Le premier humain libre de penser qui daigna, autre que sa propre famille qui le renia, poser un regard sur l’immense paire d’ailes qui ornait son dos depuis son adolescence déjà, une époque qui lui semblait bien lointaine, encore, de ce qu’il était devenu, ce que le temps avait façonné sur lui. Et c’était la peur que l’avocat avait lu dans ce regard là lorsqu’il les avait déployées. Imposantes, elles ne s’étaient pas gênées pour prendre la place qui leur était due dans ce monde divisé. L’Ange Noir avait déjà, à la première époque, au temps de Shawn, inspiré un petit quelque chose de terrifiant dans leur regard trop humain à son goût. Et il se disait supérieur à eux sans honte. Il n’y avait pas qu’eux… Certains mutants parvenaient aussi à éprouver un certain mal à l’aise en sa compagnie. Mais qu’en avait-il à faire? S’ils étaient trop honteux, il ne méritait pas ce don. À l’époque, peut-être avait-il cherché à les convaincre que la honte ne menait à rien. Maintenant, ses sentiments semblaient avoir changés… Il n’était pas davantage aimable… Mais si tu étais faible, tu le demeurais. Que tu sois humain ou mutant, d’ailleurs. Il n’effectuait toutefois plus le métier qu’il aimait pourtant bien, même s’il ne l’avait jamais démontré. En s’extériorisant, en déployant ses ailes devant le public, on l’avait, comme prévu, craint et puis rejeté vivement. Un avocat mutant dans un monde borné n’était alors plus écouté.

Si Nathan, avant de perdre ce seul emploi, avait déjà certains penchants pour la boisson, ça ne fit malheureusement qu’empirer avec les années. Toujours au service du Club, toutefois, il songeait depuis quelque temps déjà, années, même, à laisser tomber, à les quitté. Trop impliqué déjà dans plusieurs de leur activité, se sentant comme un oiseau domestiqué, esclave de leur moindre désir, prendre son envole n’était pas l’envie qui lui manquait. Mais pour aller où? La difficulté, pour lui, était là. Il ne pouvait partir. Il ne pouvait se retrouver seul dans la nature, livré à lui-même. Si sa mutation impressionnait souvent, il n’était pas un mutant de grande puissance. Loin de là, même. La mort le saluait bien bas, certes, mais là où n’y avait pas l’ombre d’un cadavre, son don se limitait à terroriser les enfants avec un regard qui tue et des ailes aussi noires que celles d’un corbeau. Il donnait l’impression d’être un oiseau de mauvais augure, mais n’était plus que l’ombre de ce qu’il était. Seul, il se livrait à leurs attaques. Et les années n’arrangeaient décidément pas sa position.

Un soupire. L’Ange Damné se posa dans la première ruelle solitaire qu’il croisa, se tournant vers la lueur du soleil qu’il ne sentait déjà plus, comme si sa chaleur pourtant éternelle le touchait pas un seul instant. Il ne gardait toutefois que peu de vêtements. Il avait choisi la révélation au monde. Il ne donnait plus d’entrave à ce qu’il était et, considérant que le moindre tissu entravait automatiquement ses plumes, il s’était simplement débarrasser du moindre vêtement supérieur pour s’exposer, pour crier sa fierté silencieusement. Une paire de jeans usées, ses tatouages, ses chaussures. Il volait généralement léger. Ses ailes n’étaient plus aussi jeunes qu’avant. Si elles avaient toujours grandie en puissance, qu’il parvenait à supporter un certain poids, il avait toujours préféré volé léger pour se facilité la tâche. À quarante-cinq ans, il avait déjà sentit une faiblesse dans leur grandeur… Le poids de l’avenir, comme il se plaisait à l’appeler. Ça ne venait pas de leur force. C’était lui, leur poids. Il était lui-même leur fardeau de par ses idées. Un regard un peu triste vers l’avant, il n’ose regarder derrière lui. Il s’avance pourtant d’un pas assuré et solide, d’un pas impossible à faire trembler, bien encré à son sol. Il jette un coup d’œil curieux à l’extérieur de la ruelle et s’avance. Quelques individus ici et là. Il ne traine que très peu dans les quartiers fréquentés et préfère ceux plus misérable où on lui fiche généralement la paix. Un sourire fatigué sur le visage aux traits sombres, il daigne porter une cigarette à ses lèvres, l’odeur familière dont sont empreintes ses plumes depuis des années déjà.

