle ne regrette son geste, il saisit fermement le poignet de la jeune femme et le retourna doucement pour observer sa paume, ses pupilles valsant au creux de la chair, c’était comme s’il cherchait la source invisible d’un pouvoir inexplicable. Ce fut en fixant cette main délicate déposée au creux de la sienne qu’il ouvrit la bouche pour laisser filtrer ses paroles. Ses yeux verts s’ancrèrent à ceux de Lucrecia et sa voix sembla tomber dans un ton presque chuchoté.

« Qui es-tu ? Qui t’as posé sur mon chemin ? Tu… Tu ne peux pas. Les chances de croisé un mutant sont presque nulle. Je croyais que les membres de ma famille étaient les rares à en porter le fardeau et que… »

Il s’aperçut de l’inutilité de cette information qui ne suivait que le court de sa pensée et plissa les yeux en secouant légèrement la tête. Un sourire vint onduler à ses lèvres. Robin des bois n’est pas égoïste. Il ne vole pas pour son propre bénéfice. L’homme remarqua soudainement sa main tatouée qui gisait sous celle de la jeune femme et il referma avec précaution les doigts de celle-ci pour retirer les siens.

« Il y a quelque chose de précieux en toi qui me trouble vraiment et je ne saurais l’expliquer. Mais ne t’inquiète pas pour mon estomac, j’me débrouille très bien pour l’instant. »

Saisissant la simple preuve de gentillesse dont elle se prévalait, sa voix basse effleura la fumée montante de son breuvage. Il lui jeta un regard qui se voulait amusé et ponctua sa phrase d’un simple : « Merci. » Le fait d’avoir trouvé cette femme qui pouvait comprendre une partie de ce qu’il devait cacher à répétition dans ce monde d’entraves, lui posait un léger baume. Le collet de sa chemise blanche semblait s’assécher peu à peu, levant la main pour venir secouer cette dernière. La proposition qu’elle lui fit ensuite le fit sourciller par l’audace qu’elle affichait ouvertement. Elliot se gratta faiblement derrière l’oreille et soutint son regard en forgeant le sien d’une attitude pensive. Il n’y avait rien qu’il demandait plus qu’un truc à se mettre sous la dent et la voix suave de cette Lucrecia lui rappela ce détail fâcheux.

« Tu veux me faire regretter de ne pas t’avoir croisé avant? À une seule condition : tu me lâche avec cette politesse forcée de petite ville et je répondrai à tes questions. Tu as de l’audace tu sais ? J’aime ça. »

Il leva le bras en affichant un sourire franc pour inviter la serveuse à s’approcher et ce, même avant que sa comparse ne puisse avoir la chance d’acquiescer. Ses lèvres rejoignirent encore une fois le breuvage qui refroidissait et ses gorgées s’espacèrent pour ingérer la totalité du liquide. De sa main droite, il fouilla la poche avant de son jeans et déposa un petit paquet de cigarettes sur le vingt dollar qui traînait toujours là. Il lui fit signe du regard en l’interrogeant et se repoussa vers la fenêtre pour s’appuyer sur celle-ci, un peu distrait par la faim.

Le jeune homme se surprit à fixer la femme qui se tenait de son côté de la banquette et il détourna le regard avec un petit sourire. Peut-être qu’il la gênait avec ses manières non-calculées. Il remarqua ce rose aérien effleurant ses joues et ne put se soustraire au charme qui émanait de ce visage. La politesse après tout, servait d’intermédiaire au respect pensa-t-il en ravisant maladroitement sa posture. Eole? Oui. Ça lui allait à merveille.
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MessageSujet: Re: In Between The Lines   In Between The Lines Icon_minitimeDim 20 Juil - 18:48


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The Sound of Silence by Simon & Garfunkel on Grooveshark

