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Une substance non identifiée, grumeleuse et jaunâtre sur les murs jadis propres d'une cuisine. Une pile de vaisselle, semblable à la tour de Pise s'érigeait au beau milieu d'un évier qui, à l'origine, devait probablement être en inox.
Trônant au milieu du plan de travail, quelques vestiges d'ailes de poulet se bâtaient en duel dans une assiette. A côté de ce véritable écosystème en devenir -qu'il se fera un plaisir d'étudier une fois le moment venu- un restant de pâtes collé au fond d'une casserole qui n'avait, vu les stigmates qu'elle arborait, pas eu une vie facile.

L'antre d'un célibataire endurci en somme. Et qui allait sans doute le rester bien longtemps.
D'ailleurs, à entendre les coups de manche à balais répétés sous son plancher, ce ne sont pas... ses sérénades matinales qui changeront quelque chose à cet état de fait. De toute manière, le Monde n'était pas encore prêt pour son talent. Il le savait et leur pardonnait.

Un coup d'oeil à la pendule. 7h48. Il était large. Du moins, c'est ce qu'il se disait tous les matins. D'après lui, il était "toujours large". Du moment que l'horloge n'affichait pas huit heures pétantes, il croyait toujours qu'il arriverait à être à l'heure. Après tout, en tant qu'enseignant dans le collège privé et huppé d'Austin, il se devait de montrer l'exemple. Ce qu'il ne faisait bien entendu pas.

7H52
Il se retrouvait, comme d'habitude, ni lavé, ni habillé et encore moins rasé, petit déjeunant tranquillement. De toute manière, cela ne lui prendrait pas bien longtemps. Entre le cramé et ce qui avait aspergé les murs du fait de sa petite danse matinale, il ne restait presque plus rien de ses oeufs brouillés.

7h56
Bon, ça allait être coton. Et encore, dans le pire des cas, il enfilerait une djellaba. Ça aura l'avantage de faire connaître une nouvelle culture aux chères têtes blondes du collège Sainte Anne. Et puis c'était confortable. Au fond de lui, il avait toujours pensé que les écossais avaient eu une riche idée en inventant le kilt.
Et puis, ce n'est pas comme s'il risquait de se faire renvoyer, après tout, il partait le lendemain pour s'occuper de ces chères nièces chéries.

Ah les soeurs Amberfield. De vrais petits anges. Du moins, c'était tout ce dont il se souvenait d'elles. Après tout, la dernière fois qu'il les avait vues, elle devaient avoir dans les quatre à cinq ans.
Les réunions de famille n'avaient jamais été son dada. Entre la grand mère aux odeurs corporelles douteuses et la tante vicieuse... Vous savez, ces merveilleuses personnes qui, par quelque phénomène de dédoublement de la personnalité parviennent à vous dire avec un grand sourire que la dernière fois, vous n'arboriez pas ce charmant bourrelet sur vos hanches.

Toujours est-il qu'étrangement, on ne l'avait plus jamais invité à aucune réunion. Il ne lui vint jamais à l'esprit que cela avait peut être un quelconque lien avec la tentative d'assassinat de l'écharpe de la tante sur sa propriétaire.

7h58
Allez, puisqu'il était en avance, il allait se permettre une petite visite chez cette charmante vendeuse de donuts.

Les cartons de son déménagement? Bof. Il s'en occuperait sur la pause de midi. Parce que le soir, il y avait Oprah et que Oprah, c'est sacré. Un peu comme le vieil album usé de Marvin Gaye qui tournait en permanence dans l'autoradio de sa voiture.



* Oui, je sais que la chanson n'existait pas en 1961. But i must say i don't really give a fuck : D
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