Depuis quelques jours déjà, Angel avait entreprit une cure de ré-intégration. Elle s'était enfermée chez elle pendant deux semaines, puis en était ressortie juste à temps pour ses examens et avait décidé de ne pas retourner dans son cocon immédiatement. Être enfermée chez soit était tellement agréable qu'elle avait dû batailler ferme pour ne pas se laisser tenter. Elle avait tellement envie d'ouvrir la porte de l'appartement, de poser les yeux sur le chat qui aurait, encore une fois, eut la mauvaise idée de se coucher sur le lit en foutant des poils partout, de lui courir après en grognant, de nourrir l'iguane et de s'allonger à même le sol pour regarder le soleil se coucher avant de sentir un poids lourd ronronnant sur son ventre. Le paradis ! Mais au lieu de ça, Angel devait sortir dans ce monde de fou pour se laisser relooker par tous les passants. Elle aurait pu sortir habillée en bonne-sœur, la réaction aurait été la même... Tss...

- « Excusez-moi Mademoiselle mais... Vous avez l'air... »
- « Parfaite, ouais je sais. » le coupa Angel.

Elle partit en laissant en plan le jeune homme qui n'avait pas l'air de comprendre ce qu'elle venait de dire. Elle aurait pu lui cracher au visage, la réaction aurait été la même : l'admiration et le désir. Mais qu'avait-elle donc fait pour être maudite de la sorte, hum ? Pourquoi est-ce qu'elle provoquait à chaque fois la même réaction chez les gens, hein ? Elle n'avait pourtant jamais rien demandé de la sorte ! Pourquoi l'avait-on maudite ainsi ?! Qu'avait-elle donc fait pour mériter çaaaaa ?!

- « Excusez-moi mais... »
- « Quoi ?! Vous allez encore me dire que je suis parfaite ?! »
- « Euh... j'aurai juste voulu savoir l'heure... »

Angel se sentit tellement bête qu'elle rougit de honte ce qui déclencha une horde de phéromones qui rendirent gaga la pauvre femme en face d'elle qui ne pu faire autre chose que la regarder d'un air perdu. Devant cet air stupide, Angel paniqua et s'effaça brutalement et bêtement la mémoire. Quelques secondes plus tard elle repartait perplexe, sans comprendre pourquoi il y avait une femme en face d'elle...
Elle marchait dans les rues sans trop savoir quoi faire lorsqu'elle tomba nez à nez avec un homme très âgé qui se mit à lui hurler dessus sans raison. Il se mit à la traiter de traînée, de sale communiste et de pleins d'autres choses fort sympathiques. Angel se mit à paniquer et à déprimer puisqu'elle se faisait insulter sans raison. Ceci déclenchant, malheureusement pour elle, des afflux de phéromones qui se traduisirent chez le vieil homme en une poussée de violence. Il se mit à la menacer avec sa canne et lui frappa la tête d'un coup si violent que Angel paniqua et perdit la mémoire. Mais si la mémoire avait disparut, les phéromones, eux, non si bien que Angel se retrouva forcée de prendre la fuite sans comprendre la raison pour laquelle elle se faisait agresser de la sorte et surtout sans savoir ce qu'elle faisait là.
Angel courait pour échapper à la canne et aux cris du vieil homme qui fini par s'arrêter, épuisé. Cependant Angel continua de courir en regardant derrière elle, persuadée que le vieux allait revenir la frapper. Elle courait tant et si bien que le choc n'en fut que plus rude. Évidemment, à force de regarder derrière elle, Angel ne vit pas l'homme sortir de la ruelle. Pourtant il n'était pas des plus discret avec ses gigantesques ailes noires... Mais Angel, cette espèce d'idiote, courait sans regarder devant elle et sans rien comprendre elle se retrouva avec des plumes dans la bouche. Elle s'était retournée quelques secondes avant l'impact et n'avait pas eu le temps de freiner tant et si bien qu'elle s'enfonça violemment dans les gigantesques ailes noires. Paniquée, puisque en train de s'étouffer, Angel oublia ce qu'elle faisait là. Les ailes étaient tellement agréables qu'elle pensa être dans son appartement, tranquillement chez elle. Puis elle sentit l'odeur de la cigarette et dans son cerveau, ça fit "tilt" et elle se dégagea vivement tout en recrachant les plumes qu'elle avait failli avaler. Elle toussait lorsqu'elle vit les ailes bouger et un homme apparaître de face, l'air pas spécialement amical. Et ce qui devait arriver arriva... Les phéromones, ravis de trouver une nouvelle proie, se précipitèrent sur l'homme ailé. Angel ne s'en étant pas rendu compte, garda son attention fixée sur les ailes. Elle se demandait si elle était réelles. Oui bon elle avait failli en avaler mais la curiosité fut plus forte que la raison et elle s'avança vers les ailes et se mit à les tripoter, à les sentir et à en apprécier la douceur : oui elles étaient réelles !
Alors voilà, une humaine normale se serait mise à hurler et à partir en courant mais Angel, elle, était juste contente d'avoir des ailes noires en face d'elle. Lorsqu'elle entendit une voix masculine, elle sursauta et les phéromones doublèrent immédiatement, s'éparpillant tout autour du duo. Peut-être que ce n'était pas poli de toucher les ailes d'un inconnu ? Angel n'en savait rien, après tout c'était la première fois qu'elle en voyait...