J’étais heureuse. Il ne s’était pas enfui en courant. J’avais lu la surprise, l’attention dans ses yeux si sombres. Une lueur, quelque chose d’aussi diffus qu’une goutte noire dans un verre d’eau. Il avait été attiré par les ondoiements de mon don, fasciné par les torsades d’air que mon doigt soulevait. J'étais aérienne, audacieuse et douce comme une brise d'été venant s'insérer dans un coeur battu par la moiteur étouffante et caniculaire. Mais en cet instant, j'étais surtout contrite. Instant tranché. Ma main est restée entre ses doigts fermes. Il a une poigne masculine, et sans me faire mal, il me retient et retourne ma main. Il semble y chercher un trésor. Ce n'est qu'une main. Avec sa chair, sa peau, ses ongles couvert de vernis nacré. Mais quelque chose était là, en plus. Le contact du jeune homme. L'épiderme d'Elliot. Il enflamme cette intimité étrange, il exalte mes sensations physiques, n'arrangeant rien aux rougeurs qui contaminent mes joues. Il réagit comme un enfant, espérant trouver dans les rides de mes paumes l'origine de mon don. C'est ancré plus profond - chez moi, chez lui. Un lien invisible qui nous retient. Qui me retient à lui, ici, à apprécier honteusement le contact de ses doigts avec ma peau sensible.

Il trouve mes yeux. Il semble avoir une facilité déconcertante à accrocher son regard si sombre et fascinant au mien. Mon coeur s'emballe plus fort au fur et à mesure de ses demi-mots. Les froissements de ses lèvres percutent ses dents, l'espace entre nous. Je bois ses paroles, les yeux un peu écarquillés par l'attention qu'il fait naître chez moi. Secret entamé, à peine dévoilé qu'il se tait. J'ai envie d'en savoir plus, d'entendre encore le timbre chaud de sa voix qui fait résonner ses trilles masculines en moi. Il a trop de conséquences sur moi. Elliot semble produire des réactions dans tout mon être, qui se répercutent non pas comme une raz-de-marée mais une tempête. Je suis aérienne, jusqu'au bout de mes longs cils qui cillent dans sa direction. Il retire sa main. Sensation de vide, de creux. Je fronce un peu les sourcils, quelques secondes. Devinette sans réponse, que je repousse au fond de mon cerveau. Que m'a t-il fait exactement, pour m'ensorceler à ce point ? Je me coupe de mes sensations, pour mon propre bien.

Mais ses paroles font office de catalyseur. De précieux ? Comment ça ? Comment dois-je le prendre ? Je bégaye, me tais, bois une gorgée de café. Mes mots s'entrechoquent en moi comme un ouragan psychique. Je baisse les yeux, ne pouvant soutenir son regard, ses propos. Je me sens idiote. Pourquoi est-ce que je me conduisais comme une adolescente ? J'étais adulte. Et pourtant, me voilà rougissante comme une midinette. Je bois encore un peu du liquide amer, qui fait naître une chaleur tendre dans mon estomac et mon corps tout entier. La pluie me berce, mais je n'ai d'yeux que pour lui. Il me captive, de par son étrange façon d'être, si différente de la mienne. Il m'émerveille, et m'éblouit. Troublée et perdue, je cherche le réconfort rassurant dans une tasse de porcelaine délicate. Je commande une crêpe, avec l'impression d'être une goinfre. Mais je n'ai pas mangé et au diable mon caractère ampoulé.

Mots ardents qui s'insèrent en moi comme des braises. Je rougis encore plus et essaye de m'expliquer, de lui dire que je n'étais pas cette fille, d'habitude. Il faisait éclore en moi une fulgurance. Moi si timide, me voilà à tenter de soudoyer pour ses secrets, contre une crêpe.

