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J'ai oublié. Je l'ai touché, et j'ai oublié. J'ai vu l'encre se détacher de ma peau. Je l'ai vu prendre vie, je l'ai vu voler, doucement vers elle. Et j'ai oublié. Je ne me souviens que du noir. Que d'un sentiment d'étourdissement, comme si la terre s'était ouverte sous mes pieds. N'avais-je pas l'habitude, de ce sentiment de plénitude ? Si. Si, bien sûr. Mais c'était différent. C'était comme si on m'emportait, comme si j'étais en apesanteur. Comme si j'étais mort. Je n'avais plus la force d'avoir peur ; avais-je seulement eu peur, un jour ? Mes yeux étaient fermés, mes paupières étaient si lourdes. Je voulais regarder mes bras, voir mes mains. Je voulais voir. Je voulais voir mes veines, je voulais voir. Mais je voyais rien. J'entendais pourtant des voix, autour de moi. Je n'étais pas seul. Putain, je n'allais pas crever seul. Un sourire s'était dessiné sur mes lèvres, même si je comprendrais pas un fichtre mot de ce qu'ils me disaient. J'étais comme dans l'eau, je ne percevais que la panique dans leurs cris trop sourds pour que je réponde. Trop sourd pour que je revienne à moi. J'avais envie de rire, mais je ne pouvais pas. Je ne pouvais plus. J'ai oublié, et je ne voulais pas savoir. Mon père aurait été fier. Ma mère aurait pleuré. Lui aurais- seulement dit ? Non, j'ai oublié. Quoi que, on me l'a dit. Alors je le sais. Maman, ton fils a sauvé une vie. Maman, regarde-moi. Maman, tu m'aimes encore ?. Je ne savais même pas si je pensais, ou si je parlais. Je sentais un putain de liquide sortir de mes yeux. Du liquide. Ce n'était pas du sang. Non, ils me l'avaient dit. Un truc transparent, un truc qui jamais n'étaient sortis de mes yeux depuis que j'avais vu la carcasse de ma mère dans le salon, quand j'étais gosse. On l'avait tué. D'un coup de balle, comme ça. Et moi, elle m'avait tué de mourir. Elle avait tué mes sentiments. J'étais mort, ce jour là. C'était moi, la tombe. Est-ce que je vais te rejoindre, maman? Je n'en avais pas envie. Et je n'entendais plus rien. Je ne sentais plus rien, même pas la rare larme qui avait franchit la barrière de mes cils, pour la première fois depuis quinze ans.

Je suis resté sept mois dans le coma. J'étais mort. J'avais sauvé cette fille, dans le seul but de vouloir regagner l'estime des miens : j'avais échoué. Il paraît qu'elle me rendait visite, quelque fois. Dust, c'était son nom de mutant. Poussière. C'était moi, qui allait finir en poussière. Ce putain de tatouage m'avait achevé. Je sortais de prison. Tout juste. J'avais trahi, j'avais vendu des choses interdites. De la drogue, et des armes. Des armes, qui ont arraché des vies. Je m'en moquais. J'avais de l'argent, et ce qui se passait après ne me concernait plus. J'avais passé une vie de débauche, que l'on me reprochait. Tout le temps. Après tout, c'est ma vie. J'étais le maître de mes jours, et ce qu'il se passait et ce qui pouvait m'arriver ne concernait que moi. Je n'avais pas de famille, je n'avais pas d'amis. Rien ne m'y accrochait. Rien ne pouvait me retenir. Non, rien. Même pas moi. J'étais comme attaché à une corde, avec une faucheuse au bout. Je m'amusais, quitte à en crever.

J'étais sorti, un peu seul au monde. J'utilisais les pouvoirs que mes tatouages me procuraient en faisant des choses qui ne seraient pas toujours bonnes à dire. Je m'en servais pour mon propre intérêt personne. La force sur-humaine pour voler des armes bien cachées ou même cambrioler des banques sans grand mal, l'arme biologique que le tatouage logé dans ma main gauche pouvait provoquer des nausées, des saignements sur les individus qui cherchaient à me stopper. J'ignorais encore à quoi me servait le tatouage sur ma tempe, un petit éclair, tout comme celui sur mon bras. Et puis j'avais été recruté, dans ce camp des Damnés. Loin d'être de bons mutants, où le vice et la violence était de mise. Se servir de mes pouvoirs pour faire le bien ? Non. J'avais déjà donné. Et j'en avais presque donné ma vie. Ma vie était conduite par les membres, qui partageait généralement les mêmes passions que moi, et surtout une passion prononcée pour la débauche. Rien ne me faisait peur. Non, rien. J'étais grand, j'étais puissant. Et je savais, au fond, que mon adhésion dans ce camp était la meilleure chose que j'avais pu faire. La meilleure chose pour me faire encore grandir, pour être encore plus puissant. Déjà, un désir de puissance sans fin se profilait au loin. Mon nom est Ink, et bientôt, il sera synonyme de terreur.