—Je pense à…
—Un chocolat chaud.
—Non.
—Une banana split.
—Non.
—Un éléphant des mers.
—Noooon.
—Quoi, alors?
—Je pense à hier.
—À hier? Ah oui, je vois…

La stupidité de la conversation se mua étrangement en un quelque chose de plus doux, plus sérieux, et le sourire étincelant du brun s’évanouissant comme un mauvais rêve, il se contenta de s’assoir en face du mutant, bien qu’un peu plus vieux que lui. Ils avaient tous un peu tendance à être attiré par lui pour ce genre de situation. Parce qu’il avait cette oreille attentive et délicate, sans forcément harceler de questionnements. Il était de ceux qui tendaient la main à tout va, de ceux qui passaient des nuits blanches rien que pour redonner un semblant de sourire aux autres. Mais c’était dans sa nature profonde. Même avant d’être ici, même dans la confusion la plus absolue, il avait été ainsi fait : c’était lui qui hurlait aux problèmes et pourtant, il souriait, jamais lassé, jamais blasé, doucement, rassurait les uns et les autres. Et sans doute avait-il déjà vécu au meilleur endroit sur terre pour être l’ange gardien des émotions refoulées.

Il regarda le soupire, le pincement muet du cœur, les yeux qui se détournent et le corps qui retient l’envie de partir se cacher sous des draps réconfortant. Mais il le retient. Il l’attrape rapidement par la manche et malgré leur différence de taille et de grandeur, le jaune le serre contre lui dans un ultime effort pour lui faire oublier la misère d’être mutant pour certains, parce que ce n’était pas tous les jours faciles pour tout le monde. Stas avait de la chance : celle de ne pas attirer les regards sur lui comme un automatisme devant la différence. Bon. Il détonait tout de même un peu avec ce petit air rêveur et un peu trop gamin pour son âge. Mais il avait le cœur jeune et c’était suffisant pour qu’on veuille constamment s’adresser à lui de la sorte.

Mais il était là pour ça, n’est-ce pas? Il était là pour les aider, eux, à ne pas se perdre dans ce désespoir de ne rien contrôler. Parce que c’était comme apprendre à faire du vélo : certains y arrivaient plus facilement que d’autres. Et il aimait se servir de sa propre expérience. Parce que lui-même en avait vu de toutes les couleurs, il avait été de ceux qui étaient davantage victimes de leur propre mutation que mutant en contrôle. Et maintenant? Il était plutôt celui qui voulait changer les choses d’une main amicale. Tout simplement.