« Non, non je n'ai pas d'audace. C'est juste que vous ... Que tu fais naître ce besoin impérieux de te connaître. Je suis habituée à vouvoyer les gens, ça me vient naturellement ... Désolée. » Je m'excuse d'un air un peu enfantin, en passant mon ongle sur ma joue de l'index. Il sourit, vivant, proche, masculin. Masculinement viril et séduisant. Il me fait l'effet d'un félin. Il y a quelque chose de gracile en lui, d'hypnotique. Je m'empourpre comme une gamine. Mais je continue. Je le veux. Je le dois. J'inspire, et mon regard devient ferme, volontaire. D'où me vient ce soudain courage, ce regain d'énergie ? Je ne le sais. Nul besoin de le savoir. J'en avais juste besoin. Mes prunelles de noisette parsemée de vert tranchent dans celles si sombres du jeune homme. Ses cheveux sont d'un noir bleutés, humides de pluie. Il a l'air un peu sauvage, mais je ne suis pas intimidée. Pourtant il est grand, il est facile de deviner sa force - je me souviens de sa main ferme autour de la mienne, emprisonnant mes doigts, et j'ai un frisson. Résurgence bouleversante. Parle, tu réfléchiras moins.

« Je vais vous ... Te poser quelques questions alors. » J'émets un petit rire gêné quand je fais l'effort de le tutoyer. C'est étrange, saisissant. Ce simple changement me conforte dans une intimité que je n'avais pas désirée et qui me semble soudain confortable. Chez moi, je tutoie les gens qui me sont proches - cela fait d'Elliot quelqu'un de familier. C'est déroutant. « Tu sais, nous ne sommes pas seuls. Personne ne m'a posé sur ton chemin. Nous sommes tellement plus nombreux que ce que nous croyons ... » Je répond à ses paroles de tout à l'heure - Lucre, ce n'est pas une question ça. Quand il a trébuché sur son passé et s'est relevé rapidement. Je songe à l'interroger là-dessus puis enferme cette songerie dans une boîte, à double tour. Mon but n'est pas de le mettre mal à l'aise ou de lui extorquer des secrets. Je veux qu'il se confie. Je veux qu'on en vienne à se connaître. « Mon père était comme nous. Il ... Il avait un don avec les plantes. Je ne croyais pas non plus, à mon arrivée à New-York, que d'autres que moi existaient. Je n'en avais jamais vu. Mais ... Non, nous ne sommes pas seuls. Et je suis enchantée de vous .. De t'avoir trouvé, Elliot. »

Ce prénom que je prononce en fin de phrase comme un sortilège, c'est mon petit cadeau, pour moi. Son prénom roule sur ma langue, comme une bille, se glissant entre mes lèvres pour éclater dans l'air. Je souris toujours, toujours troublée. Je refuse la cigarette - je ne fume pas. Mais lui peut, si il a envie. Cela ne me gêne pas.

« Et me voilà en train de parler de moi plutôt que de te questionner. C'est tout moi. » Je rougis doucement, en passant ma langue sur mes lèvres dans un mouvement élégant et involontaire. « Est-ce que tu ... Est-ce que tu utilises souvent cette technique pour voler les gens ? Est-ce que tu ne vis que de ça ? » Pas de pitié dans ma voix. Ni pardon ni réprimande. Juste un besoin de savoir, implacable comme la mort. Comme la vie. « Ah oui, aussi, est-ce que tu es seul ? »

Je voulais dire, en général. Mais alors que les mots se glissent hors de moi, je prend conscience du double sens de mes propos. Si j'avais auparavant rougi, mes joues deviennent cramoisi, et je remue mes mains, manquant de faire tomber nos tasse. Je rattrape in extremis le récipient de porcelaine et me tais, toute penaude. Je ne voulais pas parler de couple, de célibat, ce genre de choses. Mais une petite voix en moi se permet d'interrompre mon discours que je prépare pour m'excuser : après tout, si il le prend comme ça, autant recevoir l'information. Des effluves sucrés sortent des cuisines et je saute sur l'occasion de divertir mon esprit en analysant les odeurs. Mais je n'y arrive pas. Je suis totalement hypnotisée par Elliot.

