♣ Elle est radieuse dans sa grossesse. Comment en est-elle arrivée à ça ? Elle, la petite princesse qui promettait tant de belles choses à ses parents sans jamais avoir l’air de. Toujours sage, un peu trop rêveuse peut-être, mais apprenant si vite et toujours joyeuse, la parfaite petite héritière de la famille. Destinée à un grand destin dont seuls ses parents, surtout sa mère, avait le droit de connaître visiblement. Alors comment en est-elle arrivée à rester enfermée dans cette maison dans la campagne de Louisianne, à quelques kilomètres de Baton-Rouge ? Parce qu’elle s’est laissée séduire, tout en séduisant en retour, et qu’elle a succombée, tête la première, dans une histoire qui n’a pas eu de réelle fin. Qu’elle a été inconsciente et qu’elle a fini par tomber enceinte sans s’y attendre le moins du monde. Elle n’aurait pas dû et elle le sait, mais que pouvait-elle dire ? Ses parents étaient aveugle au fait que leur petite fille chérie si parfaite avait un côté rebelle ; celui-là même qui la poussait à aller toujours plus dans les fêtes que ses amies lançaient. La poussant à danser dans les bras de jeunes hommes que ses parents lui auraient interdit de fréquenter.

Car ils n’étaient dignes d’elle voyez-vous. Sa famille descend d’une longue lignée de la noblesse britannique dit-on. Sa mère, quant à elle, venait tout droit de la bourgeoisie française. En somme, ils cherchaient à marier leur petite Arleen à un bon parti, un homme qui serait digne de perpétuer la lignée de Heargrave, quand bien même le nom doive changer. Alors bien évidemment, elle ne leur a pas parlé de cet homme qu’elle rencontrait en cachette depuis quelques temps, parce qu’elle savait pertinemment qu’ils seraient à jamais contre leur union. Au moins ils avaient évolués au point de ne pas lui interdire de relation avant le mariage. Ils ont dû vouloir revoir leur jugement quand ils ont découvert qu’elle était enceinte. Bien évidemment, hors de question d’avorter, quelle hérésie ! Le garder n’était pas une option non plus ; vous imaginez le scandale qu’une telle nouvelle pouvait faire ? Alors ils ont pris la décision, puisque leur fille était trop bornée pour leur révéler l’identité du père, de l’emmener dans leur maison de famille en Louisiane et de l’y garder jusqu’à ce qu’elle accouche, cachée des yeux scrutateurs et curieux des gens de la ville qui ne dort jamais.

Enfermée dans la maison, elle est entourée par des antiquités, des livres et des étagères semblant infinies d’objets divers et variés destinés à montrer à tous ici qu’ils étaient des gens « de la haute ». Arleen n’est clairement pas heureuse de sa condition actuelle de vie et pourtant, elle irradie de cette douce et paisible lueur que certaines future-mamans ont ; celle qui va de pair avec l’amour qu’elle porte pour le petit être grandissant en elle. Elle l’aime, peu importe qui en est le père, peu importe ce qu’elle doit endurer pour cela…Elle l’aime tout de même, du plus profond de son cœur et de cet amour entier et exclusif. Elle sent parfaitement au fond d’elle qu’elle prendra soin de ce petit être jusqu’à la fin de sa vie si elle le pouvait.

C’est pour cela qu’elle est complètement détruite de l’intérieure quand, après de si longues heures de douleur et travail pour mettre au monde son fils (un garçon !), il lui est enlevé pour ne plus jamais le revoir, alors qu’elle n’a même pas été autorisée à le prendre contre elle ne serait-ce qu’une minute. Juste le temps de le regarder une fois, pour voir à quoi ressemble le fruit d’un amour éphémère qui l’a pourtant marquée comme aucun autre. Elle pleure, crie et se débat, mais son père la retient dans son lit, pendant que sa mère emmène l’enfant dieu seul sait où, scellant la fin de toute cette histoire et le début d’une peine sans fin pour Arleen qui n'avait alors que 22 ans.

Au final, elle est restée un an en Louisianne. Quand elle est autorisée à en ressortir, elle claque la porte de chez ses parents mais restant à New-York. Elle est sans vivre, ses parents lui ayant refusé de l’aider après ce grand éclat après le bébé. Alors elle a dû trouver un travail. Même si son grand rêve est d’entrer dans la police de New-York, elle sait que ça ne sera pas possible pour diverses raisons. Alors elle s’est contentée d’un stage de secrétariat et a pris un poste à pourvoir au poste de police. Elle ne montre rien de l’histoire avec le bébé qui lui est arrivée. C’est sa blessure à elle, personne n’a à le savoir. D’autant plus que pas mal de ses collègues la pensent suffisamment fragile comme ça alors que pas du tout ; elle fait du Krav-maga depuis quelques années, elle a, certes, du faire une pause quand la grossesse est arrivée, mais elle sait se défendre, même contre des gros balourds d’agent de police pas fichu de trouver une agrafeuse sur leur bureau…Pour certains en tout cas. Quant à l'homme qui était le père d'un enfant qu'elle ne connaîtra jamais, eh bien quand elle est revenue à New-York il avait disparu. Elle ne l'a pas recherché, se sachant incapable de le revoir sans fondre en larme ou en crise d'hystérie, au choix.