J’avais quinze ans quand j’ai compris. Quand j’ai compris que les Hommes étaient immondes et répugnant. Ils m’ont tué. Ils ont tué tout ce que j’étais, tout ce que j’avais pu être. Tout ce que j’aurais pu être, aussi, sans doute. Est-ce que je regrette quelque chose du passé ? Absolument pas. Ils m’ont tué, donc. J’ai toujours été un peu différent, un peu… distant, loin du monde et de ce qui m’entourait. Anormalité, problèmes mentaux. Toutes les explications étaient bonnes à leurs yeux. Toutes, sauf la vérité. Quelle vérité y avait-il à trouver ? Je l’ignorais encore, à l’époque. Eux aussi, sans doute. Comme tout adolescent qui se respecte, le mal qui me rongeait était celui de la solitude et du rejet. J’étais en colère contre les autres de me considérer comme une merde. Exactement ça : une crotte, un étron. Ils m’ont abandonné là, une nuit. Ils ont tué tout. Tout ce que j’aurais pu avoir une chance d’être. Un minable. Ils ont battu mon corps, mon âme, mes pensées. Il ne restait plus rien. Seulement moi entrains de mourir sur le trottoir devant un restaurant pourri, fermé depuis 21h. Brisé. J’étais brisé. Mais je n’aurais pu espérer mieux pour mon sort. Je ne regrette rien, absolument rien.

Lorsque je suis sorti de mon coma, j’étais différent. Différent autrement, pas de la manière où je l’avais été jusqu’alors. Je me suis sourit dans le miroir et j’y ais vu quelque chose : je suis unique. Ma différence s’est développée à très jeune. J’avais cette fascination pour les morts, les sépultures, les cadavres… l’au-delà. J’en avais éprouvé une fascination dévorante sans comprendre d’où elle me venait. Ils trouvaient ça répugnant lorsque j’enfouissais mes mains curieuses dans les entrailles du chat du voisin. Je ne voyais pas la mort du même regard que mes comparses. Elle ne m’effrayait pas. Au contraire, je semblais la côtoyer comme une amie fidèle, comme une amante, une amoureuse, une femme. « La mort est ma maîtresse, et bon Dieu qu’elle est bonne. »

Lorsque je me suis éveillé un bon matin, le dos endolori, incapable de bougé, incapable de comprendre : je sentais la transformation dans on être, dans mon sang, à travers mes veines, dans ma tête. Je perdais mon humanité, comme le disait mon père. Lorsque les plumes noires ont commencées à orner mon dos, j’en étais fier. Ils ne comprenaient pas pourquoi, d’ailleurs. Et ne l’ont jamais accepté. Mon père… minable mortel… Lorsqu’il m’a retenu dans mon lit et qu’il m’a arraché une partie de moi-même à coup de couteau de cuisine, me déchirant le dos, me brisant les ailes, je me suis retourné contre l’humanité même. Si elle n’acceptait pas mes différences, je la forcerais. Et si elle s’opposait, je la détruirais. C’était tout ce qui m’importait, tout ce qui comptait réellement. C’était vivre ou mourir. J’avais décidé de vivre. Peu importait leur pensées ou leurs idéaux. J’étais là. Que Dieu me craigne ou m’adore comme son enfant, peu m’intéressait. Il n’était pas intrigué par nous, monstruosité de sa création. Et si je le pouvais, je le tuerais, je l’anéantirais, je briserais l’espoir des Hommes. Je leur montrerai ce qu’est être différent. Non seulement différent, mais puissant. Évolutionnaire.

Le passé est le passé. Ce qui compte, c’est maintenant, aujourd’hui, immédiatement. Tout ce que l’on peut faire. Rien n’est impossible. Pas pour moi. Si l’on vient un jour à me demandé comment, pourquoi, je ne répondrai qu’une chose… :


''Lorsqu'un chaud rayon de soleil vous amènera un nombreux auditoire, vous direz de moi que, né d'un simple affranchi sans fortune, j'osai hors du nid paternel déployer des ailes ambitieuses.''

Et vous savez ? La mutation est une chose effrayante, c’est accordé. Effrayante, mais merveilleusement miraculeuse. L’humanité vivra grâce à une seule chose : l’Évolution. Et la Mutation est sans doute la plus évidente de toutes ces transformations passées et présentes : nous sommes l’avenir, nous sommes l’espoir. Nous sommes la vie.

En changeant ce qui doit être changé.