« Désolée, je voulais dire ... C'était ... Bref. » Une vraie enfante. Je me gratte la joue encore, y formant une petite trace rouge, comme une virgule, preuve de mon embarras. « Depuis combien de temps ... ? » je tente pour me tirer de ce mauvais pas. Son pouvoir - depuis combien de temps le sait-il, l'a t-il, l'utilise t-il. Je n'utilise pas le mot. Pas besoin. J'espère que la serveuse va bientôt nous apporter nos plats. Je m'enfonce doucement dans mes propres questions, dans mes pensées bizarres et mes bégaiements. Il doit me prendre pour une folle. Habituellement, je parlerais, tête en l'air et maladroitement, pour essayer de me remettre sur les rails de la conversation. Mais encore une fois, ici, rien n'est normal. A croire que Elliot fausse toutes les probabilités. Je lui jette un regard, timide, et je me sens attendrie. On est encore un peu humides, et j'ai envie de rire de cette situation si grotesque. J'émets un petit rire que je cache derrière ma main, comme pour le retenir contre moi. Je toussote, gênée, mais l'amusement se peint sur mon visage - c'est toujours mieux que la gêne, me direz-vous.



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MessageSujet: Re: In Between The Lines   In Between The Lines Icon_minitimeVen 25 Juil - 4:51


Glycerine by Bush on Grooveshark


Les soupirs qui s’éveillent aux silences immuables d’une fragilité de façade. Et puis, cette Lucrecia qui semblait se restreindre à une pensée aux effluves rougissants, un voile filamenté comme l’aura d’un écho merveilleux. L’homme appuyé sur le coin de la table l’observait, elle. Chacun de ses traits qui semblaient flotter et se perdre dans la lumière dorée. Il y avait bien ce détail mystérieux qui ne cessait de fuir le toucher de ses yeux, qui gravissait la moindre parcelle de cet iris clair comme le jade dilué. S’y n’était-il déjà plongé sans y revenir? Le souvenir opaque d’un champ d’avoine balayant paresseusement l’horizon. La chaleur gonflant l’estomac sans remords. Un doux sourire aux capsules de réconforts qui nous détache éperdument de la réalité dure et ferme. Sa main joignit le paquet de Marlboro aux jointures rouges effilées.

Le morceau rectangulaire de carton légèrement froissé s’ouvrit de la poussée volontaire du pouce. Son autre main s’éleva pour venir relever, dans un mouvement particulièrement souple et lent, un tube garni de tabac en tournant le cylindre du pouce et du majeur. Le filtre épousa les lèvres fines du jeune homme occupé à tirer un zippo au revêtement chromatique usé par une multitude de rayures. La flamme crépita de son étincelle froissée et la chaleur appliqua sa braise au papier qui fuma doucement vers la tapisserie jaunit du plafond. Elliot ferma les yeux pendant une demie seconde, laissant tranquillement le flot régulier pénétrer ses poumons. Sa paume droite vint repousser les mèches bleutés de son front, poursuivant le mouvement sur sa tempe jusqu’au-dessus de son oreille. Il dégagea un peu ses épaules en écoutant la commande de sa rencontre. Levant les yeux vers la serveuse un brin blasée, il marmonna une assiette avec des œufs, du pain et du ketchup. Son oreille se tandis à la voix mielleuse de cette charmante inconnue, jouant du bout des doigts avec le vieux briquet presque vide. Plusieurs pouvaient penser que son attitude évoquait la froideur et la distance, mais il ne manquait pas le moindre geste de cette femme. Elle avait un caractère, une attitude totalement différente de la sienne mais pourtant cette chose qui sommeil au fond du cœur elle l’avait aussi. Il y avait comme une fragrance mystifiante à savoir que la jeune femme camouflait ses propres secrets. Ce pouvoir en premier.

Lorsqu’elle vint à lui parler sur un ton qui glissait à ses oreilles comme le cours d’une brise enivrante, il ne put s’empêcher de remarquer ce doux malaise qui la gagnait en tentant de le tutoyer. Elliot sourit intérieurement et inhala une vapeur de nicotine avant de lui accrocher un regard rassurant.

