♣ J'ai quitté la maison aujourd'hui. C'était invivable. Cette cave, ce noir complet. J'en étais malade. Je ne comprenais pas leur crainte... Leur peur de me montrer aux autres. J'avais dû arrêter les études à cause de cela, ou plutôt, on m'avait forcé à les arrêter.
J'ai dû me crever à la tâche pour sortir de là, le béton était solide, j'eus beaucoup de mal à percer le sol et à me frayer un chemin. Mon père me donnait de temps en temps à manger, son regard triste ne me faisait plus rien, je m'y étais habituée. Je lui avais fait beaucoup de mal à l'autre, cette garce qui levait constamment la main sur moi. Mes notes étaient pourtant excellentes, mais depuis ce beau jour, celui où je l'ai tué, tout est différent. Tout le monde m'a abandonné, plus personne ne me regarde. Je suis oubliée, perdu dans ce fond de cave, à attendre que le temps coule, sans l'ombre d'une petite lumière. Peut être cette fenêtre que je n'arrive pas à atteindre.
Mais l'éclat de la lune m'a brûlé les yeux, depuis combien de temps étais-je enfermée ? Des mois ? Je ne sais plus, j'ai perdu toute notion du temps. Mes mains ne sont pas recouvertes, je dois trouver quelque chose pour les cacher de ces regards. Je n'en peux plus de marcher... Ce banc dans le parc serait tellement plus agréable que ce lit de paille qui m'a servi pour dormir.

♣ Mais ce soir là, j'ai choisis autre chose, bien cacher dans un buisson. Le lendemain, je me souviens très bien que je n'étais pas à l'aise, j'avais le dos en miette. J'étais piétrement vêtu. Une peur de me glisser dehors. Les gens marchaient sans savoir que j'étais là. Devais-je attendre le meilleur moment pour sortir ? Je ne voulais pas me demander où je devais aller, j'avais la conviction que je trouverais un bien meilleur endroit pour y sombrer. Je voulais me mettre dans la tête que je m'en sortirais déjà mieux dehors, j'avais quelques connaissances et je n'avais pas peur... Mais l'avenir n'avait plus grande importance pour moi... Que pouvais-je faire maintenant comme métier ? Je n'avais plus grand chose sur moi, seulement des habits. Si seulement je n'avais pas été si bête et que je n'avais pas quitté la maison de cette façon... Mais c'était mieux... Mieux pour moi, pour lui. Que je disparaisse.

♣ Je n'avais jamais songé voler quoique se soit, j'étais plutôt bien éduquée... Mais là, dans mon état, avec cet estomac qui menaçait de céder...

♣ J'ai finalement trouvé refuge chez un inconnu. Acte stupide. Mais il m'avait si bien accueillis... Plutôt crevé de rester encore quelques jours dans la rue. Je ne savais vraiment pas où aller. J'étais si lamentable. Sans rien. Vulnérable. Cette idée me donnait vraiment envi de gerber. L'homme en question ne me fit absolument rien, mais je compris bien assez tôt que ses intentions étaient tout autre. Des attentions mauvaises, que j'acceptais toutefois... Les humains. Je pensais avoir fait parti de l'un d'eux...