Allongé dans ton lit à l'Institut, tu aimais rêvasser parfois. C'était dans ce genre de moments que l'on pouvait réellement se dire que l'adage "tel mutant, tel pouvoir" s'appliquait chez toi. Parfois même, tu entras dans l'esprit d'un oiseau uniquement pour laisser tes pensées voguer. En ce moment, tu pensais souvent au passé, à ce qui t'avait amené ici. Après tout, qui aurait pensé un jour que tu aurais fui de chez toi pour te retrouver ici, grâce à ton frère ? Personne. Comment aurais-tu pu un jour penser que tu allais te faire surprendre, toi d'habitude si discret lorsque tu utilisais ton pouvoir ? Et surtout comment aurais-tu penser que ta mère allait vouloir te dénoncer comme mutant alors que vous étiez si proches tous les deux ? Rien que de penser à cela, ton coeur saignait toujours : tu avais toujours eu du mal à te remettre des trahisons de tes proches, et même deux ans après, tu souffrais encore en pensait à elle. Pourtant, ton frère t'aurait dit, s'il l'avait su "Elle ne nous comprend pas, et puis, vu comment elle est... et toi, tu lui aurais répondu que justement : elle était paranoïaque à l'extrême certes, mais elle disait toujours qu'elle n'avait que toi à qui elle pouvait faire confiance. C'était les seuls moments où ton frère et toi étiez en réel désaccord d'ailleurs, mais il était tellement facile de changer de conversation avec lui que cela ne durait jamais longtemps.

Revenant à tes pensées du passé, tu te rappelas de ce moment où tu avais fui le seul chez-toi de ta vie. Il y avait un moineau posé près de ta fenêtre, qui semblait blessé : tu l'avais immobilisé doucement d'un légère pensée, avant d'ouvrir ta fenêtre et de le poser dans ta main et d'entrer dans ses pensées afin de voir s'il était réellement blessé, comme tu n'avais rien senti au toucher que tu avais tâché de rendre le plus délicat possible. Plongé dans son esprit, tu n'avais pas entendu ta mère arriver et, quand elle avait posé la main sur ton épaule, tu n'avais qu'en partie enlevé le contrôle sur l'animal, gardant ton regard de moineau suffisamment longtemps pour qu'elle le remarque. Tu l'avais vu reculer puis partir de ta chambre presque en courant, mais tu avais naïvement cru qu'elle avait juste besoin de temps, et que tout irait mieux ensuite. C'était lorsque tu l'as entendu au téléphone te dénoncer comme mutant que tu as juste pris le temps de prendre de quoi te couvrir, vu que l'on était en hiver, et que tu es passé par la fenêtre de ta chambre avant de fuir le plus loin possible. Ce ne fut que de longues heures plus tard, lorsque la nuit tomba, que tu compris enfin que tu étais réellement très mal engagé, seul en plein nuit et âgé d'à peine 20 ans. Heureusement que ton frère finit par te trouver dans ce parc quelques jours plus tard, sans quoi tu serais mort de faim, n'osant guère sortir de ta cachette.

Tu soupiras en te passant une main dans tes cheveux à ce souvenir. Oui, heureusement qu'il avait été là, sans quoi tu ne serais certainement pas là. Tu avais d'ailleurs eu un sacré choc en apprenant qu'il était lui aussi mutant, et qu'il était parti de la maison pour cette raison, pour ne pas nous "mettre en danger si cela venait à se savoir". Certes, il n'y avait pas tous ces attentats publiques à l'époque, mais ton frère avait toujours été très clairvoyant, un don qu'il te manquait apparemment. C'est lui qui t'a emmené dans sa nouvelle demeure, à savoir l'Institut, et qui t'a permis de te faire une place, même si ce fut dur au départ. Tu restas un bon mois seul dans ta chambre, passant ton temps à observer ta mère par l'intermédiaire des oiseaux, et il lui fallait faire beaucoup d'efforts pour que tu te joignes au minimum syndical aux autres habitants de l'Institut. Toi qui avais pensé partir rapidement de ce lieu, le temps de te retourner et d'assumer totalement le fait d'être seul, tu avais finalement réussi à l'intégrer un minimum, sans te lier cependant réellement, et tu finis même par proposer tes services au directeur, Charles Xavier, en tant que surveillant, ce qu'il accepta. Dire que cela remontait à deux ans...

D'ailleurs, ton devoir t'appela, sous la forme d'un étudiant qui apprenait à contrôler son don, la transformation en oiseau, et qui t'avait demandé si tu pouvais être là pour le surveiller et le guider si le besoin était. Il se tenait là, devant ta porte : tu te levas donc de ton lit et lui proposa de te rejoindre par l'intermédiaire d'un oiseau sur le parc, le temps que tu en cherches un à contrôler. La procédure n'était pas longue certes, mais tu aimais prendre ton temps pour ce faire, et tous le savaient. Et puis, même s'il n'était pas d'accord... Il savait très bien que c'était ça ou il s'entraînait seul. Parce que toi, de toute façon, tu n'étais pas prêt à avouer que tu aimais bien aider dans ce genre de situations, que tu te sentais utile grâce à cela. Non, tu étais un peu trop fier pour cela.