« Ne t’en fait pas Lucrecia. Tu peux te détendre je ne vais pas te manger toute crue. Heum… Ou bien te voler quoi que ce soit. »

Prononçant son prénom pour la première fois, la sensation sonnait un quelque chose d’étrange sur sa langue. Il se sentit un peu maladroit avec ces mots qui ne voulaient absolument rien dire. Il n’était définitivement pas fait pour ce genre d’adresse hospitalière et encore moins aux rencontres incongrues.

Ses yeux se levèrent et un sourire semi-moqueur émergea sur son expression désemparée. Il expira un nuage vaporeux en tournant la tête avant de laisser filtrer ses propres paroles.

« Mon père aussi avait un quelque chose en lui. Je ne l’ai pas connu, mais on m’a raconté. Ne t’inquiète pas, il y a de ces étrangetés qui courent dans cette ville, mais à force d’entendre ces conneries à la télé, on finit par croire que ce ne sont que des rumeurs. Tout le monde essai de caché ce qu’il est, mutant ou non. Et puis chacun doit survivre comme il peut dans cette foutue jungle. »

Il lui tira un clin d’œil en s’appuyant sur le coussin de la banquette, déposant le morceau métallique près du paquet de cigarette. Son ton se raffermit, laissant transparaître une certaine amertume.

« Mais parfois j’ai l’impression de transporter une bombe à retardement… C’est peut-être qu’une impression après tout… »

Ses sourcils se levèrent dans une expression amusée d’impuissance, levant une main en secouant un peu les doigts. Il la déposa sur le bois verni de la table, tout près de sa tasse de café vide, paume vers le haut. S’approchant ainsi d’elle en se penchant sur la table, son visage était à une trentaine de centimètres du sien, mais ses yeux fixaient sa propre paume lorsqu’il continua, baissant le volume d’un cran.

« Tu vois, ce pouvoir qui parcours mes veines, il peut jaillir n’importe quand, sous le coup de la colère par exemple. J’ai l’impression de rien contrôler parfois. Je pourrais blesser n’importe qui n’importe quand par le simple toucher de mes doigts. Alors j’évite autant que possible de fréquenter qui que ce soit… Si c’est ce que tu voulais dire par « seul ». Oui je le suis. »

La serveuse inséra leurs assiettes devant eux, sans même s’excuser de les éloigner de cette certaine proximité qui s’était finement installée. Elle une crêpe, lui des œufs totalement détruits à coup de spatule. Le regard sur son assiette, il agrandit légèrement les yeux, puis fixa Lucrecia pour revenir immédiatement au plat fumant. Un faible remerciement bredouillé s’extirpa de ses dents et il empoigna sa cuillère pour mélanger avec vivacité ses œufs avec la mare carminée du ketchup, laissant une trace rouge-orangée au fond de son assiette. Se penchant sur la table comme un prisonnier devant son dernier repas, il enfourna la nourriture à plusieurs reprises avant de se souvenir de la présence de la jeune femme qui se trouvait toujours devant lui. La bouche pleine et un peu de ketchup sur son menton picoté, il s’adressa à elle de nouveau, revenant sur le sujet.

« Je… mmfh… J’essaye de voler le moins souvent sinon j’arrondis les mois en faisant du courrier à vélo à travers la ville. Ça paie bien, mais j’suis sur appel donc c’est pas toujours sûr. Ça me suffit à payer le loyer de mon appartement à quelques rues d’ici. Modeste. Vivable. »

Il pointa son assiette, s’excusant de s’être jeté sur son couvert aussi rapidement. Sa fourchette s’agita lorsqu’il se redressât un peu pour garder ce peu d’étiquette. Il était en présence d’une femme qui semblait venir d’un peu plus haut dans la société que lui et rien ne lui disait qu’il pouvait la choquer avec ses manières. En s’éclaircissant la gorge, il l’interrogea en levant un sourcil.

