As-tu déjà réfléchi à quoi ressemblerait un monde de paix ?

Tu regardes les étoiles, couchée dans l'herbe et la poussière, et commences à rêver de tellement de choses que tu ne saurais vraiment par où commencer si un jour tu devais les raconter. Cela n'est pas grave, je vais le faire à ta place. tu n'as qu'à te laisser aller, tout va bien se passer. Le vent caresse ton visage, tes bras, glisse sur tes vêtements. La brise est douce, légère, agréable. Cela change de d'habitude. D'habitude, le vent est fort, il hurle à vos oreilles alors que vous courrez sans jamais vous arrêtez. Aujourd'hui, tout est calme. Tout est propice à de telles pensées. Comme un coup du destin. Doucement, lentement, ton regard se dirige des étoiles vers tes camarades. Ils parlent entre eux, se donnent de grandes tapes sur l'épaule. Cela fait tellement longtemps que vous n'avez eu une nuit de répit à l'instar de celle-ci qu'ils en profitent du mieux qu'ils le peuvent. C'est bien. Tu esquisses un sourire puis fermes les yeux, retournant à tes rêveries les plus secrètes.

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Te réveillant en sursaut, tu mets un certain temps avant de comprendre ce qu'il se passe. Quoi, c'est la guerre ?! Non ... Ce n'est que l'incessant bip, bip de ton réveil qui t'indique qu'il est l'heure de te lever. Passant l'une de tes mains sur ton visage, tu souris : il fait beau dehors. Tu te sens affreusement humaine. Tu le vois au travers des rideaux tirés, le soleil pénètre déjà à l'intérieur de ta chambre en inondant le mur de lumière. En écoutant bien, tu peux percevoir des éclats de voix provenant de l'extérieur. Sans nul doute ta petite soeur Alice ! Tu finis par te lever, las d'attendre impatiemment dans ton lit. Tu te lèves et t'habilles d'un débardeur assorti d'un pantalon, tous deux noirs, une tenue que tu portes très souvent. Bien vite tu la rejoins, découvrant un soleil radieux en ce mois de juin. Il fait chaud, presque trop mais peu vous importe, vous vivez là depuis si longtemps !

Cette journée ne sera pas comme toutes les autres. Cette journée sera différente, comme toutes les autres. Ton père t'interpelle, il veut que tu viennes déjeuner avec lui sur la terrasse. Bien évidemment, tu t'empresses de le rejoindre ! Ta mère, Juliet, est là aussi, lui tenant compagnie. Tu as l'impression que cela fait des jours que vous ne vous êtes pas vus et pourtant, cela ne fait que quelques heures ! Tu les aimes tellement, il faut dire. Comment un enfant pourrait-il rejeter ses parents ? Tu l'ignores. Assise sur le siège que t'offre ton paternel Ryûhei, tu tends la main pour attraper quelque nourriture mais un voile noir tombe sur tes yeux, t'obscurcissant complètement la vue. « Qui suis-je ? » demande alors une voix pleine de malice. Tu n'as pas besoin de réfléchir, tu la connais par coeur. Tu l'as côtoyé depuis ta naissance, comment pourrais-tu seulement ne pas la reconnaître ? C'est la voix de ton frère jumeau. Une voix semblable à la tienne, une voix douce et posée. « Rin. » Tu l'apostrophes, lui faisant ainsi remarquer que tu l'as reconnu. Bien évidemment.

Il s'assoit avec vous et partage votre repas, comme chaque matin. La petite Alice se joint également à vous, il est de coutume de prendre les repas ensemble chez vous. C'est tellement plus convivial, aussi ... Vous riez tous les trois, vous êtes tous bien là. Vous êtes heureux, vous ne pensez guère à tous ces conflits qui sévissent dans le monde. "Guerre froide" n'est qu'un terme vague pour vos parents, une idée que l'on a pas coutume d'évoquer au sein de la maisonnée où il fait bon vivre depuis dix-sept ans maintenant. Qu'est-ce que le temps passe vite ! Des traditionnelles banalités, vous passez sans vraiment le vouloir au sujet de vos études. Sans attendre, tu annonces fièrement que tu penses t'engager dans l'armée japonaise, tout comme Rin. Des patriotes, voilà ce que vous êtes. Des hommes et des femmes qui soutiennent leur pays, qui le défendront peu en importe le prix à payer. Défendre un idéal, sa patrie. Ha ... Quelle blague ...

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Tu ouvres les yeux. Les étoiles et la lune remplacent instantanément les rayons de soleil, te ramenant à la dure réalité des choses. Ton père n'est plus depuis des années. Ta mère et ta petite soeur de quatorze ans ont déménagé suite à votre disparition soudaine, suite au manque de nouvelles. Vous ne pouvez donner signe de vie ... Une larme perle au coin de tes yeux, roulant le long de ta joue. Elles te manquent, c'est indéniable. Mais tu dois être forte ou sinon, ils vous tueront tous les deux. Vous n'êtes que ce que le gouvernement veut que vous soyez, n'est-ce pas ? Vous n'êtes que des armes, soyez-en conscients. Gardez la tête haute, froide, et tout ira bien. Les combats reprendront demain, vous allez encore mettre à sac un quelconque bâtiment en prenant tous les risques et ce uniquement parce que vous n'êtes pas considérés comme normaux.

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« Rin ! » Tu appelles ton frère depuis maintenant cinq bonnes minutes mais il ne daigne montrer un quelconque signe de vie. Voilà au moins un quart d'heure que tu sautes d'immeubles en immeubles, que tu cours à travers les rues en tentant tant bien que mal de le suivre. Tu sais que vos poursuivants vous suivent à la trace, depuis que vous avez disparu en fait, mais qui sait s'ils ne vous retrouveront pas ? C'est pourquoi vous continuez à courir, encore et encore, jusqu'à trouver un endroit où vous cacher. Ils ont eu le reste de votre équipe, seuls vous deux avez réussi l'exploit de leur échapper voilà quelques semaines déjà. Vous ne voulez plus les servir. Vous n'êtes pas des animaux ! Tu rêvais de servir ton pays, tu n'as obtenu que la domination et la soumission. Lorsque l'on a découvert le pouvoir de sommeil que tu as toujours caché, ce fut pire que l'effet d'une bombe nucléaire (si vous me passez l'expression). Ton frère et toi avez intégrés une équipe d'intervention des forces spéciales, enfin quelque chose comme ça, tu n'as plus envie de retenir le nom désormais, et ça a été l'enfer pendant presque trois ans maintenant.

Lorsqu'enfin tu retrouves le Japonais, c'est devant une personne que tu ne connais pas. Apparemment, il semble très absorbé par la conversation qu'il a avec ... Haletant comme ce n'est pas permis, tu te rapproches pour te mettre à leur niveau, t'éloignant de cette foule de sentiments qui t'agresse en permanence depuis que vous vous êtes lancés dans cette course folle, te rapprochant du fond de la ruelle. Tu veux partir, là, maintenant, tout de suite. Tu veux te mettre à la recherche de ta famille depuis trop longtemps délaissée. Tu as un peu peur de cette personne qui vous parle mais tu ne sens pas de sentiment négatif provenant d'elle. Au bout de plusieurs minutes, c'est là que tu comprends. C'est là que tu comprends que plus jamais vous n'aurez besoin de courir.

Parce que tu comprends que vous avez enfin trouvé un endroit où revenir.