Biographie
La naissance de Catherine était une surprise pour les Millers. Monsieur et madame avaient déjà deux fils, Steven, quinze et Richard, dix ans et ne s’attendaient pas à avoir un autre enfant.
Malgré la différence d’âge entre elle et ses aînées, la jeune Catherine s’entendait bien avec ses frères. Même s’il y avait parfois quelques tensions, comme dans n’importe quelle fratrie, Catherine peut affirmer sans problème qu’elle a eu une enfance heureuse à Vancouver.
Si elle ne garde pas trop de souvenirs de cette époque, elle se rappelle néanmoins parfaitement le départ de son père et de ses frères lorsqu’elle avait dix ans. La guerre avait éclaté en Europe, se propageaient à travers le monde. Ça paraissait bien loin, pourtant le conflit a touché la famille Millers lorsque ses hommes ont été appelé au front. Elle voit encore son père serrer fort dans sa mère, l’embrasser et ses frères ébouriffées ses cheveux avec un rire. Le train qui s’éloigne, les bras qui s’agitent aux fenêtres, les femmes et les enfants restés sur le quai, quelques-uns ne pouvant pas retenir leurs larmes.
Une année s’écoula, puis deux sans nouvelles du front. Catherine se souvient des soirées à écouter la radio avec sa mère pour la moindre nouvelle. Jusqu’à ce qu’une première lettre arrive. Son frère aîné, Steven, était tombé au combat. Quelques semaines plus tard, c’était son père.
L’armistice avait été signé, et tout le monde se réjouissait, mais Catherine et sa mère pleuraient la mort de Richard. Il ne restait plus rien de leur famille.
Peu de temps après, un des frères de sa mère vint habiter chez eux. Ce furent des mois longs et douloureux pour Catherine. Sa mère sortait à peine de sa chambre, mangeait encore moins et Catherine restait impuissante. Elle ne connaissait pas très bien son oncle, et n’avait pas envie de le connaître. Elle voulait son père, ses frères, pas un homme qu’elle avait vu que deux fois dans sa vie.
Catherine ne sentait plus chez elle dans le foyer familial. Mais elle ne pouvait pas partir, sa mère avait besoin d’elle.
Puis un soir, son oncle vint la voir dans sa chambre. Elle ne comprit pas tout de suite ce qui se passait alors qu’il s’asseyait sur son lit, passait une main dans ses cheveux en lui murmurant à l’oreille. Ce n’est que lorsqu’il commença à lui défaire sa chemise de nuit qu’elle sortit de sa paralysie et tenta de s’enfuir. Mais il était plus fort qu’elle et l’avait rapidement maîtrisée. Catherine ferma les yeux, elle avait peur, et alors qu’elle sentait les mains parcourir son corps, elle se sentit pleine de rage. Rage contre son oncle, contre sa mère, contre ses frères qui n’étaient pas revenus. Soudain, les mains étrangères avaient disparus et un gros bruit retentit à côté d’elle. Elle ouvrit les yeux et resta sans voix tandis qu’elle observait son oncle plaqué au sol, pieds et poings liés par des filets d’eau. La carafe d’eau habituellement posée sur sa table de chevet remuait encore un peu sur le parquet, à côté de son oncle.
Il lui fallut à peine quelques minutes pour rassembler ses quelques affaires et partir de chez elle, pleine de honte, de peur et de colère.
Les mois qui suivirent furent les plus difficiles que connut Catherine. Elle passa la frontière pour descendre aux Etats-Unis, cherchant à mettre le plus de distance possible entre elle et sa mère et son oncle.
Elle avait honte de ce qu’il s’était passé avec son oncle. Elle avait honte d’avoir laissé sa mère avec un homme pareil.
Elle avait peur des pouvoirs qu’elle s’était découvert. Elle avait peur dès que quelqu’un l’approchait d’un peu trop près.
Elle était en colère pour son père et ses frères morts au combat qui lui manquaient. Elle était en colère contre sa mère qui s’était enfermée dans son chagrin et l’avait oubliée.
Catherine enchaina les petits boulots qu’on voulait bien lui donner, s’habitua à dormir là où elle pouvait.
Elle était à Seattle depuis deux ans, cumulait des petits boulots en plus de son emploi de serveuse qui lui permettait de s’offrir un petit appartement lorsqu’elle fit la rencontre d’Evangeline Carlyle. Elles travaillaient ensemble et, un soir, Catherine avait surpris la jeune femme prête à passer la nuit dans sa voiture. Il ne lui en avait pas fallu plus. Il fallut plusieurs jours pour qu’Ivy accepte de venir chez Catherine. Ce n’était pas la vie de rêve, mais elles s’entendaient bien et la colocation se passait plutôt bien.
Catherine fut surprise mais heureuse de trouver en Ivy une incroyable amie et confidente. Et si elle souhaitait parfois que leur amitié évolue vers autre chose, Catherine étouffait bien vite ses sentiments.
Jusqu’au jour où Ivy l’embrassa sans crier gare.
Ce ne fut pas tous les jours faciles, mais les deux femmes s’épanouirent dans leur relation.
Et New-York. C’était une envie qu’elles avaient toutes les deux et rien ne les retenaient à Seattle. Elles traversèrent les Etats-Unis et s’installèrent rapidement dans la nouvelle ville. Catherine tomba sur une offre de formation d’infirmière et la jeune femme sauta sur l’occasion, tandis qu’Ivy avait trouvé un moyen d’utiliser ses pouvoirs au sein d’une agence de détectives.
Catherine n’aurait pas su dire quand ça avait commencé exactement, mais bientôt les deux femmes ne supportaient plus leur promiscuité. Elles se disputaient pour un rien, Catherine se retrouva plus souvent qu’il ne fallait à dormir sur le canapé, trop en colère pour rejoindre Ivy.
Un an après leur arrivée à New-York, les deux jeunes femmes se séparèrent et coupèrent les ponts.
Catherine ne mène pas forcément la vie idéale, mais c’est plus que ce qu’elle aurait pu demander vu ses conditions de départ. Elle se concentre sur son travail, essaie de se faire apprécier de ses collègues et de ses patients. Au moins elle a un toit au-dessus de sa tête et un métier pour payer les factures et les courses. Que demander de plus ?