« Et toi? Tu viens d’où? Qu’est-ce que… Tu faisais dans les parages? »

Se maudissant intérieurement pour son incompétente maladresse de ceux qui cherchent à l’improviste à faire rebondir une conversation. Il n’avait pas l’habitude de se laisser désemparer, mais la présence féminine provoquait chez lui une chose étrange. Peut-être était-ce dû au fait qu’il subsistait cette complicité de pouvoir? Un trait commun qui se démarquait d’entre tous? La scène frappa Elliot : ils étaient si loin et si proche à la fois. Comment ?
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MessageSujet: Re: In Between The Lines   In Between The Lines Icon_minitimeMer 17 Sep - 11:12


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Avec fascination, je l'observais former sa cigarette. Ses mouvements étaient fluides, conditionnés à cette habitude. Vice aux lèvres, une flamme vint allumer le cylindre de tabac, offrant des effluves âcres l'espace d'un instant. Je me surprenais à le questionner de toute la force de mon âme ; il attisait une réelle curiosité en moi, et bien plus que cela, même. Il allumait une lueur dans tout mon être, moi qui n'était faite que de vent, je me découvrais également une étincelle flamboyante. J'avais presque peur de cette constatation ; n'étais-ce pas dangereux, dans le fond ? Il perçait des illusions. Il envoûtait de sa voix. Sorcier aux allures ensorcelantes. Mutant, différent, de cette contradiction humaine, et pourtant ancré dans l'humanité. Ses mots semblaient passer à travers tout mon être ; je me contentais de hocher la tête. Je n'avais nullement peur qu'il me fasse du mal. Je n'en étais plus effrayée, à présent. J'étais convaincue que, malgré la puissance de ce pouvoir que je supposais, il n'était pas méchant. Il était, après tout, en train de discuter avec moi, non ? Il ne pouvait être un mauvais bougre. J'en étais convaincue - je refusais de voir en lui un ennemi de ma personne.

De ses propos, j'en ressortais une émotion cristalline et fragile : ce jeune homme survivait par lui-même, et il avait appris à ne faire confiance qu'à lui. Qu'avait-il pu vivre pour avoir de telles paroles ? J'avais envie de le prendre dans mes bras, à la façon de mes élèves lorsqu'ils vont mal. Mon âme vibrait en écho de ses mots. Il avait l'air de souffrir. Inspirant de nouveau, je lui souris, non pas bravement pour faire un sourire, mais de façon naturelle - parce que c'était là une de mes forces, que de sourire. Quand j'allais mal, quand les autres allaient mal. Le sourire était une puissance que beaucoup avaient oubliés.

« Je suis certaine que, malgré cette ... bombe ... Vous savez parfaitement ne pas exploser. » C'était si maladroit. Je me mordillais la lèvre et repris pour m'expliquer, pour ne pas le laisser dans le flou d'un discours malhabile. « Je veux dire ... Vous savez vous maîtriser, vous. Lorsque certaines émotions sont trop fortes, mon ... don ... Décide de n'en faire qu'à sa tête ... Ce serait plutôt moi la bombe, ici ... » fis-je d'une petite voix douce et un peu penaude, sans me rendre compte du double-sens de mes propos. Si je m'en étais aperçue, j'aurais rougi comme la vierge effarouchée que j'étais.

Pourquoi en étais-je à parler de mon impuissance à contrôler mon don ? Parce que Elliot - un si joli prénom, vraiment - formait cela chez moi. L'envie de me découvrir, et d'écarter son voile à lui. Le besoin d'en apercevoir plus sur son être. Alors, quand il se mit à parler plus en profondeur, je portais mon regard sur lui, troublée. Mes prunelles s'enfoncèrent dans les siennes comme une main en attrape une autre, au bord du vide, et j'écoutais. Alors ... Alors lui aussi, il ne contrôlait rien ? La solitude qui sinuait dans sa voix me donnait envie de pleurer à chaudes larmes. Et comme pour couper net à ses paroles, je pris de nouveau sa main dans la mienne, l'air effronté. Que m'arrivait-il exactement, pour oser un nouveau contact ? Chaleur. Humanité. Je serrais ses doigts dans les miens, le défiant du regard de retirer sa main. « Nous sommes ce que nous sommes. Nous apprenons, petit à petit, à nous maîtriser. Parfois, on le fait seul, et parfois, certains nous poussent hors de nos retranchements pour mieux nous aider. Je n'ai pas peur de votre pouvoir. Je n'ai pas peur que vous me fassiez du mal. Parce que je sens bien que vous êtes quelqu'un ... » d'adorable ? Non. Mauvais choix. J'eus un petit sourire et repris d'une voix caressante : « quelqu'un de bien. Vous survivez comme vous le pouvez. Ce n'est pas une tare. Mais survivre uniquement, ce n'est pas vivre, vous ne croyez pas ? »

