Elle avait mal. C'était comme si elle venait de recevoir une décharge électrique et que son corps était temporairement paralysé; comme si on lui avait fait voir une lumière si vive qu'un instant, ses yeux ne voyaient plus, mais cette fois-ci, c'était son cerveau qui ne marchait plus. Elle secoua de la tête et instanément, ses pensées se remirent en marche. Qui était donc la jeune femme qui venait de "l'agresser"? Elle le saurait bien assez tôt.

- Ça va aller. Ça va être assez dur pour toi d'absorber toutes ces informations.

Elle essayait de cligner des yeux mais à son plus grand désespoir, se rendit compte qu'elle ne pouvait plus bouger. Allait-elle donc mourir? Le regard vide, elle voyait des images aléatoires défiler dans sa tête. Non. Pas des images. Des souvenirs. Elle se souvenait de l'Institut Xavier, aussi flamboyant et neuf qu'il était. Elle se souvenait de New York, 40 ans dans le futur, un futur où les mutants étaient craints et aggressés, où elle s'était retrouvée par voyage temporel complexe et où elle serait coincée pendant plusieurs années avant de retrouver une issue vers le présent; vers les années 1960. Elle se rappellait de la trahison d'un des leurs et des pouvoirs phénoménaux de certains de ses futurs "camarades", tels que Jean Grey. Elle se rappellait de la première fois où elle avait rencontré James Madrox, et du jour où ils allaient se marier. Bien sûr, toutes ces informations provenaient d'un futur bien distinct, ce qui voulait dire qu'elles pouvaient être modifiées au cours du temps... Non: elle ne s'en souvenait pas: elle les voyait. Elle voyait l'avenir. Mais comment étais-ce possible? Tant de questions lui venaient à l'esprit, et la première qu'elle eut la présence d'esprit de demander fut la suivante.

- ... Ugh... Que me fais-tu?

À présent, le monde actuel était revenu autour d'elle. Elle avait à nouveau seize ans, elle était à nouveau à l'orphelinat, et une femme qui lui ressemblait énormément (hormis le fait que son oeil droit avait une gigantesque balafre en forme de M sur l'oeil droit) venait de la piquer avec une étrange boite métallique. Venait-elle donc du futur?

- Tout ce qui m'est arrivé dans ma vie, plus toutes les informations que j'ai pu récolter à propos des quatre vingt prochaines années. Énormément d'informations; beaucoup trop d'informations à absorber, en réalité. C'est pour cela que nous aurons des trous dans notre mémoire à certains moments.

Elle était encore prise de vertiges: effectivement, c'était beaucoup d'informations; plus que nécessaire en vérité. Du moins, c'était ce qu'elle pensait, car jamais Layla Miller n'aurait rêvé de la vie folle et remplie d'aventure qui l'attendait dans quelques jours. Depuis le moment où l'inconnue lui avait injecté tout son savoir, son destin avait été scellé à tout jamais.

- Nous?! Mais... Qui es-tu, exactement?

Celle-ci sembla hésiter avant de se mordre la lèvre et de vérifier les alentours (on ne sait jamais si des petits curieux roderaient dans le coin). Puis, Layla Miller décida qu'elle pouvait faire confiance à Layla Miller, et lui dit donc d'une voix calme et pourtant sérieuse:

- Je suis toi. Ou plutôt, tu es moi. C'est la même chose à vrai dire. Dans quelques années, tu auras vécu tout ce que moi j'ai vécu. Moi, Layla Alice Miller, je te décrète que ta vie ne sera pas tout le temps heureuse, mais tu parviendras à te trouver des amis. Sois toujours du bon côté de la guerre, et surtout, ne révèle jamais à personne comment tu as reçu ces informations sur l'avenir. C'est important. Très important.

Layla entendit un oiseau au dessus de sa tête et leva un instant les yeux au ciel. Lorsqu'elle les rabaissa, la Layla adulte avait disparu, ne laissant derrière elle qu'un morceau de papier avec noté dessus une adresse... C'était à New York, qui plus est. Encore destabilisée, Layla se parla à voix haute, comme elle le faisait en ces circonstances là, pour se calmer un peu:

- Tout va parfaiiiitement bien, je viens de me rencontrer sauf que je venais du futur et je viens de m'injecter le savoir de tout ce qui allait m'arriver et arriver à mes proches pour les quatre vingt prochaines années. Une journée ordinaire, en somme. Ouais, rien de plus banal que ça...

Il faut absolument que je retrouve Layla... Enfin, que je me retrouve moi... Enfin, que je revoie cette même version future de moi, parceque toute cette histoire est juste trop étrange pour que je puisse la comprendre! Suis-je devenue dingue? Je savais que cet orphelinat minable n'était pas pour moi! Et merde!

Frustrée, elle posa ses yeux sur le papier qu'elle tenait entre les mains. Et si c'était ça, la réponse? Si son autre elle se trouvait là bas? Serait-ce possible? Il n'y avait qu'un seul moyen de le savoir. Sans même prévenir qui que ce soit, sans même prendre le peu de possessions qu'elle avait, Layla Miller grimpa par dessus la barrière de l'orphelinat et se mit en route pour l'Institut Xavier, un lieu ou elle resterait aussi longtemps qu'il le faudra.

Elle se retrouva ainsi devant un somptueux manoir, rendu innaccessible par de hautes grilles de fer. Rien de bien difficile en somme. C'était exactement pareil qu'à l'orphelinat: il lui sufissait de grimper par dessus et le tour était joué. Et c'est ce que Layla fit: coûte que coûte, elle devait percer ce mystère.

Arrivée devant la porte d'entrée du batiment, elle s'apprêtait à entrer discrètement lorsqu'une forte voix résonna dans sa tête:

- Qui es-tu et comment as-tu trouvé ce lieu? Parles.

Bien qu'elle l'ignorait encore, il s'agissait du génialissime Charles Xavier, le télépathe le plus puissant de la planète. Au départ effrayée, Layla reprit ses esprits et afficha un air entièrement calme, presque enjoué. Réflechissant à quelque chose qu'elle pourrait dire, elle se rappellait du futur. "Je sais des choses... Je sais des choses..." C'était donc ça, sa phrase fétiche.

- Je suis Layla Miller. Je sais des choses.