De la poussière plein les yeux. Des coups de canons et de fusil en écho à ses oreilles. Il avançait rapidement, ouvrant la marche. Rapidement, mais silencieusement. Attentif au moindre mouvement, au moindre son, il respirait au même rythme que ses pas. Accroupit, ses pieds s’enfonçaient dans la terre meuble. Un son au devant le força à s’arrêter et à lever un bras pour que toute la petite troupe derrière lui fasse de même. Il fit quelques signes, apercevant au devant une cible qui se déplaçait, à une centaine de mètres de là où ils se trouvaient. À environ un kilomètre, il apercevait très clairement le dessus des toits d’un village sans doute assiégé par l’ennemi. En avaient-ils fait leur camp de base? Celui-ci devrait d’ailleurs se trouver dans les environs. Il prit la décision de faire abattre la sentinelle qui se promenait au devant, ce qui fut fait aussi rapidement que l’ordre fut donné. Ce n’était pas dans ses habitudes de ne pas être efficace sur le terrain et l’obéissance aveugle était primordiale. Il poursuivit sa route par la suite, remettant le peloton en route.

Ils approchèrent du village étrangement silencieux et se déployèrent en éventail pour mieux couvrir le terrain. Il fit signe de ralentir le pas et de surveiller les environs. C’était inquiétant et perturbant. Il était convaincu qu’il avait aperçu de la fumée de plus loin indiquant une attaque ou la vie. Mais il n’y avait rien. Il s’apprêtait à faire fouiller le village lorsqu’un sifflement, léger, semblable à celui d’un oiseau, attira son attention. Il s’apprêtait à ordonner le repli face à ce qu’il était en train de constater : c’était une embuscade, carrément. Il eu tout juste le temps de crier qu’ils étaient attaqué que les projectiles volaient dans leur direction, les séparant momentanément de leur formation. Il ne s’en formalisa pas, ce n’était plus le moment, il fallait riposter.

Les tirs faisaient rages et lorsqu’ils furent obligés de se replier vers un bâtiment dans lequel ils pourraient se mettre un peu plus à l’abri, il ne restait que cinq hommes, se comptant lui-même dans le lot. Il rageait intérieurement. C’était un échec total. Il allait tous les faire tués par son imprudence évidente. Il se tourna vers ses compagnons qui l’observaient, désemparés. Il les condamnait. Il garda une expression aussi calme qu’en contrôle, bien qu’il ne pu s’empêcher de s’inquiéter pour eux.

Il entendit crier au dehors et se précipita rapidement vers une fenêtre. Il avait entre leur main l’un de ses hommes… qui se révéla être toujours vivant malgré les cinq projectiles. Certes, il ne tenait qu’à peine debout par lui-même et il doutait de ses chances de survies. Allait-il toutefois le laisser mourir entre leurs mains? C’étaient des négociations perdus d’avance. C’était ainsi. Il se méfiait trop pour risquer le moindre de ses hommes là-bas. Il sortie dissimula donc un pistolet et sortie lentement de manière à ce qu’on puisse parfaitement observer le moindre de ses gestes. Il demeura toutefois à bonne distance, craignant une réaction agressive. S’il avait seulement pu comprendre leur langue, tout aurait été beaucoup plus simple.

Tout fut si rapide… Son regard perçant vit le tireur embusqué qui le visait, lui, directement. Jayden fit quelques signes silencieux et désolé vers le prisonnier. Il ne le laisserait pas souffrir. Jamais. Il sortit rapidement son arme, pointa devant lui, serrant la mâchoire, et appuya sur la gâchette, sans afficher le moindre remords en apparence. La balle fila et fut mortelle : il venait d’abattre son propre coéquipier d’un seul projectile qu’il n’avait sans doute pas sentit, cette fois. Il observa tout juste le corps s’affaler sur le sol poussiéreux et dû s’élancer plus loin pour éviter les tirs dans sa direction.

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Le sang attirerait inévitablement les chiens sauvages. Il ne sentait plus son bras engourdit par la douleur. Il ne voyait que les longs filets de sang souiller sa main, ses tissus et laissant une trace là où était passé. Il serait facilement repérable. Nerveux, il tentait tant bien que mal de garder le contrôle sur lui-même. Mais il sentait le moindre arbre trembler sous la force de ses pouvoirs sur lesquels il ne sentait que de moins en moins de contrôle. Quelques petits objets volaient sur son passage, mais sans plus, fort heureusement pour lui.

La grande quantité de sang perdu troublait sa vision. Il était sur le point de s’effondrer. Il ne le fallait pas, il le savait, sans quoi il causerait sa propre perte et les sacrifices seraient en vain. Il ne s’arrêta qu’une minute à une source pour tant bien que mal nettoyer sa blessure qu’il évalua plus grave que prévu. Il craignait de ne plus pouvoir se servir de son bras gauche. Un bruit sec le fit sursauter et il se redressa brusquement, arme à la main. S’avançant prudemment, une silhouette passa soudainement près de lui et il tira par instinct. Il entendit un cri et le corps qui tombe. Un cri semblable à un animal que l’on égorge. Un cri d’enfant. Il s’avança lentement et accroupie, essuyant la sueur qui tombait dans ses yeux et posa une main sur le petit corps tremblant. Atteint à la nuque. Il cessa presque de respirer en sentant la chaleur émaner de son propre corps et les larmes bientôt jaillir. Il tenta de couvrir la blessure de sa main valide… toutefois, en prenant contacte avec l’enfant, il sentit le sol se dérober sous ses pieds. Une décharge fulgurante envahi tout son être et, d’un seul coup, il fut projecteur quelques mètres plus loin par une force impossible. Il cru qu’on l’avait attaqué sans qu’il ne s’en rende compte, mais lorsqu’il releva les yeux, il ne vit que l’enfant, redressé sur ses coudes, qui levait une main dans sa direction, des filets électrifiant dansant entre ses petites doigts. Il ne lisait que la terrain sur ce visage enfantin, et pourtant…

-Je suis comme toi! cracha-t-il juste avant de percevoir un nouvel éclair voler dans sa direction, plus mordant cette fois, le clouant au sol.

Lorsqu’il fut menacé une troisième fois, il fit s’élever dans les airs plusieurs pierres de bonnes grosseurs qu’il projeta vers le gamin… gamin qui succomba aux coups. Il s’étrangla et, à bout de force, s’effondra une bonne fois pour toute. S’il ne réalisa pas immédiatement qu’il avait abattu un mutant, l’idée qu’il s’agissait d’un enfant lui donna la nausée et, en sombrant dans l’inconscience, il revit la scène de multiple fois.
….

Voix : Jayden, de quoi vous souvenez-vous?


Jayden : De la mort, doc’. Il n’y a rien d’autre à dire.


Voix : Oui, c’est tout à fait normal. Il ne peut y avoir autre chose. Mais vous savez pourquoi nous sommes là, tous les deux, ce matin. Je suis là pour discuter avec vous. Discuter de votre… expérience.

Jayden : Je n’ai rien à dire. C’est la guerre. Il n’y a rien à rajouter. C’est l’horreur humaine. C’est l’obligation de tuer pour des hommes insensés.

Voix : Êtes-vous en colère, Jayden?

(Silence. On entend une respiration en sourdine.)

Voix : Contre qui êtes-vous en colère?

Jayden : Contre les hommes.

Voix : Et pourquoi ça?

Jayden : Nous sommes différents.


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