Je décollais de nouveau ma main de la sienne, à la fin de ma diatribe, comme à contrecoeur. J'appréciais son contact - il y avait quelque chose de viril, de masculin dans ce simple toucher qui me donnait des papillons dans le ventre. Il me troublait, tout son être me bouleversait ; si j'avais été un lac, j'aurais été parcourue de rides et d'ondines, à ne plus savoir quoi en faire. Je sentais encore dans mes doigts le picotement du contact, comme une résurgence divine, un souvenir fugace. Il fallait que je me rende à l'évidence - cet homme créait des émotions étranges chez moi. Je me concentrais sur ce qu'il disait - alors comme ça, il était coursier à vélo ? Je trouvais ça adorable. A son apparence, les gens l'auraient plutôt jugé dealer, ou ce genre de choses, avec ses cheveux bleus et son air distant. Je remarquais qu'il avait fini son assiette, avalé la nourriture en deux temps trois mouvements ; je secouais la tête, prouvant qu'il n'avait nul besoin de s'excuser. Je pris le temps de manger ma crêpe, en écoutant sa question. Amenant une bouchée à mes lèvres, je mâchouillais l'aliment sucré en réfléchissant à quoi dire.

« Je suis née à la campagne ; mon père était fermier. Il était phytokynésiste. Mais j'ai quitté ma ferme natale après sa mort ; je suis venue à New-York pour enseigner. J'étais venue faire quelques courses, dans le coin, quand je t'ai vu dérober ce que l'on sait à la jeune femme. Je ne voulais pas laisser cela impuni, mais au fond, j'avais également deviné ce que l'on partageait. Ca a réveillé quelque chose en moi ... Je ne suis pas aussi téméraire ou insouciante, habituellement ... » fis-je en rougissant, passant ma soudaine timidité sur ma crêpe, à coups de fourchettes maladroits.

J'avais envie de lui poser mille et une questions. Il était seul, donc. Le pauvre. Je voulais lui proposer que l'on se voit plus souvent - mais comment pouvait-il prendre cette proposition ? D'un autre côté, je me fichais totalement de comment il pouvait la prendre. Je voulais le revoir. De cette envie implacable, que rien ne pourrait balayer. Et, pour être tout à fait franche, il me plaisait bien - c'était un jeune homme sympathique, emmêlé comme moi dans les fils de l'écheveau de sa mutation. Et je ne pouvais nier qu'il avait une espèce de charme, qui nouait mon estomac. Je passais ma main dans mon cou, tout proche de ma cicatrice. Bizarrement, avoir remué quelques souvenirs du passé avait pour le moment évité de me faire penser à ma mère. Si j'étais capable de haine, c'était bien envers sa personne à elle. Mais je ne souhaitais pas y songer.

« Est-ce que je suis la première mutante que tu rencontres ? Ou en as-tu déjà croisé d'autres ? » murmurais-je à voix basse en me penchant vers lui - et en recréant cette bulle illusoire d'intimité. Nos visages étaient proches, et j'appréciais cela, sans trop savoir pourquoi. Je pouvais observer ses prunelles luisantes, sa peau pâle, traversée ici et là de quelques veinules bleues ; je pouvais observer ses traits, les plis de sa bouche, sentir l'odeur de pluie qui s'effaçait autour de nous. Si je n'avais pas été aussi concentrée sur lui, sur ce que nous allions dire, je me serais posé des questions sur bien des choses.


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