« … Amen. »

Encore un sermon, toujours l'hypocrisie. Vous êtes des hommes, mes bons, et Dieu, dans sa miséricorde, vous pardonnera vos péchés. Venez vous laver de vos fautes, venez me les susurrer à l'oreille, venez les oublier. Et demain, comme tous les autres, vous recommencerez...

Damian n'attendait plus qu'un signe.

Oh, bien sûr, des millions de personnes autour de la planète priaient pour un acte de Dieu, que ce soit le sien ou un autre, mais très peu, oui, très peu, attendaient le signe que lui espérait. Celui qui annoncerait la fin de l'Homme tel qu'il le connaissait, celui qui annoncerait la reconstruction. Celui jetterait au sol l'Homme nu dans la boue de ses péchés, et que Dieu jugerait, et, enfin, condamnerait.

Il s'était longtemps questionné, pourquoi ce pouvoir ? Apaiser les victimes, il y avait renoncé ; elles n'existaient plus, ou bien, on avait poussé le mal infligé, trop souvent la guerre, à une horreur qui les laissait sans raison. N'existaient plus que les méchants de l'histoire, qui le priait souvent, eux, de leur faire oublier, pour qu'ils puissent vivre en paix avec eux même ; et cela, il ne pouvait le faire, il ne pouvait leur pardonner, et il ne croyait pas que Dieu le puisse. Tout ce qu'il pouvait pour eux, c'était de leur rendre leur innocence d'enfant, effacer leur mémoire jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien.

Oui, cela restait en son pouvoir, et cela, il pouvait le tolérer. Il pouvait sans remords leur laisser le bénéfice du doute. Si elle semblait de plus en plus s'éloigner de lui, sa foi en l'humanité ne l'avait pas tout à fait quitté, le faisait perdurer dans sa foi. Il tendait difficilement la main, maintenant, mais il la tendait toujours. Il était prêt à soutenir de toute son âme celui qui aurait besoin de lui pour s'élever, à faire des pieds et des mains pour ceux qui... le méritaient. Sombre époque que celle dans laquelle où l'on doit faire ses preuves pour avoir l'estime d'un homme d'Église.

Et le signe n'était pas venu, pas aujourd'hui, pas encore. Ses pairs, conducteurs de la Purge, n'étaient pas encore venus le chercher. Demain, peut-être. Mais bientôt, il en était sûr. Bientôt on viendrait le chercher pour qu'il serve de plus grands desseins, le dessein du Dieu en lequel il croyait. En attendant, il retrouvait ses quartiers, prendre un verre d'eau, sourire à la sœur qui se donnait tant de mal pour la propreté de cette Église, sourire à la Bible qui en faisait tant pour la propreté de son esprit. Puis, comme on le demandait, il venait.

« J'ai péché, mon père. » Une rengaine. « Je suis tellement désolé, si je pouvais effacer mes actes, si je pouvais retourner en arrière... si je pouvait oublier son regard... »

« Oubliez, mon fils. »

Un sourire niais nait sur un visage qui se demande ce qu'il peut bien faire là. Un autre s'efface sur le visage de celui qui a pris un siècle en quelque secondes. Encore un conseil, toujours l'hypocrisie. A être constamment soumis à un tel cycle de ses émotions, Damian en resterait toujours à s'étonner de n'avoir pas encore le mal de mer...