Memories are the tattoos of the past [ft Zack B.]

Zack Blackwood & Kiara Shields

Memories are the tattoo's of the past.

Les Dc Marteens bordeaux de la galloise contrastaient fortement avec les escarpins en tout genre et les chaussures cirées des citadins New-Yorkais, attaché-case en main, les yeux rivés au sol. Il ne fallait pas risquer d’éparpiller ces précieux dossiers par une maladresse honteuse et une chute malvenue. Ceux de Kiara n’avaient de cesse d’observer le monde qu’il entourait. Elle n’avait de cesse de regarder, analyser, mémoriser son environnement. Elle ne se lassait pas de voir, d’échanger un regard, d’admirer, d’associer à ce qu’elle avait touché pendant tant d’années une image concrète. Elle était sortie de l’institut plus tôt dans l’après-midi, avec plusieurs idées en tête. Premièrement, la jeune galloise s’était laissé porter jusqu’au cirque où elle avait passé ses derniers mots. Les plus jeunes accoururent vers elle avec ferveur, s’apprêtant à bondir sur elle avec joie avant de se rappeler que la belle Kiara n’appréciait pas vraiment les démonstrations d’affection. Les plus anciens la regardèrent avec incompréhension, une lueur amère dans le regard. Les premiers mots qui franchirent la barrière de ses lèvres furent un appel au pardon.

« Je suis désolée. »

Désolée d’avoir tout quitté sans un mot, une lettre, un signe. D’avoir pris avec elle le peu d’affaires qui lui importaient, c’est-à-dire une femelle jaguar et un carnet à la couverture noire. Désolée de ne plus avoir donné de nouvelles alors qu’ils avaient, tous ensemble, tant partagé. Mais une famille demeurait une famille, alors ils s’approchèrent finalement et l’enlacèrent, d’une étreinte qui voulait effacer toute cette rancœur. Kiara se concentra, pour ne pas laisser son pouvoir les toucher. Ils lui avaient manqué. Mathews et Loreleï, le couple de jongleurs, Aela, qui domptait le feu aussi bien que Kilian domptait ses chevaux, James et Anita qui s’empressèrent de l’inviter à venir boire un café dans la caravane et les autres, tous les autres, qui avaient rythmés la vie de Kiara avant qu’elle ne rentre à l’Institut. Leur mentir n’était même pas envisagé comme une option. Elle leur avoua avoir trouvé un endroit où elle était avec d’autres mutants, car c’était ce qu’elle était désormais, une mutante. Et leur réaction combla toutes ses attentes. Ils étaient tout simplement heureux. Elle leur promit de revenir dès que possible, assurer une ou deux représentations. Leurs sourires étaient ce qu’il y avait de plus contagieux et lorsqu’elle repartit quelques heures plus tard, après quelques litres de café et kilos de biscuits secs, la morosité des New-Yorkais ne l’atteignait même plus.

Elle n’avait pas voulu rentrer à l’Institut tout de suite. Cette liberté de mouvement lui plaisait et elle comptait en profiter. Elle flâna longtemps devant les universités, et se laissa tenter par le programme d’une école de musique. Elle en nota les coordonnées sur un morceau de papier et se promit de se renseigner plus en détails. Les boutiques, les cafés, les parcs. Kiara revisitait New-York d’un nouvel œil. Son style particulier lui attirait quelques regards courroucés et parfois flatteurs mais la brune n’avait pas vraiment le temps de s’attarder sur ceux-ci. Là, tout de suite, elle était bien et c’était tout ce qui comptait. Prudente, elle avait soigneusement évité le quartier de l’appartement de sa mère.

L’heure de pointe de fin de journée rendit bientôt sa progression difficile dans les artères principales de la ville. Avide de découverte, elle coupa à travers les ruelles qui lui étaient méconnues, se repaissant du calme de ces dernières. Un magasin de musique s’offrit à elle et elle se perdit dans ce monde qui n’était pas si nouveau pour elle. Elle discuta longuement avec le vendeur, qui s’amusa de la curiosité sans faille de la jeune femme. Les retrouvailles avec sa seconde famille l’avaient plongé dans une sorte de transe qui lui ôtait toute timidité et froideur. En sortant de la boutique, elle s’enfonça encore plus dans les rues inconnues. Dans ses mains, elle froissait et tordait avec hésitation un prospectus que lui avait confié James. C’était la miniature de l’affiche qui avait pour habitude d’annoncer les représentations de Kiara et de sa panthère. Une photo de celle-ci et son slogan « there is a panther behind you » avec cette police si particulière. Une idée s’était affichée dans son esprit et elle ne semblait pas décider à le quitter. A peine leva t’elle les yeux de son papier si maltraité, qu’elle tombait nez à nez à une enseigne de boutique de tatouages. Une pulsion, un coup de tête, qu’importe elle poussa la porte de cette dernière. L’ambiance y était étrange et surtout inconnue pour la Galloise. Son regard inquisiteur détaillait toutes les photos sur les murs. Un tatouage. Pourquoi pas. Il n’y avait personne dans cette première salle, où elle resta un long moment, pendue à ces démonstrations d’art qui s’affichaient devant ses yeux. Ca lui plaisait, c’était indéniable. La notion de beauté, elle l’avait découvert il y a peu. Kiara n’ignorait pas que celle-ci était subjective mais elle avait fait son choix : ces signatures indélébiles étaient belles. Elle ne savait que superficiellement comment cela se passait… et c’est à la vue des photos qu’elle réalisa que le contact serait risqué. Elle avait pourtant pris soin de se « recharger » comme elle se plaisait à dire, mais un accident n’était pas omis. Une pointe de déception perça sa raison, et elle s’apprêta à tourner les talons lorsqu’une voix retentit derrière elle.