Blanches, noires, blanches…Les touches s’alternaient sous ses doigts dans une mélopée qui emplissait totalement la grande maison. Maison dont la décoration vous faisait plus attendre à trouver une belle et heureuse famille. Celle que l’on imagine avec des enfants jouant dans le jardin, tandis qu’un chien rode dans la cuisine, attiré par l’odeur de la meilleure recette de la maitresse de maison. Pourtant c’est un homme seul que l’on trouve dans cette maison. Assit sur le banc en cuir noir, ses doigts courant sur le Steinway & sons, les muscles de ses avants bras se contractant au fil des notes en parfaite synchronisation avec les cordes du piano.

La mélodie continuait douce, fine, rapide et vivante à certains moments, triste concentrées et rageuse à d’autres, reflets des émotions qui se succédaient dans le regard du pianiste. Des prunelles d’un bleu tirant sur le gris et remplis d’histoires. Et la musique continuait toujours. D’abord ambitieuse et pleine d’assurance, en accord avec les souvenirs de ses jeunes années, celles où il n’était rien de plus qu’un garçon à peine sortie de l’adolescence et qui rêvait de façonner et d’apporter sa contribution au monde. Il continuait de jouer, la musique bien que parsemé d’égarement et d’appréhension en devenait plus festive plus heureuse. Elle était la joie, le bonheur, celui qui vient avec la personne capable de faire battre votre cœur plus fort, plus vite. Alors la mélodie s’accélérait aussi, pour cesser brusquement, interrompu par la sonnerie du téléphone.

Après quelques minutes, il se replaça sur le banc et recommença à jouer. Une nouvelle mélopée emplie la pièce cette fois, plus furieuse, plus frappée. Les souvenirs eux étaient plus douloureux, plus amers. Ceux de la perte d'Aby, de sa moitié, dans un accident mystérieux et inexpliqué. Accident qui n’avait plus grand-chose de mystérieux quand après ses nombreuses recherches et avec les informations dont il disposait grâce au ministère, il avait compris que tout avait été provoqué par un mutant dans l’incapacité de gérer ses dons. Les coups que donnaient ses doigts contre les touches étaient plus forts désormais, alimenté par sa colère. La mélodie était toujours aussi juste que la première, mais il n’y avait désormais plus rien de doux, de gracieux ou de simple. C’était au contraire fort, dur et complexe, enfin jusqu’à ce que le silence ne revienne.

Installé à bord d’un avion en partance pour New-York, Neal étudiait attentivement une série de notes et de dossier confidentiels qui lui avait été remis. Le coup de téléphone qu’il avait reçu plus tôt n’avait été que pour l’informer qu’une nouvelle affaire requerrait ses services. Une histoire de fuite et de vol à la NASA, simple et pourtant… Il ne semblait pas si simple d’attraper un petit génie. Il allait devoir analyser attentivement le dossier de l’homme qu’il était chargé de retrouver. Viktor Garrett. D’ailleurs, plusieurs stratégies commençait déjà à se faire jours dans son esprit…